Exploitation en société de parcelles familiales : une simple déclaration ne suffit pas !

Lorsqu’un agriculteur envisage d’exploiter des terres agricoles appartenant à sa famille, il ne peut pas bénéficier du régime de la déclaration au titre du contrôle des structures lorsque cette exploitation a lieu dans un cadre sociétaire.

Lorsqu’une personne envisage d’exploiter un terrain agricole qui lui est donné, vendu ou loué par un parent ou par un allié jusqu’au 3e degré inclus, ou dont elle a hérité à la suite du décès de l’un d’eux, elle n’est pas tenue d’obtenir une autorisation administrative d’exploiter, bien que la surface totale qu’elle mettrait alors en valeur dépasserait le seuil fixé localement au titre du contrôle des structures. En effet, dans ce cas, elle doit simplement adresser une déclaration au préfet, à condition toutefois que le terrain considéré ait été détenu par ce parent ou par cet allié depuis au moins 9 ans. Toutefois, ce régime dérogatoire de la déclaration ne s’applique pas lorsque les parcelles concernées ont vocation à être exploitées en société. C’est ce que la Cour de cassation a décidé dans l’affaire récente suivante. Des terres agricoles avaient été reprises par leur propriétaire qui avait indiqué, dans le congé envoyé au locataire, qu’elles seraient exploitées, par son fils et par lui-même, dans le cadre d’une société (en l’occurrence, une EARL). Le locataire avait contesté le congé, faisant valoir que l’EARL devait disposer d’une autorisation administrative d’exploiter au titre du contrôle des structures. De son côté, le propriétaire rétorquait qu’une simple déclaration suffisait puisque les terres objet de la reprise, ayant vocation à être exploitées par une société constituée de lui-même et de son fils, restaient dans la famille. Mais la Cour de cassation n’a pas été de cet avis. En effet, elle a affirmé qu’une société, même composée de membres d’une même famille, ne peut pas bénéficier du régime dérogatoire de la déclaration au titre du contrôle des structures.

Cassation civile 3e, 29 juin 2023, n° 21-21584

Article publié le 31 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : Patrick Bennett

Rupture d’une relation commerciale établie : quand s’apprécie le préavis à respecter ?

Lorsqu’ils sont appelés à apprécier la durée du préavis à respecter en cas de rupture d’une relation commerciale établie, les juges doivent tenir compte de la durée de cette relation commerciale et des autres circonstances au moment de la notification de la rupture, mais pas d’éléments postérieurs à celle-ci.

Tout producteur, distributeur ou prestataire de services qui rompt brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie sans donner à son partenaire un préavis écrit d’une durée suffisamment longue engage sa responsabilité et peut donc être condamné à verser des dommages-intérêts à ce dernier.

Précision : la durée minimale du préavis doit être fixée au regard notamment de la durée de la relation commerciale, en référence aux usages du commerce ou, s’ils existent, aux accords interprofessionnels. Sachant que la responsabilité de l’auteur de la rupture ne peut pas être engagée pour cause de durée insuffisante dès lors qu’il a respecté un préavis de 18 mois.

À ce titre, lorsqu’ils sont appelés à apprécier la durée du préavis qui doit ou aurait dû être respecté en cas de rupture d’une relation commerciale établie, les tribunaux doivent prendre en compte la durée de cette relation commerciale et des autres circonstances au moment de la notification de la rupture, mais pas d’éléments postérieurs à celle-ci. Autrement dit, ils ne peuvent pas, par exemple, pour diminuer un délai de préavis, tenir compte du fait que l’entreprise victime de la rupture a rapidement rebondi après la rupture en trouvant de nouveaux marchés. C’est ce que la Cour de cassation a rappelé dans l’affaire récente suivante. Une société de transport express international, qui avait confié une partie de son marché à une autre entreprise de transport, avait résilié ce contrat lorsqu’elle avait été rachetée. S’estimant victime d’une rupture brutale d’une relation commerciale établie, cette dernière avait alors agi en justice contre la société. Saisie du litige, la cour d’appel avait apprécié la durée du préavis qui devait être respecté par la société de transport express en tenant compte du fait que l’entreprise victime de la rupture avait su se réorganiser après la rupture et trouver d’autres débouchés, qu’elle exerçait désormais son activité sous une autre enseigne et qu’elle avait passé des accords tarifaires « négociés » avec des transporteurs concurrents de la société de transport express. La Cour de cassation a censuré la cour d’appel car elle s’était fondée sur des éléments postérieurs à la notification de la rupture.

