Conséquences de l’accord d’un époux au cautionnement souscrit par son conjoint

Mon épouse a donné son accord exprès au cautionnement que j’ai souscrit au profit de la banque en contrepartie de l’octroi d’un crédit pour mon entreprise. Quelles sont les conséquences patrimoniales de ce consentement ?

Lorsqu’une personne mariée sous le régime de la communauté souscrit un cautionnement, seuls ses biens propres et ses revenus sont engagés dans l’opération. Mais si son conjoint donne son consentement exprès au cautionnement – les banques le demandent très souvent –, par exemple en inscrivant et en signant dans l’acte la mention « bon pour consentement aux engagements ci-dessus », les biens communs des époux seront alors également engagés et pourront donc servir de gage au banquier en cas de défaut de paiement des échéances du prêt. En revanche, les biens propres du conjoint resteront à l’abri des poursuites de ce dernier.

Article publié le 27 décembre 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Faillite d’un client : comment réagir ?

Lorsque l’un de vos clients dépose son bilan en laissant des factures impayées, vous devez accomplir un certain nombre de démarches pour espérer être payé un jour… Zoom sur la marche à suivre en la matière.

Déclarez votre créance

Lorsque vous apprenez qu’un de vos clients fait l’objet d’une procédure de sauvegarde ou est placé en redressement ou en liquidation judiciaire, la première chose à faire est de déclarer la ou les créances que vous détenez sur lui auprès du mandataire judiciaire (en cas de sauvegarde ou de redressement) ou du liquidateur judiciaire (en cas de liquidation).

À noter : en principe, lorsqu’une entreprise fait l’objet d’une procédure collective, le mandataire ou le liquidateur judiciaire nommé par le tribunal en informe les créanciers dont il a connaissance. Sachant que si vous êtes titulaire d’une sûreté publiée (une hypothèque, par exemple) ou si vous êtes lié au débiteur par un contrat publié (un crédit-bail…), vous serez personnellement averti, par lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR), par le mandataire judiciaire chargé de la procédure (ou le liquidateur). Vous pouvez aussi apprendre l’existence de la procédure collective en consultant le bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (Bodacc) ou un journal d’annonces légales. Vous connaîtrez alors le nom et les coordonnées du mandataire ou du liquidateur judiciaire en charge du dossier.

Et attention, cette déclaration doit être effectuée dans un délai de 2 mois à compter de la publication au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (Bodacc) de l’avis faisant état de l’ouverture de la procédure collective, soit par vous-même (en tant que chef d’entreprise ou représentant légal de la société), soit par l’un de vos salariés ou par un mandataire (par exemple, un avocat) muni d’une délégation de pouvoir lui permettant d’accomplir cette formalité. Si vous êtes titulaire d’une sûreté publiée ou si vous êtes lié au débiteur par un contrat publié, les 2 mois se décomptent à partir de l’avis que le mandataire judiciaire vous a adressé. Faute de déclaration dans ce délai, votre créance ne sera pas prise en compte dans la procédure. Sauf à demander au juge-commissaire d’être « relevé de forclusion » en déposant une requête au greffe du tribunal de commerce et en démontrant que le retard (ou le défaut) de déclaration n’est pas de votre fait (par exemple, parce qu’il est dû à une omission du débiteur lors de l’établissement de la liste de ses créanciers).En pratique, la déclaration doit indiquer le montant de votre créance due au jour du jugement d’ouverture de la procédure avec l’indication des sommes exigibles et de la date de leur échéance. Lorsque le montant n’a pas encore été fixé, fournissez-en une évaluation. Vous n’oublierez pas d’y joindre les documents justificatifs (factures, bons de commande). Si la créance est assortie d’un privilège ou d’une sûreté, vous devez en préciser la nature. Enfin, indiquez les modalités de calcul des intérêts dont le cours n’est pas arrêté, ainsi que la juridiction saisie si la créance fait l’objet d’un litige. Et pour des raisons évidentes de preuve, il est conseillé d’adresser votre déclaration de créance par lettre recommandée avec avis de réception.

Bon à savoir : pour faciliter l’établissement de cette déclaration, un formulaire (Cerfa n° 10021*01) peut être téléchargé sur le site Internet Service Public.

