Devoir de conseil du vendeur : pas à l’égard d’un acheteur compétent !

Le vendeur professionnel n’est pas tenu à un devoir de conseil à l’égard d’un acheteur qui dispose déjà de connaissances techniques étendues et suffisantes sur le produit.

Le vendeur professionnel est tenu à une obligation d’information et de conseil à l’égard de ses clients. Cette obligation lui impose notamment de se renseigner sur les besoins de l’acheteur et de l’informer de l’aptitude ou de l’adéquation du bien proposé à l’utilisation qui en est prévue.


Attention : en cas de non-respect de son devoir de conseil, le vendeur est susceptible d’être condamné à verser des dommages-intérêts à l’acheteur. Dans certains cas graves, les juges peuvent même annuler la vente.

Cette obligation d’information et de conseil pèse sur le vendeur lorsque l’acheteur est un profane, c’est-à-dire une personne qui ne dispose pas de la compétence lui permettant de juger par elle-même de la portée exacte des caractéristiques techniques du bien vendu et de son adaptation à l’usage auquel il est destiné. Cette personne peut donc être un particulier, mais aussi, le cas échéant, un professionnel.

Un client qui dispose de connaissances techniques étendues et suffisantes

En revanche, le vendeur n’est pas tenu par cette obligation lorsque l’acheteur a la compétence et les connaissances pour apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques du produit ou du matériel considéré. Et ce, qu’il s’agisse d’un professionnel ou d’un simple consommateur.C’est ce que les juges ont décidé dans une affaire récente. En l’espèce, des époux avaient conclu un contrat de fourniture et de pose d’une ventilation mécanique auprès d’un vendeur professionnel. Après son installation, la ventilation avait connu des dysfonctionnements persistants si bien que les acheteurs avaient engagé la responsabilité du vendeur, lui reprochant d’avoir failli à son obligation d’information et de conseil.Mais les juges ne leur ont pas donné gain de cause. En effet, ils ont d’abord constaté que le caisson de ventilation fonctionnait bien et que les dysfonctionnements du système étaient liés à l’installation déjà existante. Ensuite, ils ont relevé que l’un des époux, issu lui-même du secteur du bâtiment, avait expressément choisi le modèle installé, dont il avait donné les références au vendeur, et qu’il s’était même opposé à la vérification de l’installation préexistante par le technicien. Et enfin, qu’il disposait de grandes connaissances relatives aux mécanismes et aux caractéristiques techniques d’une ventilation double flux, qu’il avait proposé des modifications pour améliorer l’efficacité du fonctionnement du matériel et que ses compétences en la matière pouvaient donc être considérées comme comparables à celles de son fournisseur.Les juges en ont conclu que le fournisseur, qui avait constaté que le client avait déjà des connaissances techniques étendues et suffisantes, n’était pas tenu de lui donner des indications portant sur des points qu’il connaissait déjà.Cassation civile 1re, 9 septembre 2020, n° 18-22181

Article publié le 05 février 2021 – © Les Echos Publishing 2021

Liquidation judiciaire : le dirigeant bénévole peut-il être inquiété ?

Bien qu’il soit bénévole, le dirigeant d’une société mise en liquidation judiciaire, qui a commis des fautes de gestion ayant contribué à l’insuffisance d’actif, peut être condamné à combler une partie du passif. Sa responsabilité peut être engagée à ce titre de la même manière que s’il était rémunéré.

Lorsqu’une société est mise en liquidation judiciaire, il n’est pas rare que le liquidateur cherche à engager la responsabilité de son dirigeant en lui reprochant d’avoir commis une faute de gestion ayant contribué à l’insuffisance d’actif, c’est-à-dire quand l’actif de la société ne suffit pas à régler ses créanciers (ce qui est toujours le cas). Au terme de cette action, dite « en comblement de passif », le dirigeant peut alors être condamné à payer sur ses deniers personnels tout ou partie des dettes de la société.


Précision : une simple négligence dans la gestion de la société ne peut toutefois pas être retenue à l’encontre d’un dirigeant pour mettre en jeu sa responsabilité et lui faire payer personnellement une partie des dettes de celle-ci.

Pas de pitié pour le dirigeant bénévole !

Lorsqu’il est bénévole, un dirigeant de société peut être condamné à combler le passif social de la même manière que s’il était rémunéré.C’est ce que les juges ont déclaré dans une affaire où le dirigeant d’une société par actions simplifiée mise en liquidation judiciaire, à qui il était reproché d’avoir commis des fautes de gestion ayant conduit à aggraver les dettes de la société, avait tenté de faire valoir que sa responsabilité devait être appliquée moins rigoureusement car ses fonctions n’étaient pas rémunérées. À l’appui de sa demande, il avait invoqué un article du Code civil (l’article 1992) qui prévoit que la responsabilité du mandataire est appliquée moins rigoureusement à celui dont le mandat est gratuit. Un argument rejeté par les juges qui ont affirmé que ce texte ne s’applique pas à la situation du dirigeant d’une société en liquidation judiciaire poursuivi en paiement de l’insuffisance d’actif.Cassation commerciale, 9 décembre 2020, n° 18-24730

Article publié le 29 janvier 2021 – © Les Echos Publishing 2021