Cassation commerciale, 17 mai 2023, n° 21-24809

Article publié le 30 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : Unspecified

Dirigeants associatifs : affiliation au régime de Sécurité sociale

Les dirigeants rémunérés par une association dont la moyenne des ressources propres des trois derniers exercices dépasse 200 000 € par an sont assujettis au régime général de Sécurité sociale.

La gestion désintéressée d’une association est l’un des éléments permettant d’établir son absence de caractère lucratif et donc de l’exonérer des impôts commerciaux. Elle suppose notamment que ses dirigeants soient bénévoles. Cependant, par exception, ces derniers peuvent être payés sans remise en cause de la gestion désintéressée de l’association. Ainsi, une association peut rémunérer un dirigeant si la moyenne des ressources annuelles de ses trois derniers exercices, excluant celles provenant des personnes morales de droit public, dépasse 200 000 €, deux dirigeants quand elle excède 500 000 € et trois si elle est supérieure à 1 M€.

Attention : l’ensemble des rémunérations perçues par un dirigeant (y compris au sein d’un autre organisme sans but lucratif) ne doit pas excéder trois fois le plafond de la Sécurité sociale, soit, en 2023, 10 998 € par mois.

Une affiliation à la Sécurité sociale ?

Ces dirigeants rémunérés doivent-ils être affiliés au régime général de Sécurité sociale ? Autrement dit, l’association doit-elle verser des cotisations sociales sur ces rémunérations ? Oui, mais seulement si les conditions légales sont réunies, vient de rappeler la Cour de cassation. Dans une affaire récente, une association s’était vu notifier, à la suite d’un contrôle Urssaf, un redressement portant sur les cotisations sociales dues sur les indemnités versées à son président. La cour d’appel avait validé ce redressement après avoir constaté que sur la période contrôlée par l’Urssaf, les ressources propres de l’association dépassaient 200 000 €. Un raisonnement censuré par la Cour de cassation : en effet, la cour d’appel aurait dû s’assurer que l’association remplissait les conditions légales exigées pour qu’un dirigeant soit assujetti au régime de Sécurité sociale. Autrement dit, elle aurait dû vérifier que la moyenne des ressources annuelles de ses trois derniers exercices, excluant celles provenant des personnes morales de droit public, dépassait 200 000 €.

Cassation civile 2e, 11 mai 2023, n° 21-20902

Article publié le 30 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : Copyright by Franziska & Tom Werner

Quand la procédure de liquidation judiciaire d’une société est étendue à son dirigeant

En cas de relations financières anormales entre une société et son dirigeant, caractérisant une confusion de patrimoines entre eux, la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l’encontre de la société peut être étendue au dirigeant.

Lorsqu’il apparaît que le patrimoine d’une société et celui de son dirigeant ont été confondus, la procédure collective (sauvegarde, redressement ou liquidation judiciaire) dont la société fait l’objet peut être étendue à son dirigeant.

En pratique : la confusion des patrimoines est invoquée par le mandataire ou par le liquidateur judiciaire qui espère ainsi élargir ses chances de recouvrer les sommes qui sont dues aux créanciers. En effet, en cas d’extension de la procédure, les biens du dirigeant peuvent faire l’objet de mesures conservatoires, puis être vendus pour régler les créanciers de la société.

Des relations financières anormales

La confusion des patrimoines est retenue par les juges lorsqu’ils constatent l’existence de relations financières anormales entre la société et son dirigeant. Tel a été le cas dans l’affaire récente suivante. L’associé gérant d’une SARL avait procédé à son profit à des retraits en espèces et à des virements importants (88 000 €) depuis le compte bancaire de la société. Lorsque la SARL avait été placée en liquidation judiciaire, le liquidateur avait estimé que ces transferts d’argent étaient injustifiés et avait donc demandé que la procédure de liquidation judiciaire soit étendue à l’associé gérant. Pour sa défense, ce dernier avait fait valoir qu’il n’y avait rien eu d’anormal puisque que les sommes ainsi prélevées avaient été inscrites au débit de son compte courant d’associé et qu’elles constituaient donc une dette à l’égard de la société. Mais les juges n’ont pas été de cet avis. Pour eux, le seul fait que les sommes en question aient été inscrites sur le compte courant de l’associé gérant ne permettait pas d’exclure l’anormalité des virements et retraits opérés sans contrepartie par l’intéressé à son profit. La procédure de liquidation judiciaire ouverte à l’encontre de la société pouvait donc valablement être étendue au gérant.

