Attention à l’acceptation de vos CGV par vos clients !

Pour que les conditions générales de vente d’une entreprise soient opposables à ses clients, ces derniers doivent les avoir connues et acceptées.

Une entreprise ne peut invoquer et faire respecter l’application de ses conditions générales de vente (CGV) par un client que si ce client les a acceptées. En cas de litige avec un client en la matière, l’entreprise doit donc être en mesure de prouver non seulement que ses CGV ont été portées à sa connaissance, mais également qu’il en a accepté le contenu. Elle doit donc recueillir clairement l’accord du client sur ses CGV avant qu’il ne passe commande. Ainsi, dans une affaire récente, les juges ont estimé qu’un distributeur ne pouvait pas opposer ses CGV à un supermarché dès lors que l’exploitant de celui-ci ne les avaient pas connues ni acceptées. En effet, ils ont constaté, d’une part, que le contrat d’approvisionnement conclu entre ce dernier et le distributeur ne renvoyait pas aux CGV ; d’autre part, que la preuve de l’acceptation expresse des CGV par l’exploitant du supermarché n’était par rapportée dans la mesure où elles étaient illisibles car figurant en caractères minuscules au dos des factures émises par le distributeur ; et enfin qu’il était impossible de considérer que l’exploitant les avaient tacitement acceptées malgré les relations d’affaires suivies avec le distributeur puisqu’il contestait les livraisons dont le règlement lui était réclamé par ce dernier.

Cassation commerciale, 16 mars 2022, n° 20-22269

Article publié le 03 août 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Produits en plastique à usage unique : attention sanction !

À compter du 1 janvier 2023, un certain nombre d’interdictions relatives à la mise sur le marché ou à l’utilisation de produits en plastique à usage unique seront assorties de sanctions pénales.

À compter du 1er janvier 2023, un certain nombre de pratiques, interdites par la loi, relatives à la mise sur le marché ou à l’utilisation de produits en plastique à usage unique seront sanctionnées par une amende pénale.

Pratiques sanctionnées par une amende de 450 € maximum

Ainsi, à compter du 1er janvier 2023, encourra une amende pouvant aller jusqu’à 450 € : l’exploitant d’un établissement recevant du public ou le responsable d’un local professionnel qui distribuera gratuitement des bouteilles en plastique contenant des boissons (sauf exceptions liées, par exemple, à un impératif de santé publique) ; le producteur, l’importateur ou le distributeur qui mettra sur le marché certains produits à usage unique composés de plastique, à savoir des serviettes hygiéniques, des lingettes pré-imbibées, des cigarettes et filtres à cigarettes, des gobelets et verres pour boissons ; le vendeur de boissons à emporter qui n’adoptera pas une tarification plus basse lorsque la boisson sera vendue dans un récipient réemployable présenté par le consommateur par rapport au prix demandé lorsque la boisson est servie dans un gobelet jetable.

Pratiques sanctionnées par une amende de 1 500 € maximum

À compter du 1er janvier 2023, tout producteur, importateur ou distributeur qui ne respectera pas l’interdiction de mise sur le marché ou de mise à disposition de certains produits en plastique à usage unique encourra une amende pouvant aller jusqu’à 1 500 €. Les produits concernés sont les suivants : les gobelets, verres et assiettes jetables de cuisine pour la table ; les pailles (à l’exception de celles destinées à être utilisées à des fins médicales) ; les confettis en plastique ; les piques à steak ; les couvercles à verre jetables ; les assiettes autres que celles jetables de cuisine pour la table (y compris celles comportant un film plastique) ; les couverts (sauf dans certains lieux comme les établissements de santé ou les avions et les trains) ; les bâtonnets mélangeurs (touillettes) pour boissons ; les contenants ou récipients en polystyrène expansé destinés à la consommation sur place ou à emporter ; les bouteilles en polystyrène expansé pour boissons ; les tiges de support pour ballons et leurs mécanismes (à l’exception des tiges et mécanismes destinés aux usages et applications industriels ou professionnels et non destinés à être distribués aux consommateurs) ; les bâtonnets ouatés à usage domestique ; les emballages ou les sacs fabriqués, en tout ou partie, à partir de plastique oxodégradable ; les produits fabriqués à base de plastique oxodégradable. La même sanction sera encourue par : le producteur, l’importateur ou le distributeur qui méconnaîtra l’interdiction de mise sur le marché de sachets de thé et de tisane en plastique non biodégradable ; l’exploitant d’un établissement recevant plus de 300 personnes qui ne mettra pas de fontaine d’eau potable à disposition du public ; l’exploitant d’un service de restauration à domicile qui utilisera de la vaisselle, des couverts ou des récipients de transport des aliments ou boissons qui ne seront pas réemployables ou qui ne procèdera pas à leur collecte en vue de leur réemploi ; la personne ayant une activité de restauration sur place qui servira des repas ou des boissons dans de la vaisselle, ou avec des couverts, qui ne seront pas réemployables.

