Le locataire peut-il cesser de payer le loyer en cas de manquement du bailleur ?

À certaines conditions seulement, le locataire commercial peut suspendre le paiement des loyers en cas de manquement du bailleur à ses obligations.

Un locataire ne peut suspendre le paiement des loyers en invoquant un manquement du bailleur à ses obligations que si ce manquement l’empêche totalement d’utiliser les locaux loués ou de les utiliser conformément à l’usage auquel ils sont destinés.La Cour de cassation vient de rappeler ce principe dans l’affaire récente suivante. Une société locataire d’un local à usage commercial avait cessé de payer ses loyers en raison d’infiltrations d’eau dans ce local. À l’appui de sa décision, elle invoquait le fait que le bailleur avait manqué à son obligation de délivrance. La cour d’appel lui avait donné raison, ayant constaté que le bailleur avait manqué à une obligation essentielle du bail.


Rappel : le bailleur est obligé de délivrer le bien loué au locataire, d’entretenir ce bien en état de servir à l’usage pour lequel il a été loué et d’en faire jouir paisiblement le locataire pendant la durée du bail.

Mais la Cour de cassation a censuré l’arrêt de la cour d’appel. En effet, elle lui a reproché de ne pas avoir recherché si les infiltrations alléguées avaient rendu les locaux loués impropres à l’usage auquel ils étaient destinés.Ainsi, contrairement à ce que la cour d’appel avait estimé, le manquement du bailleur à une obligation essentielle du bail ne suffit pas à justifier le défaut de paiement des loyers par le locataire.Cassation civile 3e, 6 juillet 2023, n° 22-15923

Article publié le 12 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : Copyright (C) Andrey Popov

Congés payés : report après un congé parental d’éducation

Le salarié en congé parental d’éducation a droit au report des congés payés qu’il a acquis avant son congé parental.

Les salariés acquièrent 2,5 jours ouvrables de congés payés par mois de travail effectif pendant une « période de référence » qui s’étale généralement du 1er juin au 31 mai. Soit un total de 5 semaines de congés payés.Ils prennent ces congés payés pendant une période déterminée par un accord d’entreprise ou, à défaut, par la convention collective applicable dans l’entreprise. En l’absence d’accord, cette période est définie par l’employeur.Que se passe-t-il lorsque les salariés ne peuvent pas poser tout ou partie de leurs congés payés pendant cette période en raison de leur absence de l’entreprise ?Si pour certains évènements (arrêt de travail pour maladie professionnelle ou accident du travail, par exemple), les congés payés sont reportés jusqu’au retour du salarié, ce n’était pas le cas jusqu’à récemment pour le congé parental d’éducation.Ainsi, en 2019, une salariée de retour d’un congé parental d’éducation n’avait pas pris les congés payés qu’elle avait acquis avant ce congé. À la suite d’une rupture conventionnelle, elle avait réclamé en justice le paiement d’une indemnité compensatrice pour ces congés non pris.Saisie du litige, la Cour de cassation a considéré que les congés payés acquis avant un congé parental d’éducation n’étaient pas perdus mais devaient être reportés à l’issue de ce congé. La salariée n’ayant pas pris ces congés payés à son retour de congé parental d’éducation, elle avait donc droit à leur paiement sous la forme d’une indemnité compensatrice.


À savoir : en mars 2023, la loi d’adaptation du droit français au droit de l’Union européenne a intégré dans le Code du travail une disposition selon laquelle le salarié en congé parental d’éducation « conserve le bénéfice de tous les avantages qu’il avait acquis avant le début du congé ». Ce qui inclut les congés payés acquis avant le début du congé parental d’éducation. Cette intégration met donc fin au débat en confirmant que le salarié de retour d’un tel congé a droit au report de ces congés payés.

Cassation sociale, 13 septembre 2023, n° 22-14.043

Article publié le 11 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : Dobrila Vignjevic

Fermages impayés par un enfant à un parent : à rapporter à la succession ?