Cassation commerciale, 13 septembre 2023, n° 21-21693

Article publié le 26 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : South_agency

Association : délégation du pouvoir de licencier les salariés

Le directeur général d’une association dispose de la compétence de licencier les salariés dès lors que le président lui a valablement délégué ce pouvoir.

Dans une association, le pouvoir de licencier les salariés appartient, dans le silence des statuts, à son président. Sauf interdiction prévue dans les statuts ou le règlement intérieur, le président peut déléguer ce pouvoir à un salarié de l’association (directeur général, responsable des ressources humaines, chef de service, responsable de la gestion du personnel, directeur d’établissement, etc.). Dans une affaire récente, un chef d’établissement avait contesté en justice son licenciement au motif que le directeur général qui l’avait prononcé n’en avait pas le pouvoir. Les statuts de l’association prévoyaient que son président pouvait, avec l’agrément du conseil d’administration, déléguer au directeur général l’administration des services et l’embauche du personnel. À ce titre, le conseil d’administration avait, à la demande de la présidente de l’association, voté la délégation, au directeur général, de l’administration et du fonctionnement de l’association en renvoyant, pour le contenu et les limites de cette délégation, à sa fiche de fonction. Une fiche selon laquelle le directeur général était « chargé avec le président du recrutement et du licenciement des chefs d’établissement ». Au vu de ses éléments, les juges ont estimé que la présidente de l’association avait valablement délégué le pouvoir de licencier les chefs d’établissement au directeur général. Ils en ont déduit que le licenciement prononcé par ce dernier était valable.

Précision : les juges ont estimé que même si les statuts mentionnaient uniquement la possibilité de déléguer l’embauche du personnel, le pouvoir de licencier pouvait être également délégué en application du principe du parallélisme des formes. Un principe selon lequel le pouvoir d’embaucher suppose aussi le pouvoir de licencier.

Cassation sociale, 14 juin 2023, n° 21-24162

Article publié le 23 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : SrdjanPav

Décès d’un associé de société civile : ses héritiers deviennent-ils associés ?

Lorsque les statuts d’une société civile prévoient qu’après le décès d’un associé, celle-ci continue avec ses héritiers, ces derniers ont, en leur qualité de propriétaire indivis des parts sociales dont ils ont hérité, la qualité d’associé, quand bien même n’ont-ils pas procédé au partage des parts.

Lorsque l’un des associés d’une société civile décède, celle-ci continue avec les héritiers de ce dernier, sauf si les statuts prévoient une autre règle, par exemple la dissolution de la société ou sa continuation avec les seuls associés survivants.

À noter : dans les sociétés commerciales de personnes (SARL, sociétés en nom collectif), les statuts doivent prévoir si, en cas de décès d’un associé, la société se poursuit avec les seuls associés survivants ou avec les héritiers de ce dernier, après, le cas échéant, avoir été agréés.

À ce titre, dans une affaire récente, les statuts d’une société civile, en l’occurrence un groupement foncier agricole, prévoyaient qu’en cas de décès d’un associé, la société continuerait entre les associés survivants et les héritiers de ce dernier, et ce sans qu’ils aient besoin d’être agréés. Après le décès d’un associé, l’un de ses héritiers (l’un de ses trois fils) avait demandé l’annulation d’une assemblée générale à laquelle il n’avait pas été convoqué. Il a obtenu gain de cause en justice. En effet, pour les juges, lorsque les statuts d’une société de personnes stipulent que la société continue avec les héritiers d’un associé décédé, ces derniers ont, en leur qualité de propriétaires indivis des parts sociales dont ils ont hérité, la qualité d’associé. Et ce, ont précisé les juges, même s’ils n’ont pas encore procédé au partage des parts sociales. Par conséquent, les héritiers de l’associé décédé disposaient du droit de participer aux décisions collectives, sous réserve d’être représentés, pour le vote de celles-ci, par un mandataire unique (l’un d’entre eux ou un associé, selon les statuts).

Cassation commerciale, 30 août 2023, n° 22-10018

Article publié le 23 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : Klaus Vedfelt

Exonération des plus-values pour départ à la retraite : attention aux conditions !

Pour bénéficier de l’exonération des plus-values professionnelles en cas de départ à la retraite, le cédant doit, notamment, cesser toute fonction dans l’entreprise cédée, y compris une activité salariée.