Décret n° 2022-507 du 8 avril 2022, JO du 9

Article publié le 27 juillet 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Garantie légale de conformité étendue au numérique : du nouveau !

À compter du 1er octobre 2022, les vendeurs de produits contenant des éléments numériques et les fournisseurs de services numériques devront intégrer des mentions relatives à la garantie légale de conformité applicable à ces produits ou à ces services dans leurs conditions générales de vente.

Depuis le 1er janvier 2022, la garantie légale de conformité est étendue à la vente de biens comportant des éléments numériques (smartphone, produit connecté…) ainsi qu’à la fourniture de contenus et de services numériques comme, par exemple, un abonnement à une plate-forme de vidéos ou de musique à la demande ou l’achat d’un jeu vidéo en ligne.

Rappel : les commerçants sont tenus de garantir les consommateurs contre les défauts de conformité des biens qu’ils leur vendent. Cette garantie s’applique dans toutes les situations où le produit vendu n’est pas conforme à l’usage habituellement attendu d’un bien semblable, ne correspond pas à la description donnée par le vendeur ou ne possède pas les qualités annoncées par ce dernier. Grâce à cette garantie, lorsqu’un défaut apparaît dans les 2 ans après la vente, l’acheteur est en droit de demander au vendeur de réparer ou de remplacer, sans frais, le produit ou le service acheté.

De nouvelles mentions dans les CGV

À ce titre, à compter du 1er octobre 2022, les professionnels qui vendent des produits contenant des éléments numériques ou qui fournissent des contenus ou des services numériques devront intégrer des mentions supplémentaires dans l’encadré qui doit déjà figurer dans leurs conditions générales de vente et qui est destiné à informer le consommateur de l’existence de la garantie légale de conformité et de la garantie légale des vices cachés. Ces nouvelles mentions devront comporter : l’indication de la durée de la garantie lorsque le produit vendu comporte des éléments numériques ; le bénéfice de la garantie légale de conformité et de la garantie légale des vices cachés, le délai pour agir et les différentes options offertes au consommateur en cas de fourniture de services numériques ; l’obligation du professionnel de fournir toutes les mises à jour nécessaires au maintien de la conformité du bien ou du contenu numérique ; les sanctions applicables en cas de manquement du vendeur.

En pratique : un modèle de ces différents encadrés (encadré relatif à la vente de biens contenant des éléments numériques, encadré relatif à la fourniture d’un service numérique de façon ponctuelle et encadré relatif à la fourniture d’un service numérique de façon continue) est proposé en annexe du décret du 29 juin 2022.

Décret n° 2022-946 du 29 juin 2022, JO du 30

Article publié le 20 juillet 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Commerces fermés en raison du Covid : les loyers sont dus !

La mesure d’interdiction de recevoir du public, prise par les pouvoirs publics pour lutter contre l’épidémie de Covid-19, ne constitue pas un motif permettant aux commerçants concernés d’être dispensés du paiement de leurs loyers.

Pour lutter contre la propagation de l’épidémie de Covid-19, de nombreux commerces ont fait l’objet d’une mesure d’interdiction de recevoir du public, notamment lors du premier confinement au printemps 2020. Dans ce contexte, la question s’est posée de savoir si les commerçants concernés pouvaient échapper au paiement des loyers dus au titre des périodes de fermeture. Certains d’entre eux ont d’ailleurs cessé de payer leurs loyers. De nombreuses actions en justice ont alors été engagées en la matière, mais elles ont donné lieu à des décisions divergentes de la part des tribunaux et cours d’appel. Par une décision très attendue, la Cour de cassation vient de mettre fin aux débats. Pour elle, aucun des arguments avancés par les locataires (force majeure, perte du local loué, manquement du bailleur à son obligation de délivrance) ne justifie un refus de paiement des loyers. Les bailleurs sont donc en droit de réclamer aux locataires le paiement des loyers dus pendant les périodes de fermeture imposées par les pouvoirs publics.

