Pluralité de gérants de SARL : la responsabilité d’un seul peut être engagée

Le fait qu’une SARL soit dirigée par plusieurs gérants n’empêche pas que la responsabilité de ces derniers puisse être engagée individuellement.

Une société à responsabilité limitée (SARL) peut être gérée par un ou plusieurs gérants. Ces derniers sont responsables, individuellement ou solidairement, selon le cas, envers la société ou envers les personnes étrangères à la société (les « tiers ») des infractions à la loi ou aux règlements, des violations des statuts ou encore des fautes commises dans leur gestion. Sachant que lorsque plusieurs gérants ont coopéré aux mêmes faits, le tribunal détermine la part contributive de chacun dans la réparation du dommage. À ce titre, la Cour de cassation vient d’affirmer, pour la première fois semble-t-il, que la pluralité de gérants dans une SARL ne fait pas obstacle à ce que leur responsabilité soit engagée de manière individuelle. Dans cette affaire, la cogérante d’une SARL exploitant un supermarché dans un centre commercial exploitait également un restaurant dans ce même centre. Quelque temps avoir quitté la SARL, elle avait vu sa responsabilité pour faute de gestion engagée par la société. En effet, cette dernière lui reprochait de lui avoir fait supporter des factures d’électricité qui étaient dues par son restaurant. L’ex-gérante avait alors fait valoir que l’action en responsabilité aurait dû être engagée non pas contre elle seulement, mais contre tous les cogérants. Les juges n’ont donc pas été de cet avis : la SARL pouvait valablement agir en responsabilité contre l’ex-gérante pour des fautes commises dans sa gestion quand bien même y avait-il plusieurs gérants.

Cassation commerciale, 25 janvier 2023, n° 21-15772

Article publié le 16 février 2023 – © Les Echos Publishing 2022

Quant à la preuve du renouvellement de la période d’essai…

Pour s’assurer du consentement clair et non équivoque du salarié à voir renouveler sa période d’essai, les juges peuvent se fonder sur divers éléments comme des échanges de mails.

Bien souvent, un contrat de travail à durée indéterminée débute par une période d’essai. Et si cette période ne suffit pas à l’employeur pour apprécier les aptitudes du nouvel embauché, elle peut être renouvelée une fois. Mais à condition que ce renouvellement soit prévu par un accord de branche étendu (qui en fixe la durée et les modalités) et par le contrat de travail du salarié. Et ce n’est pas tout, il faut aussi obtenir l’accord du salarié. Sachant que lorsqu’un doute subsiste en la matière, les juges vérifient que la volonté du salarié de renouveler sa période d’essai est claire et non équivoque… Dans une affaire récente, un salarié avait été engagé en tant que directeur des ressources humaines par un contrat de travail qui prévoyait une période d’essai de 3 mois renouvelable. Il avait ensuite signé une lettre actant le renouvellement de sa période d’essai. Environ un mois plus tard, son employeur lui avait notifié la rupture de sa période d’essai. Le salarié avait alors saisi la justice en vue de contester le renouvellement de sa période d’essai (et donc d’obtenir la requalification de la rupture de la période d’essai en licenciement abusif). Il estimait en effet qu’il n’avait pas accepté ce renouvellement de manière claire et non équivoque. Saisie de l’affaire, la Cour d’appel de Versailles a constaté que la lettre de renouvellement signée par le salarié ne contenait aucune mention (comme la mention « lu et approuvé ») permettant de s’assurer de sa volonté claire et non équivoque. Elle a toutefois relevé que le salarié avait adressé des mails à plusieurs recruteurs dans lesquels il indiquait que sa période d’essai avait été renouvelée. Pour les juges, ces mails prouvaient que le salarié avait manifesté sa volonté de manière claire et non équivoque d’accepter le renouvellement. Les juges n’ont donc pas fait droit à la demande du salarié.

Conseil : afin d’éviter une contestation du salarié, l’employeur a tout intérêt à lui faire signer une lettre de renouvellement de la période d’essai comportant la mention manuscrite « lu et approuvé ».

Cassation sociale, 25 janvier 2023, n° 21-13699

Article publié le 16 février 2023 – © Les Echos Publishing 2022

Cession d’actions : quelle obligation pour la société en cas de refus d’agrément du cessionnaire ?

Lorsque, après avoir refusé d’agréer le cessionnaire proposé par un associé qui souhaite vendre ses actions, elle s’est engagée à les racheter au prix fixé par un expert, ce que l’associé a accepté, la société ne peut plus revenir sur cet accord.

