Réservation d’hôtel non honorée : les sommes prélevées sont-elles soumises à la TVA ?

Le Conseil d’État a précisé que les sommes qu’un hôtelier est contractuellement en droit de conserver lorsqu’un client n’honore pas sa réservation constituent la contrepartie d’un service individualisable et sont donc soumises à la TVA.

Pour être imposées à la TVA, les indemnités doivent constituer la contrepartie d’un service individualisé rendu à celui qui les verse. À ce titre, le Conseil d’État a précisé que les sommes qu’un hôtelier est contractuellement en droit de débiter sur la carte bancaire donnée en garantie lorsqu’un client n’honore pas sa réservation constituent la contre-valeur de la prestation d’hébergement que le client s’était engagé à régler de manière ferme à la signature du contrat.

À noter : dans cette affaire, le montant susceptible d’être prélevé s’élevait au prix d’une nuitée lorsqu’il s’agissait d’un particulier et au prix de la totalité du séjour lorsqu’il s’agissait d’une entreprise.

En effet, dans ce cas, l’hôtelier réalise la prestation dès lors qu’il met le client en mesure d’en bénéficier, peu importe que ce dernier en fasse usage ou non. En conséquence, les sommes en cause constituent la contrepartie d’un service individualisable et sont donc soumises à la TVA.

Précision : les juges ont rappelé qu’il en va différemment lorsque les sommes conservées par le prestataire constituent des indemnités de résiliation ayant pour objet de réparer le préjudice subi à la suite de la défaillance du cat. Ces sommes n’ont alors pas à être soumises à la TVA dans la mesure où elles ne constituent pas la contrepartie d’un service.

Conseil d’État, 9 octobre 2024, n° 489947

Article publié le 12 décembre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : ljubaphoto / Getty images

Cession de droits sociaux : la garantie d’éviction due par le cédant est limitée

L’interdiction faite au cédant de droits sociaux, en vertu de la garantie d’éviction à laquelle il est tenu, de concurrencer la société dont il a cédé les titres est limitée dans le temps, au regard de l’activité et du marché concernés.

Le cédant de droits sociaux est tenu de garantir l’acquéreur de toute éviction qui serait de son fait, même si l’acte de cession ne le prévoit pas. Prévue par la loi, cette garantie interdit au cédant de commettre des actes qui seraient de nature à constituer des reprises ou des tentatives de reprise de la société vendue ou des atteintes à l’activité de la société telles qu’elles empêcheraient l’acquéreur de la poursuivre ou de réaliser l’objet social.

Rappel : le cédant de droits sociaux est également tenu de garantir l’acquéreur contre toute éviction émanant d’une tierce personne, sauf si une clause insérée dans l’acte de cession prévoit le contraire.

En vertu de cette garantie d’éviction, le cédant de droits sociaux s’interdit donc de se rétablir en concurrençant la société dont il a cédé les droits. Mais cette obligation est limitée dans le temps, au regard de l’activité et du marché concernés.

Un marché innovant et évolutif

Les juges ont réaffirmé cette règle dans l’affaire récente suivante. Quelque temps après avoir acquis les actions d’une société éditant des logiciels, son nouveau propriétaire avait agi en justice contre les cédants en invoquant la garantie d’éviction car il leur reprochait d’avoir créé une société dans le même domaine d’activité. Mais les juges ont estimé que ces derniers n’avaient pas méconnu leurs obligations résultant de la garantie d’éviction, et ce pour plusieurs raisons :
– la société concurrente avait été créée par l’un des cédants plus de trois ans après la cession, l’autre cédant l’ayant rejoint en tant que salarié plus de quatre ans après la cession ;
– la mise en ligne par la société concurrente de la première version d’un logiciel n’avait eu lieu que cinq ans après la cession ;
– la société dont les titres avaient été cédés intervenait sur un marché, en l’occurrence celui du développement des produits informatiques et des prestations de services correspondantes, où l’innovation technologique est rapide. Pour les juges, interdire pendant plusieurs années aux cédants d’une société œuvrant sur un tel marché innovant et évolutif de créer une société dans le même secteur serait disproportionné par rapport à la protection des intérêts de l’acquéreur.

Cassation commerciale, 6 novembre 2024, n° 23-11008

Article publié le 10 décembre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : Prapass Pulsub / Getty Images

Obligation de conseil du vendeur professionnel : à lui de prouver qu’il l’a bien remplie !