Pas un cas de force majeure

La Cour de cassation a d’abord rejeté l’argument fondé sur la force majeure. Rappelons qu’il y a force majeure lorsqu’un événement qui échappe au contrôle du débiteur, qui ne pouvait pas être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent pas être évités par des mesures appropriées, l’empêche d’exécuter son obligation. Or ici, le locataire concerné n’était pas empêché de payer son loyer mais d’utiliser le local loué. Et les juges ont rappelé que la partie à un contrat qui n’a pas pu profiter de la contrepartie à laquelle elle avait droit (en l’occurrence l’exploitation du local) ne peut pas obtenir l’anéantissement du contrat en invoquant cet évènement.

Pas de perte du local loué

L’argument fondé sur la perte du local loué n’a pas davantage trouvé grâce aux yeux de la Cour de cassation. Rappelons que si, pendant la durée du bail, le bien loué est détruit en totalité par un cas fortuit, le bail est résilié de plein droit et que s’il n’est détruit qu’en partie, le locataire peut demander une diminution du loyer voire la résiliation du bail. Les juges ont considéré que l’interdiction de recevoir du public était une mesure administrative générale et temporaire, prise pour lutter contre la propagation du virus et aux seules fins de garantir la santé publique, qu’elle était sans lien direct avec la destination contractuelle du local loué, et qu’elle ne pouvait donc pas être assimilée à la perte du local.

Pas de manquement du bailleur à son obligation de délivrance

Enfin, la Cour de cassation n’a pas non plus retenu un manquement du bailleur à son obligation de délivrance. Rappelons, là aussi, que le bailleur a l’obligation de délivrer le local loué à son locataire et de lui en garantir la jouissance paisible. Et que si cette obligation n’est pas remplie, le locataire est en droit de s’en prévaloir pour refuser de payer les loyers dont il est redevable. Mais pour les juges, la mesure d’interdiction de recevoir du public résulte du seul fait des pouvoirs publics et ne peut donc être imputable au bailleur si bien qu’il ne peut lui être reproché d’avoir manqué à son obligation de délivrance, ce dernier ayant bien mis les locaux loués à la disposition de son locataire.

Cassation civile 3e, 30 juin 2022, n° 21-19889Cassation civile 3e, 30 juin 2022, n° 21-20127Cassation civile 3e, 30 juin 2022, n° 21-20190

Article publié le 13 juillet 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Assurance récolte : les taux de subventions sont inchangés pour 2022

Les taux de prise en charge par l’État des cotisations dues par les exploitants agricoles qui souscrivent un contrat d’assurance récolte contre les risques climatiques sont maintenus pour 2022.

Afin d’encourager les exploitants agricoles à souscrire une assurance récolte contre les risques climatiques, les pouvoirs publics leur accordent des subventions destinées à les aider à financer les cotisations ou primes d’assurance correspondantes. Pour l’année 2022, les taux de prise en charge par l’État de ces primes d’assurance sont maintenus au même niveau qu’en 2021. Ainsi, le taux de subvention s’élève à 65 % des primes d’assurance dues au titre du premier niveau de garantie (niveau socle) ainsi que pour les contrats par groupe de culture « prairies » et à 45 % pour celles dues au titre du deuxième niveau (garanties complémentaires optionnelles).

Rappel : trois niveaux de garanties sont proposés aux agriculteurs dans le cadre d’une assurance récolte : un contrat socle, qui prévoit un seuil de déclenchement de l’indemnisation à partir de 30 % de pertes de récolte et une franchise de 20 %, de 25 % ou de 30 % selon le type de contrat (contrat par groupe de cultures, contrats « prairies » ou contrats à l’exploitation) ; des garanties complémentaires optionnelles (augmentation du capital assuré, diminution de la franchise, indemnisation des pertes de qualité…) qui peuvent être subventionnées ; des garanties complémentaires optionnelles supérieures (diminution du seuil de déclenchement, franchise moins élevée…) qui ne sont pas subventionnées.