Sous certaines conditions, les plus-values professionnelles réalisées lors de la vente d’une PME relevant de l’impôt sur le revenu, quelle que soit la nature de l’activité (commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole), en raison du départ à la retraite de l’exploitant peuvent, sur option, être exonérées.

Précision : sont visées les entreprises de moins de 250 salariés, dont le chiffre d’affaires n’excède pas 50 M€ ou dont le total de bilan est inférieur à 43 M€, et dont le capital ou les droits de vote ne sont pas détenus à hauteur d’au moins 25 % par des entreprises ne remplissant pas les critères d’effectif, de chiffre d’affaires ou de total de bilan précités.

Pour bénéficier de l’exonération, le cédant doit notamment, dans les 2 ans suivant ou précédant la cession, cesser toute fonction dans l’entreprise individuelle cédée ou dans la société dont l’intégralité des parts sont cédées, qu’il s’agisse d’une fonction de direction ou d’une activité salariée, comme viennent de le rappeler les juges de la Cour administrative d’appel de Versailles. Il doit également faire valoir ses droits à la retraite dans ce même délai de 2 ans suivant ou précédant la cession. Dans cette affaire, une pharmacienne, gérante et associée unique de l’EURL exploitant la pharmacie, avait, en 2011, cédé ses parts à une autre EURL détenue par son fils. La plus-value réalisée à l’occasion de cette cession avait été exonérée d’impôt sur le revenu en application du régime de faveur prévu pour les cédants partant à la retraite. Mais, à l’issue d’un contrôle fiscal, l’administration avait remis en cause cette exonération au motif que la pharmacienne n’avait pas cessé son activité dans les 2 ans suivant la cession de ses parts. En effet, les juges ont relevé qu’elle avait souscrit des déclarations de revenus, au titre des années 2012 à 2015, mentionnant des salaires versés par la pharmacie cessionnaire, que des bulletins de salaires lui avaient été délivrés entre septembre 2012 et janvier 2015 et que les déclarations sociales de cette pharmacie l’indiquaient en qualité de salariée. Du fait de la poursuite d’une activité salariée au sein de la pharmacie de son fils pendant cette période, l’administration fiscale, puis les juges, ont estimé que l’intéressée n’avait pas cessé toute fonction au sein de l’entreprise cédée dans le délai imparti. En conséquence, elle ne remplissait pas les conditions pour bénéficier de l’exonération. Le redressement a donc été confirmé.

Cour administrative d’appel de Versailles, 23 mai 2023, n° 21VE00479

Article publié le 18 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : Luis Alvarez

Quand la décision de préemption d’une Safer n’est pas justifiée

La décision par laquelle une Safer exerce son droit de préemption sur un terrain agricole doit être justifiée. A défaut, elle est susceptible d’être annulée.

Lorsque la Safer exerce son droit de préemption, et donc qu’elle acquiert le bien agricole mis en vente en lieu et place de l’acquéreur initialement pressenti, elle doit justifier sa décision en faisant explicitement référence et de façon motivée à l’un ou à plusieurs des objectifs définis par la loi (installation ou maintien d’agriculteurs, consolidation d’une exploitation afin de lui permettre d’atteindre une dimension économique viable, sauvegarde du caractère familial d’une exploitation, lutte contre la spéculation foncière, etc.). Et attention, si tel n’est pas le cas, la décision de préemption encourt la nullité. Illustration avec l’affaire récente suivante. La vente d’une parcelle enclavée, située en bordure de mer, avait été prévue au profit d’une société ostréicole qui exploitait des parcelles contigües à celle-ci. Informée du projet, la Safer avait manifesté son intention d’exercer son droit de préemption sur cette parcelle. À l’appui de sa décision, elle avait fait valoir que plusieurs autres exploitants pouvaient être intéressés par cette parcelle et que le rétrocessionnaire potentiellement pressenti était spécialisé dans la production ostréicole.

Une motivation qui n’était pas réelle

Invoquant une motivation qui ne tenait pas la route, l’acquéreur évincé avait alors demandé en justice l’annulation de la décision de préemption. Et les juges lui ont donné gain de cause. En effet, ils ont estimé que la mention par la Safer, dans sa décision de préemption, de l’existence de plusieurs autres rétrocessionnaires potentiels était illusoire dans la mesure où, compte tenu de la configuration des lieux, seuls deux exploitants pouvaient être intéressés par l’acquisition de cette parcelle enclavée, à savoir l’acquéreur évincé et son seul concurrent local en la personne du rétrocessionnaire potentiellement pressenti. D’autre part, les juges ont constaté que la Safer avait faussement retenu, dans sa motivation, que ce rétrocessionnaire potentiel était spécialisé dans la production ostréicole alors qu’il ne disposait pas sur place de parc d’élevage. Les juges en ont déduit que la motivation développée par la Safer n’était pas réelle et ne visait qu’à dissimuler la perspective de privilégier un exploitant au détriment d’un autre. La décision de préemption a donc été annulée.