Une fois votre déclaration souscrite, votre créance fera l’objet d’une vérification par le mandataire judiciaire s’il s’agit d’une procédure de redressement judiciaire, ou par le liquidateur judiciaire s’il s’agit d’une procédure de liquidation. Si elle est admise, elle pourra vous être payée mais seulement si l’actif disponible de votre débiteur le permet et ce, après que les créances prioritaires ou « privilégiées » (salaires, frais de justice, Trésor public, Urssaf, créances nécessaires à la poursuite de l’activité…) auront été réglées. Ainsi, faute d’être un créancier privilégié, vous aurez malheureusement peu de chances d’être remboursé…

Faites valoir vos garanties

Vous le voyez : déclarer votre créance ne vous garantit donc pas de la recouvrer. Mieux vaut donc détenir un privilège ou une « sûreté » sur cette créance et le faire valoir. Ainsi, par exemple, si vous avez pris soin d’insérer une clause de réserve de propriété dans le contrat de vente des produits restés impayés, vous pourrez demander à les récupérer en exerçant votre « droit à revendication ». En effet, une telle clause vous permet de rester propriétaire des biens livrés tant que votre client n’en a pas entièrement payé le prix. Mais attention, il vous faut impérativement agir auprès de l’administrateur judiciaire (ou du chef d’entreprise lui-même en l’absence d’administrateur) dans les 3 mois suivant la publication au Bodacc du jugement d’ouverture de ladite procédure, en lui adressant une lettre recommandée avec AR. Passé ce délai, le vendeur ne pourra plus faire valoir son droit de revendication. L’administrateur ou le liquidateur pourra alors vendre le bien au même titre que les autres biens appartenant au débiteur.

Précision : l’action en revendication ne peut être exercée que si la clause de réserve de propriété a été convenue entre l’acheteur et le vendeur par écrit, au plus tard au moment de la livraison des biens vendus à l’acquéreur. En outre, pour que l’action en revendication soit possible, il faut que les marchandises impayées existent en nature au moment de l’ouverture de la procédure collective, c’est-à-dire qu’elles soient identifiables et individualisées entre les mains de l’acheteur. Ainsi, l’exercice de l’action en revendication est impossible lorsque le bien vendu a été transformé par l’acheteur ou assemblé avec d’autres biens.

Si vous bénéficiez d’un cautionnement, vous pourrez réclamer à la caution le paiement de votre facture impayée. Sachant que si la caution est une personne physique, vous devrez attendre le prononcé du jugement arrêtant le plan de redressement ou de cession ou le jugement prononçant la liquidation de votre débiteur pour pouvoir agir contre elle. Enfin, si vous détenez un gage, vous aurez le droit d’être payé en priorité par rapport à tout autre créancier sur le bien objet du gage.

Préoccupez-vous du sort du contrat conclu avec votre débiteur

Si le contrat que vous avez conclu avec l’entreprise en difficulté est en cours au moment de l’ouverture de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, sachez qu’il n’est pas automatiquement rompu du fait de l’ouverture de cette procédure. Du coup, vous avez intérêt à mettre en demeure l’administrateur judiciaire ou, en l’absence d’administrateur, le chef de l’entreprise en difficulté lui-même, de se positionner sur la continuité ou, au contraire, sur la cessation du contrat. Si vous ne recevez pas de réponse dans le délai d’un mois qui suit cette mise en demeure, le contrat sera résilié de plein droit. En revanche, lorsque l’administrateur judiciaire (ou le débiteur) décide de poursuivre le contrat, notamment parce qu’il est essentiel à la poursuite de l’activité, les créances nées de cette continuation seront privilégiées et devront être honorées dans les conditions prévues. Si tel n’est pas le cas, le contrat sera résilié de plein droit.

Article publié le 09 septembre 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Les effets du consentement d’un époux au cautionnement souscrit par son conjoint

Le consentement donné par un époux au cautionnement souscrit par son conjoint a pour effet d’engager les biens communs du couple mais pas de rendre cet époux partie au contrat de cautionnement.

Lorsqu’une personne mariée sous le régime légal de la communauté souscrit un cautionnement, par exemple un dirigeant de société en contrepartie de l’octroi d’un prêt pour celle-ci, les biens communs du couple ne sont engagés que si son conjoint a donné son consentement à l’acte. Sinon, seuls les biens propres et les revenus de celui qui s’est porté caution peuvent servir de gage au banquier en cas de défaut de paiement.

Précision : les biens propres du conjoint qui a donné son consentement au cautionnement souscrit par son époux restent, quant à eux, à l’abri des poursuites du banquier.