En pratique, la demande d’aide à l’assurance récolte devait être souscrite, sur le site Telepac, en même temps que la télédéclaration du dossier Pac, soit le 16 mai 2022 au plus tard, en ayant coché la case « Aide à l’assurance récolte ». Ensuite, pour bénéficier de l’aide, l’exploitant devra avoir payé la totalité de la prime ou cotisation d’assurance afférente à son contrat au plus tard le 31 octobre 2022. Puis, il devra transmettre à l’administration (direction départementale des territoires), le 30 novembre 2022 au plus tard, le formulaire de déclaration de contrat qui lui sera adressé par son entreprise d’assurance après le règlement de la prime d’assurance.

Pour en savoir plus, consultez la notice d’information sur l’aide à l’assurance récolte 2022.Arrêté du 17 juin 2022, JO du 21

Article publié le 12 juillet 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Action d’une association en réparation d’un préjudice commis à l’étranger

Les associations françaises peuvent agir en référé devant les tribunaux français pour conserver ou établir, avant tout procès, la preuve de faits dommageables survenus à l’étranger et imputables à une société française.

Les associations qui veulent agir en justice contre une société française qui a causé des dommages, notamment environnementaux, à l’étranger doivent-elles agir devant les tribunaux français ou les tribunaux étrangers pour obtenir des preuves de ces faits ?Dans une affaire récente, deux associations françaises de protection de l’environnement souhaitaient poursuivre en justice une compagnie pétrolière et gazière française en raison de dommages causés à l’environnement en République démocratique du Congo. Dans cette optique, elles avaient engagé une action en référé devant le tribunal de Paris afin d’obtenir la désignation d’un huissier de justice pour qu’il procède à des constatations dans les locaux de cette société situés en France en vue d’établir la preuve de faits pouvant engager sa responsabilité. Cette action étant basée sur l’article 145 du Code de procédure civile selon lequel « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé ».Le juge des référés et la cour d’appel avaient estimé que cette demande des associations était irrecevable au motif qu’elles ne justifiaient pas que la loi congolaise leur donnerait qualité pour agir au fond au titre des dommages environnementaux survenus en République démocratique du Congo. Saisi de ce litige, la Cour de cassation n’a pas validé cette solution. En effet, elle a estimé que la qualité à agir d’une association pour la défense d’un intérêt collectif en vue d’obtenir une mesure d’instruction sur le fondement de l’article 145 du Code de procédure civile ne devait pas s’apprécier au regard de la loi étrangère applicable à l’action au fond, en l’occurrence celle de la République démocratique du Congo. Ainsi, pour la Cour de cassation, la qualité à agir des associations doit s’apprécier selon la loi du tribunal saisi (donc la loi française) en ce qui concerne les conditions d’exercice de l’action en référé basée sur l’article 145 du Code de procédure civile et selon la loi des associations (donc la loi française) en ce qui concerne leur capacité à agir en justice (capacité limitée à leur objet). Cette solution de la Cour de cassation facilite l’accès aux preuves pour les associations françaises qui souhaitent intenter une action en justice en raison d’un préjudice, qu’il soit environnemental ou d’une autre nature, survenu dans un pays étranger et commis par une société française.

Cassation civile 1re, 9 mars 2022, n° 20-22444

Article publié le 11 juillet 2022 – © Les Echos Publishing 2022

La rupture brutale d’une relation commerciale établie

Une entreprise qui rompt brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie sans donner un préavis écrit d’une durée tenant compte de celle de la relation commerciale engage sa responsabilité et s’oblige à réparer le préjudice qu’elle cause à la victime de la rupture. Explications.

Le champ d’application de la réglementation

Le contentieux de la rupture de relation commerciale établie est très abondant. En effet, le champ d’application de l’article du Code de commerce (art. L. 442-1-II) qui pose la règle applicable en la matière est très large, tant au niveau des personnes concernées que de la notion de relation commerciale établie. L’auteur de la rupture peut être un producteur, un industriel, un distributeur, un commerçant ou un artisan. Ne sont pas visées, en revanche, les personnes morales relevant du droit civil ou du droit public et donc, notamment, les sociétés civiles immobilières (SCI), les collectivités territoriales ou encore les personnes physiques n’exerçant pas une profession commerciale ou artisanale, tels que, par exemple, les professionnels libéraux.

