Mariage : comment préserver ses fonds propres ?

Pour éviter que la présomption de communauté s’applique à une donation de somme d’argent, pensez à la déclaration d’emploi ou de remploi de fonds propres !

Vous avez reçu des donations de sommes de la part de vos parents ? Si vous ne souhaitez pas que cet argent « tombe » dans le patrimoine commun que vous avez constitué avec votre époux, vous devez prendre certaines précautions. Explications.

Une présomption de communauté

Lorsqu’un couple se marie sans avoir fait rédiger un contrat de mariage par un notaire, il se place, par défaut, sous le régime matrimonial de la communauté de biens réduite aux acquêts. Dans ce cadre, on distingue trois masses de biens : les biens communs et les biens propres de chacun des époux. Étant précisé que les biens communs correspondent à ceux acquis par les époux, ensemble ou séparément, durant le mariage, et les biens propres à ceux que chaque époux a acquis avant le mariage ou reçus par donation ou en héritage avant ou pendant le mariage (maison, voiture, somme d’argent…). Mais attention, si un époux n’est pas en mesure de prouver le caractère propre d’un bien, notamment dans le cadre d’une opération patrimoniale, une présomption de communauté s’applique. En clair, la loi considère alors que ce bien fait partie de la masse commune des époux.

Conserver le caractère propre d’un bien

Pour conserver le caractère propre des sommes d’argent reçues par donation, il convient de réaliser une déclaration d’emploi. Une déclaration à souscrire lorsqu’un époux utilise des fonds propres pour les investir dans l’acquisition d’un bien. Elle lui permet d’attester qu’il en est le seul propriétaire. Pour que cette déclaration soit effective, le notaire doit indiquer, dans l’acte d’acquisition du bien, l’origine des fonds utilisés (deniers propres ou provenant de la vente d’un bien propre – dans ce dernier cas, on parle de « remploi ») et mentionner la volonté de l’époux de faire du bien acquis un bien propre. À noter que le conjoint ne peut pas s’opposer à cette déclaration. Toutefois, il peut en contester la validité en démontrant, par exemple, que les fonds employés appartenaient à la communauté. Il faut savoir également qu’à défaut de déclaration d’emploi dans un acte d’acquisition, l’époux peut, avec l’accord de l’autre, en souscrire une a posteriori. Une déclaration qui peut être réalisée jusqu’à la dissolution de la communauté.

Précision : en l’absence d’une clause d’emploi ou de remploi, le bien acquis est donc considéré comme un bien commun. Mais à la dissolution du régime matrimonial (par divorce ou par décès), l’époux qui a accru la masse commune grâce à des fonds propres peut demander une récompense. Cette dernière, due par la communauté, vient « l’indemniser » .

Article publié le 01 juin 2023 – © Les Echos Publishing 2023

Transmettre votre patrimoine grâce à la donation-partage

Cette opération permet au donateur de répartir et de transmettre tout ou partie de son patrimoine par anticipation.

Moins connue que le testament ou la donation « classique », la donation-partage n’en constitue pas moins un excellent moyen d’organiser, de son vivant, la transmission de son patrimoine.

Qu’est-ce que la donation-partage ?

La donation-partage est l’acte par lequel une personne donne et partage, de son vivant, tout ou partie de ses biens au profit de ses enfants ou de ses petits-enfants. En l’absence d’enfants, elle peut même être réalisée en faveur des collatéraux (frères, sœurs, oncles, tantes…). Procédant, comme son nom l’indique, à la fois de la donation et du partage, la donation-partage permet ainsi d’anticiper le règlement de sa propre succession. Avantage de taille, la donation-partage n’est jamais rapportable à la succession de son auteur, ce qui signifie que le montant donné n’aura pas à être ajouté à la succession pour déterminer la part d’héritage de chaque enfant. De plus, pour vérifier, au décès du donateur, que chaque enfant a bien reçu la part minimale que la loi lui réserve, les biens partagés seront en principe évalués au jour de la donation-partage, et non au jour du décès comme dans une donation ordinaire.