Très souvent, dans les sociétés, les statuts prévoient qu’en cas de cession de parts sociales ou d’actions par un associé, le cessionnaire proposé par ce dernier devra être agréé par les autres associés. Et qu’à défaut d’agrément, la société devra racheter les parts sociales ou les actions considérées. À ce titre, dans une affaire récente, l’un des deux associés d’une société par actions simplifiée (SAS), qui souhaitait quitter la société et donc vendre ses actions, avait demandé l’agrément du cessionnaire qu’il proposait. Les statuts prévoyaient dans ce cas que le cessionnaire devrait être agréé par l’assemblée générale et qu’en cas de refus d’agrément et à défaut de rachat des actions par la société dans un délai de 2 mois, l’agrément serait réputé acquis. La société ayant refusé d’agréer le cessionnaire, elle avait proposé à l’associé cédant de racheter ses actions. Elle avait alors demandé en justice la mise sous séquestre de ces actions ainsi que la désignation d’un expert pour déterminer leur valeur. Ce dernier avait remis son rapport 19 mois plus tard et la SAS avait finalement refusé de racheter les actions. Mécontent, l’associé cédant avait agi en justice contre la SAS. Mais la cour d’appel avait rejeté son action car, selon elle, puisque la SAS n’avait pas racheté les actions dans le délai de 2 mois, l’agrément du cessionnaire proposé par l’associé était réputé donné et ce dernier pouvait donc lui vendre ses actions comme prévu. Saisie à son tour, la Cour de cassation a censuré la décision de la cour d’appel. En effet, elle a constaté qu’après avoir refusé l’agrément, la société avait manifesté son intention de racheter les actions au prix fixé par un expert, ce que l’associé cédant avait accepté, et qu’il y avait donc eu accord sur la chose et sur les modalités de détermination du prix. La SAS ne pouvait donc pas revenir sur cet accord et était donc tenue de racheter les actions.

Cassation commerciale, 4 janvier 2023, n° 21-10035

Article publié le 13 février 2023 – © Les Echos Publishing 2022

Mise à disposition d’une société de terres agricoles louées : gare à l’information du bailleur !

L’exploitant agricole qui s’abstient d’aviser son bailleur de la mise à disposition des terres louées à une société risque de se voir ultérieurement privé de la faculté de céder son bail.

Lorsqu’un exploitant agricole met les terres qu’il loue à la disposition d’une société, il est tenu d’en informer le bailleur, par lettre recommandée, dans les 2 mois qui suivent la réalisation de l’opération.

Précision : l’avis adressé au bailleur doit mentionner le nom de la société, le tribunal de commerce auprès duquel la société est immatriculée et les parcelles que le preneur met à sa disposition.

Sachant que la sanction encourue par l’exploitant qui s’abstient d’envoyer cet avis à son bailleur est peu dissuasive. En effet, si la résiliation de son bail est encourue dans ce cas, ce n’est que s’il n’adresse pas cet avis au bailleur dans l’année qui suit la mise en demeure envoyée par ce dernier et si ce manquement entraîne un préjudice pour le bailleur. Autant dire qu’il y a très peu de chances qu’elle soit prononcée… Mais attention, car les juges viennent de considérer que le défaut d’information du bailleur quant à la mise des terres louées à la disposition d’une société constitue un manquement de l’exploitant locataire à ses obligations, ce qui le prive du droit de céder son bail. Car, ont-ils rappelé, la faculté de céder le bail est réservée au locataire de bonne foi, c’est-à-dire à celui qui s’est acquitté de toutes les obligations résultant de son bail. Dans cette affaire, un agriculteur avait mis les terres qu’il louait à la disposition d’une société dans laquelle il entendait exercer son activité sans en avoir avisé le bailleur. Plusieurs années après, lorsqu’il avait demandé au bailleur l’autorisation de céder son bail à son fils, ce dernier avait refusé. En effet, selon lui, l’exploitant devait être déchu de son droit de céder son bail en raison du manquement qu’il avait commis de ne pas l’avoir informé en son temps de la mise à disposition. Les juges lui ont donc donné raison.

À noter : dans cette affaire, l’argument selon lequel le manquement du locataire à son obligation d’information du bailleur n’aurait causé aucun préjudice à ce dernier n’a pas été pris en compte par les juges.

Cassation civile 3e, 26 octobre 2022, n° 21-17886

Article publié le 07 février 2023 – © Les Echos Publishing 2022

Action en garantie des vices cachés et indemnisation du préjudice

Lorsqu’un bien atteint d’un vice caché a fait l’objet des réparations nécessaires pour sa remise en état, l’acheteur reste néanmoins en droit de réclamer une indemnisation au vendeur au titre des préjudices qu’il a subis en raison du vice et qui n’ont pas été réparés.