En principe, les héritiers doivent rapporter à la succession la valeur des biens que le défunt leur a donnés de son vivant. Les fermages que le défunt a renoncé à percevoir n’échappent pas à cette règle.

Sauf exceptions (donation-partage entre les héritiers, notamment), un héritier doit rapporter à la succession les donations que le défunt lui a consenties de son vivant. En effet, ces donations sont censées constituer des avances sur l’héritage futur de l’héritier et non pas un avantage qui lui serait consenti au détriment des autres héritiers.En pratique, au décès du donateur, il convient de réintégrer la valeur des biens qui ont été ainsi donnés de son vivant dans la masse des biens à partager entre les héritiers. Et du coup, l’héritier concerné par le rapport des donations reçoit sa part d’héritage diminuée de la valeur du bien qu’il a déjà reçue.

Des fermages impayés par une fille à sa mère

Cette règle a été appliquée par les juges à des fermages impayés par une fille à sa mère. Dans cette affaire, une propriétaire de parcelles agricoles les avait données à bail rural à l’une de ses filles pour qu’elle les exploite. Or, pendant plusieurs années, cette dernière, avec l’accord de sa mère, avait cessé de payer les fermages. Après le décès de la propriétaire, l’autre fille de celle-ci avait, dans le cadre du règlement de la succession, demandé à sa sœur que le montant des fermages impayés soit réintégré dans la masse des biens à partager entre elles deux.Saisis du litige qui s’en est suivi, les juges lui ont donné gain de cause. En effet, pour eux, la renonciation de la mère à percevoir les fermages l’avait été dans une intention libérale de sorte qu’il s’agissait bien d’une donation (on parle de « libéralité ») consentie par cette dernière à sa fille, qui devait être rapportée à la succession.Cassation civile 1re, 21 septembre 2022, n° 20-22139

Article publié le 10 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : simon skafar

Travail de nuit : ne dépassez pas les limites !

Pour la Cour de cassation, le seul dépassement de la durée hebdomadaire maximale du travail de nuit ouvre droit à des dommages et intérêts pour le salarié.

Dans l’objectif de préserver leur santé et leur sécurité, les travailleurs de nuit ne peuvent pas, en principe, travailler plus de 8 heures par jour et plus de 40 heures par semaine calculées sur une période de 12 semaines consécutives. Un accord collectif pouvant toutefois venir fixer des durées maximales de travail plus élevées.Et attention, car le seul dépassement de la durée hebdomadaire maximale du travail de nuit peut ouvrir droit à des dommages et intérêts pour le salarié, comme vient de l’indiquer la Cour de cassation…Dans cette affaire, un salarié recruté en tant que chauffeur routier avait saisi la justice en vue d’obtenir des dommages et intérêts. Il affirmait, en effet, avoir dépassé la durée hebdomadaire maximale de travail applicable aux personnels roulants (autres que les chauffeurs grands routiers ou longue distance) dont l’activité s’exerce sur tout ou partie de la période nocturne, à savoir 46 heures par semaine calculées sur 12 semaines consécutives.Saisie du litige, la Cour d’appel de Paris avait rejeté sa demande. Et ce, notamment, parce qu’il ne justifiait pas avoir subi un préjudice du fait du dépassement de la durée maximale hebdomadaire de travail.Mais pour la Cour de cassation, en cas de litige en la matière, il appartient à l’employeur de prouver qu’il a bien respecté la durée hebdomadaire maximale de travail. Et dès lors que cette durée maximale est dépassée, le salarié peut prétendre à des dommages et intérêts sans avoir à prouver qu’il a subi un quelconque préjudice.L’affaire sera donc de nouveau examinée par les juges d’appel.


Précision : dans des affaires antérieures, la Cour de cassation avait déjà précisé que le seul dépassement de la durée maximale quotidienne (Cassation sociale, 11 mai 2023, n° 21-22281) ou hebdomadaire (Cassation sociale, 26 janvier 2022, n° 20-21636) de travail ouvrait droit à réparation pour le salarié.