Le vendeur professionnel doit prouver qu’il a bien satisfait, lors de la vente, à son obligation de conseil à l’égard de l’acheteur.

Le vendeur professionnel est tenu à une obligation d’information et de conseil à l’égard de ses clients. Cette obligation lui impose notamment de se renseigner, avant la vente, sur les besoins de l’acheteur et de l’informer de l’aptitude ou de l’adéquation du bien proposé à l’utilisation qui en est prévue.

Précision : cette obligation d’information et de conseil pèse sur le vendeur lorsque l’acheteur est un profane, c’est-à-dire une personne qui ne dispose pas de la compétence lui permettant de juger par elle-même de la portée exacte des caractéristiques techniques du bien vendu et de son adaptation à l’usage auquel il est destiné. Cette personne peut donc être un particulier, mais aussi, le cas échéant, un professionnel.

En cas de litige, il appartient au vendeur de prouver qu’il a bien rempli son obligation de conseil lors de la vente. Ce principe a été rappelé par les juges dans l’affaire récente suivante. Un hôtel-bar-restaurant situé en bord de mer avait acheté du mobilier, notamment des parasols, pour sa terrasse extérieure. Ce mobilier s’étant rapidement dégradé, l’exploitant de l’hôtel avait agi en justice contre le vendeur pour obtenir l’annulation de la vente. La cour d’appel avait rejeté la demande de l’acheteur au motif que le vendeur soutenait l’avoir avisé oralement, lors de la vente, de la nécessité d’entretenir le matériel livré compte tenu de sa future exposition aux embruns. Cette affirmation étant d’ailleurs étayée par un constat d’huissier, établi quelques années après la vente, selon lequel l’exploitant de l’hôtel indiquait qu’il appliquait sur les parasols, toutes les semaines en saison, un produit spécifique ainsi qu’une graisse synthétique afin de les entretenir. En outre, la cour d’appel avait constaté qu’une nouvelle information sur ce point avait été donnée à l’acquéreur, par écrit, par le biais d’une mention figurant sur une facture émise postérieurement à la vente.

La preuve d’une information donnée au moment de la vente

Mais saisie à son tour, la Cour de cassation a censuré la décision de la cour d’appel. Pour elle, il incombe au vendeur professionnel de prouver qu’il s’est acquitté de l’obligation de conseil qui lui impose de se renseigner sur les besoins de l’acheteur afin d’être en mesure de l’informer quant à l’adéquation de la chose proposée à l’utilisation qui en est prévue. À ses yeux, les motifs relevés par la cour d’appel n’étaient pas suffisants pour établir que le vendeur avait rempli cette obligation au moment de la vente.

Cassation commerciale, 16 octobre 2024, n° 23-15992

Article publié le 06 décembre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : FG Trade Latin / Getty images

Rupture conventionnelle : convention modifiée = nouveau délai !

L’employeur qui modifie une convention de rupture conventionnelle après un refus d’homologation de l’administration doit respecter un nouveau délai de rétractation de 15 jours.

L’employeur et le salarié qui concluent une rupture conventionnelle doivent, avant d’adresser la convention de rupture à l’administration pour homologation, respecter un délai de rétractation de 15 jours calendaires. Un délai durant lequel chaque partie peut renoncer à la rupture conventionnelle. Et attention, comme vient de le rappeler la Cour de cassation, en cas de refus d’homologation de la convention de rupture conventionnelle, la nouvelle demande d’homologation transmise à l’administration implique une nouvelle procédure et donc un nouveau délai de rétractation…Dans cette affaire, un salarié avait signé avec son employeur une convention de rupture dont l’homologation avait été refusée par l’administration. L’employeur avait alors rectifié la convention en augmentant le montant de l’indemnité due au salarié (d’environ 60 €) et en décalant d’un jour la date de la rupture du contrat de travail. Des modifications qui avaient suffi à l’administration pour homologuer la rupture conventionnelle. Quelques jours après la rupture de son contrat de travail, le salarié avait saisi la justice afin d’obtenir, en particulier, la nullité de la rupture conventionnelle. Et pour cause, il reprochait à son employeur de ne pas l’avoir informé des modifications apportées à la convention de rupture et de ne pas avoir bénéficié d’un nouveau délai de rétractation de 15 jours. Saisie du litige, la Cour d’appel de Lyon n’avait pas fait droit aux demandes du salarié. Pour elle, les changements intervenus dans la convention n’étaient pas de nature à remettre en cause le consentement du salarié à la rupture conventionnelle. Ils ne pouvaient donc pas, à eux seuls, entraîner la nullité de la rupture. Mais pour la Cour de cassation, les modifications apportées par l’employeur, sans information du salarié et sans application d’un nouveau délai de rétractation de 15 jours, entraînent la nullité de la rupture conventionnelle.