Conditions pour donner

Pour pouvoir réaliser une donation-partage, le donateur doit en faire bénéficier au moins deux enfants (s’il n’en a qu’un, il n’y a effectivement rien à partager !). Sachant que la participation de tous les enfants n’est pas exigée pour sa validité. Mais en pratique, mieux vaut que la donation-partage soit consentie au profit de tous les enfants du donateur et que les attributions à chacun soient équivalentes, si ce n’est strictement égalitaires. S’il n’est pas possible de former des lots équilibrés, il est préférable de prévoir une soulte : celui qui a reçu plus que les autres les indemnise en leur versant une somme d’argent. Il faut savoir également que la donation-partage peut porter sur tous les biens ou sur une partie des biens seulement du donateur. Et toutes sortes de biens (argent, meubles, un ou plusieurs immeubles…) dont le donateur est propriétaire au jour de la donation-partage peuvent être transmis par ce biais.

À noter : une personne peut consentir plusieurs donations-partages à un moindre coût fiscal si elles sont espacées dans le temps. En effet, la règle dite du non-rappel fiscal des donations passées permet de donner, en franchise de droits de donation, 100 000 € à chacun de ses enfants tous les 15 ans, par exemple.

Article publié le 06 avril 2023 – © Les Echos Publishing 2023

Modification d’un testament

Il y a quelques années, j’ai procédé à la rédaction de mon testament. Par prudence, je l’ai ensuite confié à mon notaire afin qu’il l’inscrive au Fichier central des dernières volontés. Je souhaiterais aujourd’hui y apporter certaines modifications. Est-ce possible ?

Oui, vous pouvez apporter à votre testament toutes les modifications que vous souhaitez. Attention toutefois, si trop de changements sont apportés, il est alors plus prudent de rédiger entièrement un nouveau testament. À noter que ces modifications peuvent être faites chez votre notaire. Mais sachez également que vous pouvez révoquer votre testament par un simple testament que vous aurez rédigé seul et que vous aurez conservé chez vous. Vous pouvez également le faire enregistrer.

Article publié le 26 janvier 2023 – © Les Echos Publishing 2022

Comment transmettre son entreprise à moindre coût ?

Passé un certain âge, se pose la question de la transmission de son entreprise. Une transmission qui peut être subie (décès de l’entrepreneur) ou anticipée (par le biais d’une donation, notamment). À ce titre, la transmission, par donation ou par succession, de parts ou d’actions d’une société peut être exonérée de droits de mutation à hauteur de 75 % de leur valeur. Pour en bénéficier, les titres transmis doivent faire l’objet d’un engagement de conservation, aussi appelé « Pacte Dutreil ». Retour sur les conditions d’application de ce dispositif.

D’abord un engagement collectif de conservation…

Les associés doivent conserver les titres transmis pendant au moins 2 ans.

Les titres transmis doivent avoir fait l’objet d’un engagement collectif de conservation pris par le donateur ou le défunt, pour lui et ses ayants cause à titre gratuit, avec un ou plusieurs autres associés de la société. L’engagement « collectif » peut également être pris par une personne seule. En d’autres termes, le dispositif bénéficie aussi aux transmissions de sociétés unipersonnelles (EURL, Sasu…). D’une durée minimale de 2 ans, l’engagement collectif commence à courir à compter de l’enregistrement de l’acte le constatant (pour un acte sous seing privé) ou de la date de l’acte (pour un acte authentique). L’engagement devant, en principe, être en cours au jour de la transmission. En outre, l’engagement collectif doit porter sur un certain quota de titres, à savoir au moins : 10 % des droits financiers et 20 % des droits de vote pour une société cotée ; ou 17 % des droits financiers et 34 % des droits de vote pour une société non cotée. Ces quotas devant être respectés pendant toute la durée de l’engagement collectif. Point important, en l’absence d’engagement collectif pris avant la transmission, il est néanmoins possible de bénéficier de l’exonération partielle à certaines conditions. Ainsi, l’engagement collectif peut être « réputé acquis » lorsque le donateur ou le défunt, seul ou avec son conjoint ou partenaire de Pacs, détient, directement, depuis au moins 2 ans, le quota de titres requis et que l’un d’eux exerce dans la société depuis plus de 2 ans, selon les cas, son activité professionnelle principale ou une fonction de direction éligible.