Cassation sociale, 27 septembre 2023, n° 21-24782

Article publié le 10 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : Predrag Vuckovic

Résiliation d’un contrat de location par le jeu d’une clause résolutoire

Lorsqu’une clause résolutoire présente dans un contrat de location a produit ses effets avant que le locataire soit placé en redressement judiciaire, le loueur est parfaitement en droit d’obtenir la résiliation du bail en application de cette clause.

Souvent, les contrats de bail comportent une clause, dite « résolutoire », qui prévoit que le bail sera résilié de plein droit (c’est-à-dire automatiquement) en cas de manquement du locataire à certaines de ses obligations, en particulier en cas de défaut de paiement du loyer.


En pratique : pour mettre en œuvre une clause résolutoire, le bailleur doit d’abord délivrer un « commandement » au locataire par acte d’huissier de justice. Ce commandement doit mentionner le délai d’un mois dont dispose ce dernier pour remédier au(x) manquement(s) qui lui est(sont) reproché(s). Et si, à l’expiration de ce délai, le locataire ne s’est pas exécuté, le bail est résilié.

L’intérêt d’une clause résolutoire

Intérêt d’une clause résolutoire : dès lors qu’il constate un manquement du locataire à un engagement prévu par la clause, manquement qui a persisté un mois après une mise en demeure, le juge, saisi par le bailleur, doit prononcer la résiliation du bail, même si ce manquement est minime. Autrement dit, en présence d’une clause résolutoire, le juge ne dispose plus d’aucun pouvoir d’appréciation.Et la clause résolutoire est également utile au cas où le locataire serait placé en redressement ou en liquidation judiciaire. Mais à condition de la faire jouer avant qu’une telle procédure soit ouverte. Car une fois que la procédure de redressement ou de liquidation est ouverte, les créanciers ne peuvent plus engager contre l’entreprise qui en fait l’objet une action en justice pour obtenir la résiliation d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent (par exemple, un loyer).Ainsi, dans une affaire récente, un loueur de véhicules avait mis en demeure une société cliente de lui régler, sous 8 jours (en l’occurrence le 1er octobre 2019 au plus tard), 197 000 € d’arriérés de loyers, faute de quoi il ferait jouer la clause résolutoire prévue dans le contrat de location. Cette mise en demeure étant restée sans effet, le loueur avait obtenu du juge des référés une ordonnance constatant l’acquisition de la clause résolutoire et ordonnant la restitution des véhicules. Par la suite, cette ordonnance avait fait l’objet d’un appel tandis que la société locataire avait été mise en redressement judiciaire.Du coup, le loueur était-il encore en droit d’agir contre cette dernière ? La Cour de cassation a répondu par l’affirmative : un créancier peut très bien demander la résiliation d’un contrat de location en faisant jouer une clause résolutoire ayant produit ses effets avant le jugement d’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. Dans cette affaire, la clause résolutoire avait été acquise à l’issue du délai de 8 jours laissé à la société locataire pour payer les loyers (soit le 1er octobre 2019), donc avant le prononcé du jugement d’ouverture du redressement judiciaire le 26 décembre 2019. Le loueur de véhicules était donc en droit d’obtenir la résiliation du bail.Cassation commerciale, 13 septembre 2023, n° 22-12047

Article publié le 09 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : Ghislain & Marie David de Lossy

Versement mobilité : exonération des associations à caractère social

Les associations reconnues d’utilité publique à but non lucratif sont exonérées du paiement du versement mobilité à condition que leur activité présente un caractère social.