Mais attention, ce n’est pas parce que le conjoint donne son consentement au cautionnement qu’il devient lui-même caution. C’est ce que les juges ont rappelé dans une affaire récente. Dans cette affaire, une société ayant été placée en liquidation judiciaire, la banque avait agi en paiement à la fois contre le mari qui s’était porté caution pour cette société et contre son épouse qui avait donné son consentement au cautionnement souscrit par ce dernier. La banque espérait ainsi obtenir la condamnation solidaire des deux époux à lui payer certaines sommes. Mais pour les juges, la banque n’était pas en droit agir contre l’épouse car cette dernière ne s’était pas elle-même portée caution.

Cassation commerciale, 21 avril 2022, n° 20-15807

Article publié le 30 août 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Fin d’un engagement de caution souscrit par un dirigeant de société

Il y a quelques années, je me suis porté caution d’un prêt souscrit par la société dont je suis gérant associé. Je m’apprête aujourd’hui à quitter cette société. Ce départ entraînera-t-il automatiquement la fin de mon engagement de caution ?

Non. La cessation de ses fonctions ne libère pas le dirigeant de son engagement de caution, sauf s’il a été expressément stipulé dans l’acte que le cautionnement était lié à sa qualité de dirigeant et qu’il cesserait de plein droit en cas de perte de cette qualité. En l’absence d’une telle mention, le dirigeant peut toutefois, lorsqu’il cesse d’exercer ses fonctions, résilier son engagement de caution, à condition qu’il ait été souscrit pour une durée indéterminée, en le faisant expressément savoir au banquier. Mais tant qu’il ne résilie pas le contrat, il continue d’être tenu des dettes de la société garanties par le cautionnement !

Article publié le 23 août 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Prescription de l’action contre un emprunteur : et la caution ?

Lorsque l’action d’une banque contre un emprunteur est prescrite, elle est également prescrite contre la caution.

L’action d’une banque contre un emprunteur qui n’a pas payé ses échéances de prêt se prescrit dans un délai de 2 ans. Et dans ce cas, l’action engagée contre la personne qui s’est portée caution est prescrite également. C’est, en tout cas, ce que prévoit la loi (plus exactement une ordonnance du 15 septembre 2021) pour les cautionnements souscrits depuis le 1er janvier 2022. Les juges viennent d’étendre cette mesure de protection aux cautionnements souscrits avant le 1er janvier 2022.Dans cette affaire, une banque avait agi en justice contre un couple d’emprunteurs qui n’avait pas remboursé ses échéances de prêt immobilier, ainsi que contre la caution. Or, plus de 2 ans s’étant écoulés, l’action contre les emprunteurs était prescrite. La banque avait alors fait valoir que, selon la position habituelle des juges, seuls les emprunteurs pouvaient se prévaloir de cette prescription si bien qu’elle pouvait valablement agir contre la caution. Mais, contre toute attente, les juges ont changé de doctrine : pour ne pas pénaliser la personne qui s’était portée caution, ils ont, en effet, décidé de lui appliquer la règle nouvelle, qui vaut pour les cautionnements souscrits depuis le 1er janvier 2022, bien que son engagement de caution eût été pris avant cette date. Conséquence de cette décision : lorsque l’action contre un emprunteur est prescrite, l’action contre la caution est prescrite aussi, et ce quelle que soit la date à laquelle le contrat de cautionnement a été signé.

Cassation civile 1re, 20 avril 2022, n° 20-22866

Article publié le 21 juin 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Réglementation du cautionnement : du nouveau !

Un certain nombre de règles régissant le cautionnement viennent d’être aménagées, notamment celles relatives à la mention manuscrite inscrite par la personne qui se porte caution et au caractère disproportionné d’un cautionnement.

Le droit des sûretés (hypothèques, nantissements, cautionnements…) vient de faire l’objet d’une importante réforme. À ce titre, le régime juridique du cautionnement est sérieusement aménagé.

Précision : ces nouveautés entreront en vigueur le 1er janvier 2022, mais seulement pour les cautionnements souscrits à compter de cette date. Autrement dit, les cautionnements conclus auparavant demeureront soumis aux dispositions actuelles.