À noter : ces catégories de personnes peuvent tout de même voir leur responsabilité engagée au titre d’une rupture brutale de relation dont elles seraient les auteurs. Simplement, cette responsabilité ne sera pas assise sur le dispositif spécifique de l’article L. 442-1-II du Code de commerce, mais sur le droit commun de la responsabilité civile (contractuelle ou extracontractuelle selon les cas).

Quant au champ des victimes susceptibles d’être concernées, il est encore plus large, les tribunaux considérant que le statut juridique de la victime de la rupture brutale est, en principe, indifférent. Ainsi, une association, une SCI ou un professionnel libéral peuvent, en invoquant les dispositions de l’article L. 442-1-II, solliciter la réparation du préjudice que leur cause la rupture brutale d’une relation commerciale établie. La Cour de cassation a eu l’occasion cependant de préciser que le dispositif de l’article L. 442-1-II du Code de commerce ne pouvait être invoqué par les agents commerciaux dès lors que cette catégorie professionnelle bénéficiait d’un cadre légal spécifique. La victime peut aussi être une victime par ricochet : par exemple, un sous-traitant touché par la rupture brutale des relations commerciales subie par son donneur d’ordre. Sont concernées toutes les relations commerciales, qu’elles portent sur la fourniture d’un produit ou d’une prestation de services. Et peu importe la forme de cette relation, notamment qu’elle repose ou non sur un contrat. La notion de relation commerciale dépasse en effet celle de relation contractuelle. Un simple courant d’affaires non formalisé peut donc constituer une relation commerciale établie. A fortiori, l’existence d’une relation commerciale établie peut résulter d’une succession, sur plusieurs années, de contrats à durée déterminée (même de courte durée) ou d’un enchaînement, entre deux mêmes partenaires, de contrats de nature juridique différente avec des conditions différentes. Sachant que pour être qualifiée de relation commerciale établie, la relation doit être régulière, significative et stable. Il faut que la continuité des relations d’affaires précédemment entretenues ait pu raisonnablement autoriser la victime de la rupture à considérer que ces relations allaient se poursuivre avec la même stabilité dans le futur. Si la relation doit être significative, il n’est pas exigé, en revanche, qu’elle se caractérise par un important volume d’affaires.

Le caractère brutal de la rupture

L’entreprise victime de la rupture peut mettre en cause la responsabilité de son partenaire commercial lorsque cette rupture a été « brutale ». La rupture de la relation commerciale peut bien sûr résulter de la résiliation unilatérale d’un contrat à durée indéterminée ou déterminée mais aussi du non-renouvellement d’un contrat à durée déterminée arrivé à son terme si, du moins, le renouvellement était envisageable. Tel n’est pas le cas lorsque le contrat excluait toute reconduction. La rupture peut également se déduire de la modification par l’un des partenaires des conditions de la relation commerciale, si toutefois cette modification est substantielle. Tel est le cas par exemple : d’une diminution significative de la marge accordée jusque-là à un grossiste ; de l’augmentation par un fournisseur de ses tarifs et de ses conditions de règlement ; d’une baisse significative du volume des commandes. La rupture peut être totale ou partielle. Constitue, par exemple, une rupture partielle des relations commerciales le déréférencement par un distributeur de certains des produits dont il s’approvisionnait auprès d’un fournisseur ou encore une baisse significative du volume de commandes ou du chiffre d’affaires. Pour que la rupture soit qualifiée de « brutale », il faut qu’elle ait été précédée d’un préavis d’une durée insuffisante. À ce titre, l’article L. 442-1-II du Code de commerce n’impose aucun formalisme particulier pour le préavis. Notamment, il n’est pas exigé que le préavis soit notifié par un courrier recommandé avec demande d’avis de réception. Il suffit qu’il y ait un écrit qui peut être un simple e-mail. Il n’est pas non plus exigé un écrit notifiant spécifiquement le préavis. Ainsi, par exemple, les tribunaux ont pu considérer que l’annonce de nouveaux tarifs ou de conditions de vente substantiellement modifiées, l’émission d’un appel d’offres ou encore l’annonce de la création d’une filiale ayant pour activité celle du partenaire valait notification du préavis. Quant à la durée de préavis, elle doit tenir compte de la durée de la relation commerciale.