À savoir : en cas de nullité de la rupture conventionnelle, la rupture du contrat de travail est requalifiée par les juges en licenciement sans cause réelle et sérieuse et donne lieu au paiement de dommages-intérêts au salarié.

Cassation sociale, 16 octobre 2024, n° 23-15752

Article publié le 05 décembre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : AzmanL / Getty images

Insuffisance d’actif : quelles dettes peuvent être mises à la charge du dirigeant fautif ?

Dans le cadre d’une action en responsabilité contre le dirigeant d’une société en liquidation judiciaire qui a commis une faute de gestion ayant contribué à l’insuffisance d’actif, seules les dettes nées avant le jugement d’ouverture peuvent être prises en compte.

Lorsqu’une société est mise en liquidation judiciaire, la responsabilité de son dirigeant peut être recherchée lorsqu’il a commis une faute de gestion ayant contribué à son insuffisance d’actif (c’est-à-dire quand l’actif de la société ne suffit pas à régler ses créanciers). Au terme de cette action, dite « en comblement de passif », le dirigeant peut alors être condamné à payer sur ses deniers personnels tout ou partie des dettes de la société. Sachant que seules les dettes nées avant le jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire peuvent être prises en compte pour déterminer l’insuffisance d’actif. Les dettes qui naissent après le jugement n’ont donc pas à entrer dans le passif pris en compte pour calculer le montant de l’insuffisance d’actif. C’est ce que les juges ont rappelé récemment pour des sommes correspondant aux frais de recouvrement de comptes clients et de ventes aux enchères, ces frais étant nécessairement postérieurs au jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire et ne pouvaient donc pas être pris en compte pour le calcul de l’insuffisance d’actif.

Rappel : une simple négligence ne peut pas être retenue à l’encontre d’un dirigeant pour mettre en jeu sa responsabilité et lui faire payer personnellement une partie des dettes de la société.

Cassation commerciale, 23 octobre 2024, n° 23-15365

Article publié le 29 novembre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : opolja / Getty Images

Échange de parcelles agricoles : les droits du locataire

En cas d’échange de parcelles agricoles, leurs propriétaires respectifs ne peuvent pas imposer à l’exploitant locataire de l’une des parcelles concernées de demeurer sur la parcelle d’origine

En cas d’échange de parcelles agricoles, l’exploitant locataire de l’une de ces parcelles a le droit de demander le report de son bail sur la parcelle attribuée à son bailleur en échange de celle que ce dernier a apportée à l’autre propriétaire. Cette règle s’applique en cas d’échange opéré tant dans le cadre d’une procédure d’aménagement foncier agricole et forestier qu’à l’amiable.

Précision : le locataire doit exprimer sa volonté de voir son bail reporté sur la parcelle reçue en échange par son bailleur dans un « délai raisonnable ». Et en cas de refus du report, le bail est automatiquement résilié.

Posé par la loi, ce principe a été appliqué par les juges dans une affaire où les deux propriétaires respectifs des deux parcelles agricoles échangées à l’amiable, dont l’une était louée, avaient convenu que le bail du locataire continuerait sur la parcelle d’origine. Mécontent de cet arrangement, ce dernier avait demandé en justice que son bail soit reporté sur la parcelle attribuée à son bailleur. Il a obtenu gain de cause, les juges ayant affirmé qu’il était fondé à exiger que son bail se poursuive sur la parcelle reçue en échange par son bailleur dans la mesure où l’échange ainsi intervenu lui imposait une substitution de bailleur à laquelle il n’avait pas consenti. Il convient d’en déduire que les propriétaires qui procèdent à un échange n’ont pas le pouvoir d’écarter l’application de cette règle légale, sauf accord du locataire.

Cassation civile 3e, 27 juin 2024, n° 22-23803

Article publié le 26 novembre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : © Thomas Winz 2018

Adoption des décisions collectives dans les SAS : à quelle majorité ?

Dans les sociétés par actions simplifiées, une décision collective d’associés ne peut être valablement adoptée que si elle réunit au moins la majorité des voix exprimées. Les statuts ne peuvent donc pas prévoir que les décisions collectives soient adoptées par un vote minoritaire.