À noter : depuis le 1er janvier 2019, les engagements collectifs peuvent être réputés acquis en prenant en compte les détentions indirectes (un seul niveau d’interposition), y compris celles du concubin notoire.

Autre condition, la société dont les titres sont transmis doit exercer, de façon prépondérante, une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, peu importe en revanche son régime d’imposition.

… suivi d’un engagement individuel de conservation

Les héritiers doivent conserver (individuellement) les titres transmis pendant 4 ans après l’expiration de l’engagement collectif de conservation.

Au jour de la transmission, chaque donataire ou héritier doit également prendre l’engagement individuel, pour lui et ses ayants cause à titre gratuit, de conserver les titres transmis pendant au moins 4 ans à compter de l’expiration de l’engagement collectif de conservation pris précédemment ou de la transmission si l’engagement collectif est réputé acquis.

Précision : l’engagement individuel peut ne porter que sur une partie des titres transmis, l’exonération étant alors limitée à la fraction des titres faisant l’objet de cet engagement.

Exercice professionnel

En outre, l’un des donataires ou héritiers ayant pris l’engagement individuel, ou l’un des associés ayant souscrit l’engagement collectif doit exercer, pendant la durée de l’engagement collectif et les 3 ans qui suivent la transmission, soit son activité professionnelle principale (dans le cas d’une société de personnes), soit une fonction de direction éligible (dans le cas d’une société soumise à l’impôt sur les sociétés).

Obligations déclaratives

Enfin, certaines obligations déclaratives doivent être respectées pour pouvoir bénéficier de l’exonération Dutreil. Concrètement, les héritiers ou les donataires doivent joindre à la déclaration de succession ou à l’acte de donation une attestation de la société dont les titres font l’objet de l’engagement collectif certifiant que celui-ci est en cours au jour de la transmission et qu’il a porté jusqu’à cette date sur le quota de titres requis. Puis, dans les 3 mois qui suivent la fin de l’engagement individuel, ils doivent remettre une attestation de la société certifiant que l’ensemble des conditions d’application du Pacte Dutreil ont été respectées jusqu’à leur terme. Si vous souhaitez mettre en place un Pacte Dutreil, il peut être opportun, compte tenu de la complexité du dispositif, de faire appel à votre conseil habituel.

Remise en cause de l’exonération

Si les conditions pour bénéficier du dispositif Dutreil ne sont pas respectées, les avantages fiscaux peuvent être remis en cause.

L’exonération partielle peut être remise en cause en cas de non-respect des engagements collectifs et individuels, notamment en raison de la cession des titres de la société. Cette remise en cause peut concerner soit l’ensemble des héritiers ou donataires, soit seulement l’un d’entre eux. La remise en cause du régime de faveur donne alors lieu à restitution du complément de droits de mutation ayant fait l’objet de l’exonération et au versement d’un intérêt de retard (0,20 % par mois).

Article publié le 26 janvier 2023 – © Les Echos Publishing 2022

Conséquences de l’accord d’un époux au cautionnement souscrit par son conjoint

Mon épouse a donné son accord exprès au cautionnement que j’ai souscrit au profit de la banque en contrepartie de l’octroi d’un crédit pour mon entreprise. Quelles sont les conséquences patrimoniales de ce consentement ?

Lorsqu’une personne mariée sous le régime de la communauté souscrit un cautionnement, seuls ses biens propres et ses revenus sont engagés dans l’opération. Mais si son conjoint donne son consentement exprès au cautionnement – les banques le demandent très souvent –, par exemple en inscrivant et en signant dans l’acte la mention « bon pour consentement aux engagements ci-dessus », les biens communs des époux seront alors également engagés et pourront donc servir de gage au banquier en cas de défaut de paiement des échéances du prêt. En revanche, les biens propres du conjoint resteront à l’abri des poursuites de ce dernier.

Article publié le 27 décembre 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Gestion des biens indivis dans le cadre d’une succession

Héritier dans la succession d’un proche décédé, j’ai la charge de réaliser les démarches nécessaires pour gérer le patrimoine du défunt. Je dois notamment me pencher sur la question des contrats d’assurance. En tant qu’héritier, ai-je le droit de souscrire et de résilier de tels contrats ?