Précision : le cas échéant, cette durée doit également respecter la durée minimale de préavis déterminée en référence aux usages du commerce ou par des accords interprofessionnels.

En pratique, la juste durée du préavis est appréciée au cas par cas par le juge. L’article L. 442-1-II du Code de commerce ne pose qu’un seul critère d’appréciation du caractère raisonnable du préavis : celui de l’ancienneté de la relation. Cependant, en pratique, les tribunaux ont également tendance à tenir compte de la nature de la relation commerciale. Notamment, un rapport de dépendance économique entre les partenaires ou une obligation d’exclusivité peuvent justifier un préavis plus long. Ceci explique qu’en la matière, il soit difficile de dégager des solutions générales.

Important : en toute hypothèse, la responsabilité de l’auteur de la rupture ne peut pas être engagée du chef d’une durée insuffisante dès lors qu’il a respecté un préavis de dix-huit mois au moins.

L’indemnisation du préjudice causé par la rupture brutale

L’auteur d’une rupture brutale d’une relation commerciale établie doit réparer le préjudice causé par la rupture brutale.

À noter : par exception à la règle posée par l’article L. 442-1-II du Code de commerce, la rupture brutale n’engage pas la responsabilité de son auteur si elle se justifie par la faute grave de celui qui subit la rupture ou par un cas de force majeure.

Ce préjudice est d’abord celui de la marge qui n’a pas pu être réalisée par l’entreprise victime pendant la durée du préavis qui aurait dû lui être accordé. C’est la marge brute qui est le plus souvent retenue mais une indemnisation sur la base de la marge nette a parfois été accordée. En revanche, l’indemnité demandée ne peut correspondre à la perte de chiffre d’affaires. Il incombe à la victime de la rupture de justifier du montant des dommages et intérêts qu’elle réclame. En pratique, le chiffrage du préjudice est souvent confié – et c’est d’ailleurs recommandé – à un cabinet d’expertise comptable qui est, dans ce cadre, chargé d’établir un rapport permettant de justifier du montant des dommages et intérêts réclamés. Outre la perte de marge, la victime de la rupture brutale peut également solliciter des dommages et intérêts pour : le préjudice moral ou la perte d’image causés par la brutalité de la rupture ; les charges de restructuration – et en particulier le coût des licenciements – générées par la brutalité de la rupture. Et attention, pour être indemnisable, le préjudice doit être causé par la brutalité de la rupture et non juste par la rupture elle-même. Ainsi, notamment, pour être indemnisée du coût des licenciements économiques qu’elle a dû engager, la victime de la rupture ne peut se contenter de dire que ces licenciements sont la conséquence de la rupture de la relation commerciale ; elle doit démontrer en quoi ceux-ci sont dus au caractère brutal de la rupture. Outre les sanctions sollicitées par la victime de la rupture, l’auteur de la rupture peut également se voir condamner notamment à une amende civile, à la demande du ministère de l’Économie ou du ministère public.

Article publié le 08 juillet 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Le bail commercial de courte durée

Lorsqu’il est conclu pour une durée inférieure ou égale à 3 ans, un bail portant sur un local à usage commercial peut échapper au statut des baux commerciaux.

Durée : 01 mn 53 s

Article publié le 08 juillet 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Entreprises grandes consommatrices d’énergie : vous pouvez demander une aide

Depuis le 4 juillet dernier, les entreprises dont les dépenses de gaz et d’électricité représentent une part élevée de leurs charges peuvent demander une aide financière.

Dans le cadre du plan de résilience économique et sociale instauré par les pouvoirs publics, les entreprises grandes consommatrices de gaz et d’électricité, qui sont donc très impactées par la hausse des prix de l’énergie provoquée par la guerre en Ukraine, peuvent bénéficier d’une aide financière de l’État. Annoncée il y a quelques mois, cette aide peut être demandée depuis le 4 juillet dernier. Rappel des conditions requises et de la démarche à suivre pour pouvoir y prétendre.

Les entreprises éligibles

Ouverte à tous les secteurs d’activité, l’aide s’adresse aux entreprises dont les achats de gaz et/ou d’électricité atteignaient au moins 3  % de leur chiffre d’affaires en 2021 et qui ont subi un doublement du prix d’achat d’électricité et/ou de gaz sur la période allant du 1er mars au 31 août 2022 par rapport à une moyenne de prix sur l’année 2021. Elle a vocation à compenser une partie des surcoûts éligibles.