Les associations employant au moins 11 salariés et situées dans un périmètre où cette contribution a été instituée doivent payer, sur les rémunérations de leurs salariés, le versement mobilité. Toutefois, en sont exonérées les associations reconnues d’utilité publique à but non lucratif et dont l’activité est à caractère social.La notion « d’activité à caractère social » n’étant pas définie par la loi, ce sont les tribunaux qui en ont précisé les contours. Ainsi, pour la Cour de cassation, le caractère social de l’activité n’est pas déterminé par l’objet défini dans les statuts de l’association mais dépend des conditions dans lesquelles l’établissement associatif exerce ses activités.Sachant que les critères permettant de reconnaître le caractère social d’une activité sont notamment la gratuité ou le caractère modique de la participation financière demandée aux utilisateurs des services de l’association, le concours de bénévoles dans son fonctionnement, même limité aux seules tâches administratives, et le fait de ne pas être financé exclusivement par des subventions publiques.Dans une affaire récente, Île-de-France Mobilités avait refusé d’exonérer du versement mobilité une maison d’enfants gérée par une association reconnue d’utilité publique. Une décision que l’association avait contestée en justice.La cour d’appel avait constaté que l’association intervenait exclusivement dans le secteur social et médico-social et que la maison d’enfants avait « pour vocation de répondre à un besoin d’accompagnement de jeunes en grande difficulté sociale, dont les familles ne peuvent seules assumer l’éducation ». Dès lors, selon elle, cet établissement devait être exonéré du versement mobilité en raison du caractère social de son activité.Mais la Cour de cassation a annulé cet arrêt. En effet, pour reconnaître le caractère social de l’activité de l’établissement, la cour d’appel a tenu compte de l’objet statutaire de l’association. Or elle aurait dû analyser les conditions dans lesquelles l’établissement exerçait son activité. En conséquence, l’affaire sera rejugée par une autre cour d’appel.


En complément : la Cour de cassation a déjà reconnu le caractère social de l’activité d’une association dont l’objet essentiel est d’assurer, avec le concours de bénévoles, l’hébergement et le perfectionnement professionnel de jeunes ouvriers itinérants en échange d’une participation modique. De même pour une crèche gérée par des bénévoles qui accueille notamment des enfants issus de milieux défavorisés ou présentant des handicaps et qui demande aux parents le paiement d’une participation modique dont le montant varie selon leurs ressources et la composition des familles.

Cassation civile 2e, 6 avril 2023, n° 21-10518

Article publié le 09 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : © 2012 GC Photography

Licenciement et paternité : attention à la rédaction de la lettre de licenciement !

L’employeur qui licencie un salarié dans les 10 semaines suivant la naissance de son enfant doit mentionner dans sa lettre de licenciement l’existence d’une faute grave ou d’une impossibilité de maintenir son contrat de travail pour un motif étranger à l’arrivée de l’enfant.

Le Code du travail interdit à un employeur de rompre le contrat de travail d’un salarié pendant les 10 semaines suivant la naissance de son enfant. Il existe toutefois deux exceptions à cette interdiction : l’employeur peut licencier le salarié soit en cas de faute grave, soit en cas d’impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l’arrivée de l’enfant (inaptitude du salarié, licenciement pour motif économique…).Dans une affaire récente, un salarié avait été licencié « pour cause réelle et sérieuse » 2 semaines après la naissance de son enfant. Un licenciement qu’il avait contesté en justice.Devant les juges, son employeur invoquait le fait que, même si ce n’était pas précisé dans sa lettre de licenciement, le salarié avait été licencié en raison de l’impossibilité de maintenir son contrat de travail pour un motif étranger à l’arrivée de l’enfant, à savoir en raison de manquements professionnels incompatibles avec ses fonctions de responsable commercial.Saisie du litige, la Cour de cassation a estimé que le licenciement du salarié devait être annulé puisque sa lettre de licenciement ne mentionnait ni une faute grave ni l’impossibilité de maintenir son contrat de travail pour un motif étranger à l’arrivée de l’enfant.


Conséquence : l’employeur qui licencie un salarié pendant la période de protection suivant la naissance de son enfant ne doit pas oublier de faire état, dans la lettre de licenciement, de l’existence d’une faute grave ou d’une impossibilité de maintenir son contrat de travail pour un motif étranger à l’arrivée de l’enfant.

Cassation sociale, 27 septembre 2023, n° 21-22937

Article publié le 05 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : Halfpoint Images

Temps partiel thérapeutique : quel impact sur la participation ?

Pour calculer la prime de participation due aux salariés, les périodes de temps partiel thérapeutique doivent être assimilées à des périodes de présence dans l’entreprise.