Tout à fait  ! Après un décès, en cas de pluralités d’héritiers, le patrimoine du défunt entre en indivision. Une étape transitoire dans le règlement de la succession. Sachez que tout indivisaire, dont vous faites partie, peut prendre des mesures nécessaires à la conservation des biens indivis. Il peut s’agir d’actes matériels (travaux de réparation, par exemple) ou juridiques (souscription d’un contrat d’assurance multirisque habitation).

Article publié le 14 décembre 2022 – © Les Echos Publishing 2022

SCI : attribution des pertes de la société à certains associés

En principe, chaque associé se partage les bénéfices et les pertes de la société à proportion de sa part dans le capital social. Toutefois, de manière ponctuelle, les associés peuvent valablement décider d’une répartition fortement déséquilibrée.

Dans une affaire récente, un couple marié était associé d’une société civile immobilière (SCI). Ce couple détenait, depuis une donation consentie le 28 septembre 2005, 1 % du capital social et leurs 5 enfants 99 %. Lors de délibérations prises en assemblée générale extraordinaire des 30 décembre 2014, 28 décembre 2015 et 30 décembre 2016, la totalité des pertes enregistrées par la SCI pour les exercices 2014, 2015 et 2016 avait été attribuée intégralement aux époux (les parents). Ces derniers avaient ainsi déclaré, au titre de leurs revenus imposables des années 2014 à 2016, des déficits fonciers correspondant à la totalité des pertes enregistrées par la société au titre de ces mêmes années.

Précision : selon l’article 1844-1 du Code civil, « la part de chaque associé dans les bénéfices et sa contribution aux pertes se déterminent à proportion de sa part dans le capital social […]. Toutefois, la stipulation attribuant à un associé la totalité du profit procuré par la société ou l’exonérant de la totalité des pertes, celle excluant un associé totalement du profit ou mettant à sa charge la totalité des pertes sont réputées non écrites. »

À l’occasion d’un contrôle, l’administration fiscale avait estimé que la fraction des déficits fonciers de la SCI attribuée aux époux devait être limitée à celle correspondant à leur part dans le capital social de la société, soit 1 %. En conséquence, elle avait adressé aux époux des propositions de rectification conduisant à un rehaussement de leurs revenus fonciers. Face à cette situation, les époux avaient formé un recours devant la justice administrative. Saisi du litige, le Conseil d’État a considéré que les décisions des assemblées générales visées ne dérogeaient que de manière ponctuelle (2014, 2015 et 2016) aux règles statutaires organisant la répartition des seules pertes constatées à la clôture des exercices concernés et qu’elles ne pouvaient donc pas être regardées comme des clauses léonines réputées non écrites, alors même que ces décisions avaient eu pour effet d’exonérer certains associés (les enfants) de toute participation à ces pertes. Le redressement fiscal a donc été annulé.

Conseil d’État, 18 octobre 2022, n° 462497

Article publié le 09 décembre 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Exonération de droits de mutation en cas de transmission de terrains agricoles loués

Je me suis laissé dire que la fiscalité applicable lors de la transmission familiale d’une exploitation agricole allait être allégée. Qu’en est-il exactement ?

En effet, le projet de loi de finances pour 2023 prévoit d’augmenter la limite d’exonération de droits de mutation lors de la transmission à titre gratuit (donation, succession) de biens agricoles loués par bail rural à long terme (ou par bail cessible hors du cadre familial) et de parts de groupements fonciers agricoles. Ainsi, ces biens seraient exonérés à concurrence de 75 % de leur valeur dans une limite qui serait portée à 500 000 € (300 000 € actuellement). Rappelons qu’au-delà de cette limite, l’exonération n’est que de 50 %. En contrepartie, le bénéficiaire de la transmission (héritier, donataire) devrait s’engager à conserver la propriété des biens fonciers reçus pendant 10 ans (au lieu de 5 ans actuellement). À suivre…

Article publié le 29 octobre 2022 – © Les Echos Publishing 2022