Le vendeur d’un bien est tenu de garantir l’acheteur contre les vices cachés. Le vice caché étant un défaut non visible mais existant au moment de l’achat et qui apparaît ensuite, rendant le bien impropre à l’usage auquel il est destiné ou qui diminue tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquis ou l’aurait acquis à un prix moins élevé.

Précision : la garantie des vices cachés s’applique à tous les biens, mobiliers et immobiliers, neufs ou d’occasion, vendus par un professionnel ou par un particulier.

Ainsi, s’il s’avère que le bien vendu est atteint d’un vice caché, l’acheteur peut demander, si besoin au juge, l’annulation de la vente. Dans ce cas, il rend le bien au vendeur et celui-ci lui rembourse la totalité du prix. Mais plutôt que l’annulation de la vente, l’acheteur peut préférer demander une diminution du prix. Il garde alors la chose, mais le vendeur lui restitue une partie de la somme versée. Sachant que l’acheteur peut, indépendamment de l’action en garantie des vices cachés, demander des dommages-intérêts au vendeur pour les préjudices qu’il a subis en raison du vice. C’est ce que les juges ont rappelé dans l’affaire récente suivante. Un particulier avait acheté à une société un véhicule d’occasion qui avait subi pas moins de 12 pannes dans les 8 mois qui ont suivi. L’acheteur avait alors agi contre la société en vue d’obtenir l’annulation de la vente ainsi que l’indemnisation de ses préjudices. Mais dans la mesure où toutes les avaries du véhicule avaient été réparées par le vendeur, la cour d’appel avait rejeté les demandes de l’acheteur au motif que le véhicule « n’était pas impropre à l’usage auquel il était destiné ».

Le droit à indemnisation

Saisie à son tour du litige, la Cour de cassation a censuré en partie la décision de la cour d’appel. En effet, si l’acheteur d’un bien affecté d’un vice caché, qui a accepté que le vendeur procède à sa remise en état, ne peut plus agir en garantie dès lors que le vice originaire a disparu, il peut néanmoins demander l’indemnisation du préjudice qu’il a éventuellement subi du fait de ce vice.

Cassation civile 1re, 14 décembre 2022, n° 21-20809

Article publié le 02 février 2023 – © Les Echos Publishing 2022

Cessation des paiements : un prêt consenti à l’entreprise est-il un actif disponible ?

Un prêt consenti au chef d’entreprise en difficulté par ses proches constitue un actif disponible, ce qui lui permet de contester son état de cessation des paiements et sa mise en liquidation judiciaire.

Une entreprise est en état de cessation des paiements lorsqu’elle ne peut plus faire face à son passif exigible (ses dettes à payer immédiatement) avec son actif disponible. Dans ce cas, elle doit, à la demande du chef d’entreprise lui-même ou de ses créanciers, faire l’objet d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire. À ce titre, la question s’est récemment posée en justice de savoir si un prêt consenti au chef d’entreprise pouvait constituer un actif disponible. Dans cette affaire, un viticulteur qui avait été mis en redressement judiciaire bénéficiait d’un plan de redressement pour une durée de 15 ans. Au cours de ce plan, la caisse de mutualité sociale avait demandé qu’il soit placé en liquidation judiciaire car il n’avait pas payé les cotisations sociales dont il était redevable. Estimant qu’il était en état de cessation des paiements, la cour d’appel avait mis fin au plan de redressement et l’avait mis en liquidation judiciaire. De son côté, le viticulteur avait fait valoir qu’il n’était pas en cessation des paiements puisqu’un prêt lui avait été consenti par sa famille et ses amis pour régler ses cotisations. Mais pour la cour d’appel, ce prêt ne pouvait pas être considéré comme un actif disponible puisque l’intéressé ne pouvait régler sa dette qu’en en créant une autre, peu importe que cette dernière ne soit pas immédiatement exigible. Mais la Cour de cassation a censuré la décision de la cour d’appel. Pour elle, quelle que soit la qualité du prêteur, dès lors que le remboursement immédiat du prêt n’était pas exigé, les fonds remis au viticulteur constituaient bien un actif disponible. Du coup, en l’absence de précisions de nature à établir que son passif exigible excédait son actif disponible, l’état de cessation des paiements du viticulteur n’était pas caractérisé. Ce dernier était donc en droit de contester la remise en cause du plan de redressement dont il bénéficiait et sa mise en liquidation judiciaire.