Le dispositif de participation, qui permet d’associer les salariés aux résultats de l’entreprise, doit obligatoirement être instauré dans les structures employant au moins 50 personnes. Et ce, au moyen d’un accord collectif qui fixe, notamment, la formule de calcul de la réserve spéciale de participation ainsi que les modalités et plafonds de répartition de cette réserve entre les salariés. Cet accord peut prévoir que la réserve spéciale est répartie entre les salariés proportionnellement à leur durée de présence dans l’entreprise. À ce titre, le Code du travail indique que doivent être assimilées à des périodes de présence dans l’entreprise notamment les périodes de congés de maternité et de paternité et d’accueil de l’enfant ainsi que les arrêts de travail dus à un accident du travail ou une maladie professionnelle. Mais qu’en est-il des périodes de travail en temps partiel thérapeutique ?


Rappel : dans le cadre d’un temps partiel pour motif thérapeutique, le salarié travaille à temps partiel dans l’entreprise (mi-temps, deux tiers temps, quatre cinquièmes…) tout en continuant de percevoir des indemnités journalières de la Sécurité sociale.

Dans une affaire récente, une salariée avait, à la suite d’un arrêt de travail pour accident du travail, bénéficié d’une période de 6 mois en mi-temps thérapeutique. Plus tard, elle avait saisi la justice en vue d’obtenir le paiement par son employeur d’un complément de prime de participation. Et pour cause, sa prime avait été calculée en fonction des seules heures effectivement travaillées durant la période de mi-temps thérapeutique et de la rémunération qui y était associée. De son côté, l’employeur avait estimé que le Code du travail ne lui imposait pas de prendre en compte les heures non travaillées dans le cadre d’un mi-temps thérapeutique.Saisie du litige, la Cour de cassation a replacé le débat sur la base du principe de non-discrimination. Elle a, en effet, rappelé que les employeurs n’étaient pas autorisés à prendre des mesures fondées sur l’état de santé d’un salarié, notamment en matière de rémunération, d’intéressement ou de distribution d’actions. Elle en a déduit que le mi-temps thérapeutique de la salariée devait être assimilé à une période de présence dans l’entreprise et que le calcul de sa prime de participation devait donc prendre en compte le salaire perçu avant le mi-temps thérapeutique et l’arrêt de travail l’ayant, le cas échéant, précédé.Cassation sociale, 20 septembre 2023, n° 22-12293

Article publié le 04 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : Tetra Images

Congés payés : les arrêts de travail comptent !

Les arrêts de travail consécutifs à un accident du travail, un accident de trajet ou une maladie professionnelle ou à un accident ou une maladie non professionnelle doivent être pris en compte pour le calcul des droits à congés payés.

Les salariés bénéficient de 5 semaines de congés payés par an acquises au rythme de 2,5 jours ouvrables de congés par mois de travail effectif.Les salariés absents de l’entreprise continuent à acquérir des congés payés pendant ces absences si celles-ci sont assimilées à du temps de travail effectif par le Code du travail. À ce titre, doivent être pris en compte dans le calcul des droits à congés payés des salariés notamment les congés familiaux (congé d’adoption, de maternité…) et les congés payés de l’année précédente.En revanche, selon le Code du travail, les arrêts de travail causés par des accidents ou des maladies non professionnels ne constituent pas du temps de travail effectif. Ils ne permettent donc pas d’acquérir des congés payés. Quant aux arrêts de travail consécutifs à un accident du travail, un accident de trajet ou une maladie professionnelle, ils ne sont pris en compte que dans la limite d’un an.Depuis plusieurs années, les juges européens considèrent que ces dispositions du Code du travail empêchant les salariés d’acquérir des congés payés pendant leurs arrêts de travail sont contraires au droit européen.