Le montant de l’aide

Selon les cas, l’aide s’élève à : 30 % des coûts éligibles, plafonnée à 2 M€, pour les entreprises subissant une baisse d’excédent brut d’exploitation (EBE) de 30 % par rapport à 2021 ou ayant subi des pertes d’exploitation ; 50 % des coûts éligibles, plafonnée à 25 M€, pour les entreprises dont l’EBE est négatif et dont le montant des pertes est au plus égal à deux fois les coûts éligibles. L’aide étant limitée à 80 % du montant des pertes ; 70 % des coûts éligibles, plafonnée à 50 M€, pour les entreprises qui respectent les critères ci-dessus et qui exercent leur activité principale dans l’un des secteurs les plus exposés à la concurrence internationale (secteurs listés en annexe du décret du 1er juillet 2022). L’aide étant également limitée à 80 % du montant des pertes. Les critères d’éligibilité liés aux dépenses de gaz et d’électricité, à l’EBE et aux coûts éligibles doivent être vérifiés et calculés par l’expert-comptable ou le commissaire aux comptes de l’entreprise.

Précision : s’agissant des entreprises qui font partie d’un groupe, le montant des plafonds d’aide indiqués ci-dessus est évalué à l’échelle du groupe.

La demande pour obtenir l’aide

Le dispositif est ouvert depuis le 4 juillet dernier. Les entreprises concernées peuvent donc demander l’aide au titre de la première période éligible trimestrielle, à savoir mars-avril-mai, à compter de cette date et pendant un délai de 45 jours, soit jusqu’au 17 août inclus. En pratique, les demandes, accompagnées d’un certain nombre de pièces justificatives (déclaration sur l’honneur de l’entreprise, attestation de l’expert-comptable ou du commissaire aux comptes, factures d’énergie, fiches de calcul de l’EBE et de l’aide, RIB), doivent être déposées via l’espace professionnel de l’entreprise sur le site www.impots.gouv.fr. La procédure de dépôt des demandes au titre de la seconde période éligible (juin-juillet-août) sera, quant à elle, ouverte à compter du 15 septembre 2022 pour une durée de 45 jours.

Décret n° 2022-967 du 1er juillet 2022, JO du 2

Article publié le 07 juillet 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Résiliation d’un bail rural pour cause d’arrachage d’une haie

L’exploitant locataire qui a arraché une haie bordant une parcelle louée et retourné une autre parcelle encourt la résiliation de son bail rural pour avoir commis des agissements de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds loué.

L’exploitant locataire qui commet des agissements de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds loué encourt la résiliation de son bail rural. À ce titre, dans une affaire récente, les juges ont considéré que l’arrachage par le locataire – plus exactement par l’exploitant avait lequel il avait procédé à un échange de parcelles – d’une haie vive bordant une parcelle louée et le retournement par ce dernier d’une pâture mise à sa disposition constituaient des agissements ayant compromis la bonne exploitation du fonds « tel qu’il avait été loué ». En effet, ils ont constaté que la disparition de la haie compromettait le maintien de la faune présente sur le site et que le retournement de la pâture ouvrait potentiellement la voie à des inondations plus fréquentes.

Rappel : le locataire répond personnellement des travaux réalisés par son co-échangiste à l’égard du bailleur.

Des raisons environnementales

Il résulte de cette décision de justice que la résiliation d’un bail rural peut désormais être prononcée pour des raisons environnementales, et non plus seulement culturales comme c’était le cas jusqu’alors (même si les juges avaient déjà amorcé cette tendance). Du coup, les agriculteurs ont tout intérêt à éviter de procéder à une quelconque modification du fonds loué, quand bien même cette modification serait propice à une meilleure exploitation. En l’occurrence, l’arrachage d’une haie entre deux parcelles cultivées par le même agriculteur est, en principe, de nature à faciliter leur exploitation et n’est donc pas économiquement préjudiciable pour le fonds loué…

Cassation civile 3e, 17 novembre 2021, n° 20-10934

Article publié le 05 juillet 2022 – © Les Echos Publishing 2022