Cassation commerciale, 14 décembre 2022, n° 21-17706

Article publié le 31 janvier 2023 – © Les Echos Publishing 2022

Quand une association entretient des relations privilégiées avec une entreprise

Les associations dont l’objet consiste à fournir des services à des entreprises qui en retirent un avantage concurrentiel sont soumises aux impôts commerciaux.

Les associations sont, en principe, exonérées des impôts commerciaux (TVA, impôt sur les sociétés et contribution économique territoriale).Ce n’est toutefois pas le cas des associations qui entretiennent des relations privilégiées avec des entreprises, c’est-à-dire des associations dont l’objet consiste à fournir des services à des entreprises qui en retirent un avantage concurrentiel. Ainsi, est soumise aux impôts commerciaux l’association qui permet de manière directe à des professionnels de réaliser une économie de dépenses, un surcroît de recettes ou de bénéficier de meilleures conditions de fonctionnement, quand bien même l’association ne rechercherait pas de profits pour elle-même. Dans une affaire récente, une association proposait des cours d’initiation au ski pour les enfants, lesquels lui procuraient 70 % de ses recettes. Ces cours étaient dispensés par des moniteurs de ski qui étaient membres de l’association. À la suite d’une vérification de comptabilité, l’administration fiscale a notifié à l’association un rappel de TVA au titre de cette activité d’initiation au ski. Une décision que cette dernière a contestée en justice. Le Conseil d’État a donné raison à l’administration fiscale et a soumis l’association à la TVA : il a considéré que celle-ci entretenait des relations privilégiées avec des membres de l’association exerçant une activité commerciale, les moniteurs de ski. En effet, selon les juges, ces travailleurs indépendants retiraient un avantage concurrentiel de l’activité de l’association puisque celle-ci leur permettait de réaliser de manière directe un surcroît de recettes.

À noter : pour le Conseil d’État, il est indifférent que les prix pratiqués par les moniteurs de ski dans le cadre des cours de l’association soient moins élevés que ceux de leurs cours particuliers.

Conseil d’État, 17 octobre 2022, n° 453019

Article publié le 30 janvier 2023 – © Les Echos Publishing 2022

L’astreinte peut être requalifiée en temps de travail effectif…

Si les contraintes imposées au salarié durant les périodes d’astreinte ne lui permettent pas de vaquer librement à ses occupations personnelles lorsqu’il n’est pas sollicité, ces périodes peuvent être requalifiées en temps de travail effectif.

Dans le cadre de leur emploi, les salariés peuvent être amenés à effectuer des astreintes. Celles-ci correspondent à des périodes durant lesquelles les salariés, sans être sur leur lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de leur employeur, doivent être en mesure d’intervenir pour accomplir un travail au service de l’entreprise. Les périodes d’astreinte donnent alors lieu, pour les salariés, à une contrepartie soit sous forme financière, soit sous forme de repos.

Précision : les interventions du salarié pendant une période d’astreinte sont, elles, rémunérées comme du temps de travail effectif.

Mais attention, l’astreinte peut être requalifiée en temps de travail effectif, c’est-à-dire en permanence, si les contraintes imposées au salarié sont d’une telle intensité qu’elles ne lui permettent pas de vaquer librement à ses occupations personnelles. Dans une affaire récente, un dépanneur automobile était soumis à des astreintes, sur des périodes de 15 jours consécutifs, afin de pouvoir intervenir sur une portion d’autoroute. En litige avec son employeur, il avait saisi la justice afin d’obtenir, entre autres, la requalification de ces astreintes en temps de travail effectif. La Cour d’appel d’Amiens avait rejeté sa demande en retenant, notamment, que les astreintes étaient bien prévues par la convention collective applicable au salarié. Elle avait, en outre, relevé qu’il avait été constitué des équipes de plusieurs dépanneurs, munis d’un téléphone, qui intervenaient à la demande du dispatcheur, lequel, contrairement aux autres salariés, était spécialement affecté à la réception continue des appels d’urgence. Mais la Cour de cassation, elle, a rappelé que, durant les périodes d’astreinte, le salarié n’est pas à la disposition permanente et immédiate de l’employeur. Et ce, contrairement aux périodes de temps de travail effectif durant lesquelles le salarié est à la disposition de l’employeur, se conforme à ses directives et ne peut vaquer librement à ses occupations personnelles. Aussi, selon les juges, en cas de litige, il convient d’analyser les conditions dans lesquelles se déroulent les astreintes afin de déterminer si les contraintes imposées au salarié n’affectent pas significativement sa faculté de vaquer à ses occupations personnelles lorsqu’il n’est pas sollicité. Car dans un tel cas, les astreintes constituent, en réalité, des périodes de temps de travail effectif. Or, dans cette affaire, la Cour d’appel n’a pas procédé à une telle analyse alors même que le salarié disposait d’un temps relativement court (30 minutes) pour se rendre sur le lieu de ses interventions. L’affaire sera donc de nouveau examinée par les juges d’appel.