Dans les sociétés par actions simplifiées (SAS), les statuts déterminent les décisions qui doivent être prises collectivement par les associés dans les formes et conditions qu’ils prévoient. Sachant que la loi impose que certaines décisions, comme l’augmentation du capital, soient prises collectivement par les associés dans les conditions prévues par les statuts. Mais les statuts peuvent-ils prévoir que les décisions collectives puissent être adoptées par une minorité d’associés ? À cette question, la Cour de cassation a répondu récemment par la négative. Dans cette affaire, les statuts d’une SAS prévoyaient que « les décisions collectives des associés sont adoptées à la majorité du tiers des droits de vote des associés présents ou représentés ». Lors d’une assemblée générale, les associés avaient voté pour une augmentation de capital réservée au président, les votes « pour » ayant représenté 46 % des droits de vote (229 313 voix) et les votes « contre » 54 % (269 185 voix). Les votes « pour » étaient donc supérieurs au tiers requis mais inférieurs aux votes « contre ». Du coup, certains associés avaient demandé en justice l’annulation de cette décision.

La majorité des voix exprimées

Saisie du litige, la Cour de cassation leur a donné satisfaction et a donc annulé la décision en affirmant, d’une part, « qu’une décision collective d’associés, prévue par les statuts ou imposée par la loi, ne peut être tenue pour adoptée que si elle rassemble en sa faveur le plus grand nombre de voix », d’autre part, que « toute autre règle conduirait à considérer que la collectivité des associés peut adopter, lors d’un même scrutin, deux décisions contraires », et enfin, que « la liberté contractuelle qui régit la SAS ne peut s’exercer que dans le respect de principe ». Il en résulte que, dans les SAS, une décision collective des associés ne peut valablement être adoptée que si elle réunit au moins la majorité des voix exprimées, toute clause des statuts prévoyant le contraire étant considérée comme inexistante.

Précision : la nécessité d’une majorité des voix exprimées s’applique tant aux décisions collectives des associés qui relèvent de leur compétence obligatoire en vertu de la loi que de celles que les statuts leur attribuent.

Cassation assemblée plénière, 15 novembre 2024, n° 23-16670

Article publié le 26 novembre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : Sam Edwards / Getty Images

CDD : quelle durée pour la période d’essai ?

Un contrat à durée déterminée ne peut pas prévoir une période d’essai supérieure aux durées maximales prévues par le Code du travail.

Selon le Code du travail, un contrat de travail à durée déterminée (CDD) peut comporter une période d’essai dont la durée, calculée à raison d’un jour par semaine, ne doit pas dépasser :
– 2 semaines lorsque la durée du CDD est de 6 mois maximum ;
– un mois pour les CDD de plus de 6 mois.

Rappel : durant la période d’essai, chaque partie peut mettre fin à la relation de travail sans motif, sans indemnité mais en respectant un délai de prévenance.

Un CDD peut prévoir une durée de période d’essai plus courte que celle prévue par le Code du travail. Mais pas une durée plus longue, comme vient de le rappeler la Cour de cassation. Dans cette affaire, un directeur de projets avait été recruté dans le cadre d’un CDD de 6 mois avec une période d’essai d’un mois. L’employeur avait mis fin au contrat au bout de 17 jours. Le salarié avait alors contesté en justice la rupture de son contrat de travail. Et la Cour de cassation lui a donné gain de cause. En effet, le CDD ne pouvait pas fixer une période d’essai d’une durée supérieure à la durée maximale légale, soit à 2 semaines pour un contrat de 6 mois. La notification de la rupture du CDD intervenue au bout de 17 jours s’analysait donc comme une rupture anticipée du contrat, et non comme une rupture de la période d’essai, ouvrant droit pour le salarié au paiement de dommages-intérêts.

Cassation sociale, 18 septembre 2024, n° 23-14779

Article publié le 21 novembre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : SrdjanPavlovic@

Obligation pour une association de s’inscrire comme représentant d’intérêts

Une société s’estimant lésée par une réforme législative ne peut pas porter plainte avec constitution de partie civile contre une association qui, sans s’être déclarée comme représentant d’intérêts, aurait mené des actions de lobbying en ce sens.