Une mise en conformité avec le droit européen

La non-conformité des dispositions du Code du travail avec le droit européen a récemment conduit la Cour de cassation à ne plus les appliquer dans les litiges qu’elle traite.Dès lors, dans deux affaires récentes, la Cour de cassation a décidé que les salariés avaient acquis des congés payés pendant leur arrêt de travail. Une solution qu’elle a basée sur l’article 31, §2 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne qui garantit à tout travailleur une période annuelle de congés payés.Ainsi, désormais, la Cour de cassation assimile à du temps de travail effectif :
– les arrêts de travail causés par des accidents ou des maladies non professionnels ;
– les arrêts de travail consécutifs à un accident du travail, un accident de trajet ou une maladie professionnelle, sans limitation de durée.Autrement dit, les employeurs doivent tenir compte de ces arrêts de travail pour calculer les droits à congés payés de leurs salariés.


À noter : de nombreuses conventions collectives imposent déjà aux employeurs de prendre en compte les arrêts de travail de leurs salariés pour calculer leurs droits à congés payés.

Cassation sociale, 13 septembre 2023, n° 22-17340Cassation sociale, 13 septembre 2023, n° 22-17638

Article publié le 02 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : tolgart

Liquidation judiciaire d’une association et responsabilité du dirigeant bénévole

La responsabilité du dirigeant associatif peut être engagée lorsque ce dernier a commis une faute de gestion ayant contribué à l’insuffisance d’actif de l’association.

La liquidation judiciaire d’une association peut faire apparaître une insuffisance d’actif. Les liquidités de la structure ne permettant plus de rembourser ses dettes.Dans une telle situation, le dirigeant associatif qui a commis une faute de gestion ayant contribué à l’insuffisance d’actif peut être condamné en justice à supporter les dettes de l’association, en partie ou totalement, sur son patrimoine personnel.Ainsi, dans une affaire récente, une association gérant une école avait été mise en liquidation judiciaire. Son président, ainsi que le directeur pédagogique de l’école, reconnu comme dirigeant de fait de l’association, avaient alors été condamnés à payer plus de 180 000 € au titre de l’insuffisance d’actif constatée dans le cadre de cette liquidation. En effet, selon les juges, ces derniers avaient commis des fautes de gestion ayant contribué à cette insuffisance d’actif.Saisie de ce litige, la Cour d’appel de Versailles a annulé en partie cette condamnation.D’abord, elle a estimé que le directeur pédagogique de l’école, salarié de l’association, ne pouvait pas être considéré comme un dirigeant de fait, c’est-à-dire comme une personne exerçant en toute indépendance une activité positive de gestion ou de direction. Dès lors, ce dernier ne pouvait pas être condamné à rembourser les dettes de l’association.Ensuite, la cour d’appel a rappelé, d’une part, que la responsabilité d’un dirigeant associatif ne peut pas être engagée lorsqu’il a commis non pas une faute de gestion mais une simple négligence, et d’autre part, qu’en cas de liquidation judiciaire d’une association non assujettie à l’impôt sur les sociétés, l’existence d’une faute de gestion commise par un dirigeant associatif doit être appréciée au regard de sa qualité de bénévole.Au vu de ces principes, elle a considéré que le président de l’association avait commis une première faute de gestion, à savoir le non-paiement, pendant près d’un an et pour un montant de plus de 100 000 €, des cotisations sociales et des cotisations de retraite complémentaire dues sur les rémunérations des salariés. La persistance et le montant des cotisations impayées ne pouvant permettre de qualifier ce fait de simple négligence. Une seconde faute de gestion, qui ne pouvait pas non plus s’assimiler à une simple négligence, a été reprochée au président de l’association, soit la poursuite d’une activité déficitaire pendant 3 ans alors que la diminution des sources de financement s’aggravait et que les charges n’étaient pas suffisamment réduites.Pour la cour d’appel, ces deux fautes de gestion, qui ont conduit à une augmentation du passif, ont nécessairement contribué à une augmentation de l’insuffisance d’actif. Dès lors, la responsabilité du président de l’association devait être engagée. Pour autant, compte tenu de sa qualité de dirigeant bénévole, la cour d’appel a réduit le montant de sa condamnation à 15 000 €.Cour d’appel de Versailles, 16 mai 2023, n° 22/06770

Article publié le 02 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : elenaleonova