Cassation sociale, 26 octobre 2022, n° 21-14178

Article publié le 23 janvier 2023 – © Les Echos Publishing 2022

Quand un bénévole associatif est en réalité un salarié

Le bénévole qui exécute une prestation dans un lien de subordination et reçoit en contrepartie une rémunération est un salarié.

La personne qui réalise une prestation de travail pour l’association dans le cadre d’un lien de subordination et contre le paiement d’une rémunération est un salarié. Un bénévole, quant à lui, donne de son temps gratuitement et librement au sein d’une association qu’il choisit. Les associations ne doivent pas confondre ces deux statuts ! En effet, la reconnaissance du statut de salarié à un bénévole peut coûter très cher : paiement des cotisations et contributions sociales sur les indemnités et avantages en nature qui lui ont été versés, paiement au « faux bénévole », lorsque l’association cesse de le solliciter, d’une indemnité de licenciement et d’indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, amendes pour travail dissimulé… Ainsi, dans une affaire récente, un animateur et entraîneur bénévole d’un club de volley-ball a obtenu des tribunaux la reconnaissance du statut de salarié. Les juges ont d’abord constaté que le bénévole avait fourni une prestation de travail notamment en encadrant des équipes et en intervenant dans différentes écoles au nom de l’association. Ensuite, ils ont relevé que cette dernière lui avait versé une somme mensuelle de plusieurs centaines d’euros ne correspondant pas à des remboursements de frais et avait payé son loyer pendant plusieurs mois. Enfin, ils ont retenu que le bénévole travaillait sous la subordination juridique de l’association puisque celle-ci lui transmettait des plannings de travail détaillés mentionnant une présence et un respect des horaires obligatoires. Les juges en ont conclu que le bénévole était en réalité lié par un contrat de travail avec l’association. Celle-ci a donc été condamnée à lui verser plus de 27 000 € au titre notamment de rappels de salaire, d’indemnité pour travail dissimulé et d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Cour d’appel d’Amiens, 7 septembre 2022, RG n° 21/02142

Article publié le 16 janvier 2023 – © Les Echos Publishing 2022

Pacte Dutreil : quelles conditions pour la transmission de titres d’une holding mixte ?

Les critères à retenir pour établir la prépondérance de l’activité d’animation d’une société holding mixte dans le cadre de l’exonération « Dutreil » viennent d’être précisés.

Le « pacte Dutreil » permet aux donataires ou aux héritiers qui reçoivent des titres de société de bénéficier d’une exonération de droits de mutation à titre gratuit, à hauteur de 75 % de la valeur des titres transmis. Pour en profiter, la société dont les titres sont transmis doit, notamment, exercer de façon prépondérante une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale. Sont donc également concernées les sociétés mixtes, c’est-à-dire qui exercent à la fois une activité opérationnelle principale et une activité civile accessoire. Ce qui inclut, a jugé la Cour de cassation, les holdings dont l’animation de groupe constitue leur activité principale. Et, pour les juges, le caractère prépondérant de l’activité d’animation est démontré notamment lorsque la valeur vénale des titres des filiales détenus par la holding représente plus de 50 % de son actif total. À ce propos, la Cour d’appel de Paris a précisé que seuls peuvent être retenus les titres de participation détenus dans les filiales, exerçant une activité opérationnelle, qui sont effectivement animées par la holding au jour de la transmission des titres, à l’exclusion des participations minoritaires dans des filiales non animées. Et lorsque la prépondérance de l’activité d’animation ne peut être déduit de la valeur vénale des titres des filiales animées, elle peut s’apprécier au regard d’autres actifs (valeurs mobilières, immobilier…) détenus par la holding, qu’ils soient immobilisés ou circulants, à condition qu’ils soient affectés à l’activité d’animation des filiales. Autrement dit, si le critère de la valeur des participations animées n’est pas suffisant, d’autres actifs affectés à l’animation peuvent être retenus.

Cour d’appel de Paris, 24 octobre 2022, n° 21-00.555

Article publié le 28 décembre 2022 – © Les Echos Publishing 2022