Cassation civile 3e, 7 septembre 2023, n° 21-21445

Article publié le 17 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : Andy Sacks

Bail de résidence de tourisme : peut-on le résilier tous les 3 ans ?

L’interdiction de résilier tous les 3 ans un bail commercial portant sur un logement situé dans une résidence de tourisme classée ne s’applique qu’au bail initial. Une fois le bail renouvelé, l’exploitant de la résidence retrouve la faculté de donner congé aux propriétaires à l’expiration de chaque période triennale.

En principe, le locataire titulaire d’un bail commercial a le droit d’y mettre fin tous les 3 ans. Toutefois, par exception, l’exploitant locataire d’une résidence de tourisme classée ne dispose pas de cette faculté. Les baux commerciaux conclus pour l’exploitation de tels biens ont donc nécessairement une durée de 9 ans minimum. Mais attention, cette interdiction légale de résilier tous les 3 ans le bail d’un logement situé dans une résidence de tourisme classée ne s’applique pas aux baux renouvelés. Autrement dit, une fois que le bail est renouvelé, l’exploitant locataire retrouve la faculté de donner congé aux propriétaires de la résidence à l’expiration de chaque période triennale. Cette précision vient d’être apportée par la Cour de cassation.

À noter : l’interdiction de résilier le bail de logement situé dans une résidence de tourisme tous les 3 ans a été édictée par la loi pour permettre aux propriétaires de ces locaux, souvent des particuliers qui ont investi, d’être assurés de louer leur bien pendant au moins 9 ans et de pouvoir ainsi bénéficier de la réduction d’impôt associée à ce type d’investissement. Rappelons, en effet, que le bénéfice de cette réduction d’impôt est subordonné au respect de l’engagement du propriétaire de louer son logement à l’exploitant de la résidence de tourisme pendant au moins 9 ans.

Cassation civile 3e, 7 septembre 2023, n° 21-14279

Article publié le 17 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : A. Martin UW Photography

Faits commis dans la vie personnelle du salarié et pouvoir de sanction de l’employeur

Des actes commis par un salarié dans le cadre de sa vie personnelle ne peuvent justifier un licenciement disciplinaire que s’ils se rattachent à sa vie professionnelle ou constituent un manquement aux obligations découlant de son contrat de travail.

Les employeurs peuvent infliger des sanctions disciplinaires (avertissement, mise à pied, licenciement…) aux salariés qui commettent des fautes à l’occasion de leur travail.En revanche, les agissements des salariés dans le cadre de leur vie personnelle ne peuvent pas être sanctionnés disciplinairement sauf si ces agissements se rattachent à leur vie professionnelle ou constituent un manquement aux obligations découlant de leur contrat de travail (obligation de loyauté, obligation de sécurité…).Dans une affaire récente, un mécanicien avait été licencié pour avoir commis quatre infractions au Code de la route sur le trajet entre son domicile et son lieu de travail. Son employeur, une entreprise spécialisée dans les infrastructures ferroviaires, avait en effet estimé que ces faits se rattachaient à sa vie professionnelle puisque le salarié conduisait un véhicule de fonction et se rendait à son travail.Un point de vue que les juges n’ont cependant pas partagé… Ainsi, ils ont considéré que ces infractions routières relevaient de la vie personnelle du salarié et ne pouvaient ni être rattachées à sa vie professionnelle, ni constituer un manquement aux obligations découlant de son contrat de travail. Dès lors, pour les juges, ces infractions ne pouvaient pas donner lieu à un licenciement disciplinaire.Pour en arriver à cette conclusion, les juges ont constaté que les infractions avaient été commises en dehors du temps de travail, qu’elles n’avaient pas eu de conséquences sur les obligations découlant de son contrat de travail en tant que mécanicien et que le véhicule de l’entreprise n’avait pas été endommagé.Cassation sociale, 4 octobre 2023, n° 21-25421

Article publié le 16 octobre 2023 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : ZU_09