Les associations dont l’activité consiste, de façon principale ou régulière, à entrer en communication, à leur initiative, avec des responsables publics, nationaux ou locaux, afin d’influer sur des décisions publiques en projet ou en vigueur sont des représentants d’intérêts qui doivent s’inscrire sur le répertoire numérique géré par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Un répertoire destiné à informer les citoyens sur les relations entre les représentants d’intérêts et les responsables publics. Et, tous les ans, les associations inscrites sur ce répertoire doivent déclarer les actions de représentation d’intérêts conduites l’année précédente, ainsi que les moyens alloués à ces actions.


À savoir : le non-respect de ces dispositions est passible d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.

Dans une affaire récente, une société gérant un enclos cynégétique avait porté plainte avec constitution de partie civile contre une association qu’elle considérait être un représentant d’intérêts au motif que celle-ci n’avait pas communiqué les informations obligatoires à la HATVP. Elle estimait que l’association avait mené des actions d’influence lui ayant porté préjudice en remettant en cause la chasse en enclos.

Une constitution de partie civile irrecevable

Mais, pour la Cour de cassation, cette plainte était irrecevable puisque la constitution de partie civile, qui permet à la victime d’une infraction d’obtenir réparation pour le préjudice subi, est recevable seulement si ce préjudice a une relation directe avec l’infraction.Or, le préjudice invoqué par la société n’était pas direct « puisqu’il ne résultait en aucune façon du manquement déclaratif de l’association auprès de la HATVP ». De plus, la réforme du Code de l’environnement, dont la société se plaignait, ne pouvait, en elle-même, entraîner un préjudice, celui-ci étant, de toute manière, totalement indirect par rapport à l’infraction commise par l’association. Enfin, la société invoquait aussi comme préjudice le fait d’avoir été la cible nommément désignée de fausses informations propagées par l’association dans le cadre de ses activités de lobbying auprès des médias et des responsables publics. Or, pour les juges, cet éventuel préjudice était sans lien avec l’infraction en litige.Cassation criminelle, 1er octobre 2024, n° 24-80087

Article publié le 20 novembre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : LightFieldStudios / Getty Images

Quand le salarié refuse une modification de ses conditions de travail

Le salarié qui refuse un simple changement de ses conditions de travail peut être licencié pour faute. Et s’il refuse également d’exécuter son préavis aux nouvelles conditions de travail imposées par son employeur, il est alors privé de l’indemnité compensatrice correspondante.

En raison de son pouvoir de direction, l’employeur est en droit de modifier les conditions de travail de ses salariés sans obtenir leur accord préalable. Et en cas de refus d’exécuter son contrat aux nouvelles conditions de travail imposées par son employeur, le salarié peut être licencié. Mais qu’en est-il alors du délai de préavis ?

Attention : avant toute modification du contrat de travail du salarié (rémunération, qualification…), l’employeur doit obtenir l’accord de celui-ci. Le refus du salarié de voir son contrat modifié ne pouvant pas donner lieu à une sanction disciplinaire.

Dans une affaire récente, un salarié engagé par une association en tant que médecin psychiatre s’était vu informé par son employeur d’un changement de ses conditions de travail. Concrètement, le médecin devait se rendre au sein d’une autre antenne de l’association, à raison d’un jour par semaine et une semaine sur deux. Les deux sites de travail étant distants de 17 kilomètres. Malgré un temps de travail et une rémunération inchangés, le salarié avait refusé les nouvelles conditions de travail qui lui avaient été imposées. Son employeur l’avait alors licencié pour faute. Toutefois, le salarié avait contesté son licenciement en justice, estimant que son contrat de travail, et non pas seulement ses conditions de travail, avait été modifié. À ce titre, il réclamait notamment à son employeur le paiement d’une indemnité compensatrice pour le délai de préavis non effectué. Saisie de l’affaire, la Cour d’appel de Versailles avait confirmé que la nouvelle affectation du salarié constituait bien un simple changement de ses conditions de travail, et non une modification de son contrat de travail. Et que le refus du salarié de se conformer à ses nouvelles conditions justifiait son licenciement. Reprenant la même argumentation, la Cour de cassation a, en outre, indiqué que l’employeur pouvait imposer à son salarié d’effectuer son préavis de licenciement selon les nouvelles conditions de travail. Aussi, le salarié, en refusant de se plier à celles-ci, était à l’origine de l’inexécution du préavis. Il était donc privé du paiement de l’indemnité compensatrice correspondante.

Cassation sociale, 23 octobre 2024, n° 22-22917

Article publié le 20 novembre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : PixeloneStocker / Getty images