Simplification de la mention manuscrite

Actuellement, afin que la caution personne physique – on pense, par exemple, au dirigeant qui se porte caution pour sa société mais aussi à la personne qui garantit un crédit à la consommation ou un crédit immobilier – soit parfaitement informée de la portée et de l’étendue de son engagement, la loi exige qu’une mention précisément déterminée, écrite de la main de la caution, soit inscrite dans l’acte de cautionnement. En l’absence de cette mention, ou si elle n’est pas correctement reproduite, le cautionnement risque fort de ne pas être valable. L’application de cette exigence suscite un abondant contentieux, ce qui a conduit les pouvoirs publics à changer la règle. Ainsi, à compter du 1er janvier 2022, la caution personne physique ne sera plus tenue de rédiger de sa main une mention dont la formulation est précisément imposée par la loi, mais devra indiquer « elle-même » (donc personne d’autre) dans l’acte qu’elle s’engage en qualité de caution à payer au créancier ce que lui doit le débiteur en cas de défaillance de celui-ci, dans la limite d’un montant en principal et en accessoire exprimé en toutes lettres et en chiffres, et ce à peine de nullité de son engagement.

Précision : en cas de différence, le cautionnement vaudra pour la somme écrite en toutes lettres.

Autrement dit, le nouveau dispositif n’impose plus de recopier une formule donnée, mais il fixe simplement le contenu de la mention. En cas de contestation sur la formulation de celle-ci, il appartiendra au juge d’apprécier si elle est suffisante pour assurer l’information de la caution. Autre nouveauté, cette mention sera désormais requise d’une personne physique, que le créancier bénéficiaire de la caution soit un professionnel ou non. Aujourd’hui, elle n’est imposée que si le créancier est un professionnel.

Précision : comme aujourd’hui, la mention ne sera pas obligatoire lorsque le cautionnement sera souscrit par une personne morale ou lorsqu’il sera consenti par un acte notarié.

Réduction du cautionnement disproportionné

Actuellement, lorsqu’un cautionnement souscrit par une personne physique envers un créancier professionnel est, au moment de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses revenus et à son patrimoine, le créancier ne peut pas s’en prévaloir. La caution est donc totalement libérée de son engagement, sauf si sa situation patrimoniale est meilleure au moment où elle est appelée en paiement. Pour les cautionnements souscrits à compter du 1er janvier 2022, la sanction est atténuée : en cas de cautionnement disproportionné au moment de sa conclusion, le créancier pourra s’en prévaloir, mais ce cautionnement sera réduit au montant à hauteur duquel la caution pouvait s’engager à cette date.

Art. 3, Ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021, JO du 16

Article publié le 01 octobre 2021 – © Les Echos Publishing 2021

Cautionnement : gare à la désignation du débiteur dans la mention manuscrite !

Un cautionnement consenti au profit d’un créancier professionnel n’est pas valable lorsque la personne qui se porte caution n’indique pas la dénomination sociale de l’entreprise débitrice dans la mention manuscrite qu’elle inscrit dans l’acte.

Lorsqu’une personne, notamment un dirigeant de société, se porte caution pour cette société envers un créancier professionnel, en particulier à l’égard d’une banque en contrepartie de l’octroi d’un crédit, et que ce contrat est établi par acte sous seing privé (c’est-à-dire sans l’intervention d’un notaire), elle doit faire précéder sa signature d’une mention manuscrite bien précise prévue par la loi. Le texte de cette mention est le suivant : « En me portant caution de X dans la limite de la somme de … € couvrant le montant du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de …, je m’engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X n’y satisfait pas lui-même ».Et attention, si cette mention n’est pas correctement reproduite, le cautionnement est susceptible d’être annulé. Ce qui permet à la personne qui s’est portée caution d’échapper à son obligation.

Défaut d’indication de la dénomination de la société

Tel est notamment le cas lorsque la mention manuscrite n’indique pas le nom ou la dénomination sociale de l’entreprise pour laquelle le cautionnement a été souscrit. Ainsi, dans une affaire récente, les juges ont annulé le cautionnement souscrit par des époux en garantie du remboursement d’un prêt bancaire consenti à une société, car la mention manuscrite inscrite dans l’acte de cautionnement indiquait « le bénéficiaire du crédit » sans préciser la dénomination sociale de cette société.

À noter : dans cette affaire, l’argument invoqué par la banque selon lequel l’identité de la société était nécessairement connue des époux cautions puisqu’ils étaient les parents du gérant de la société, lui-même étant caution du prêt, que le nom de cette société figurait sur la première page de l’acte de cautionnement, et qu’ils avaient contresigné le contrat de prêt, a été indifférent aux yeux des juges. Sévère !

Cassation commerciale, 12 novembre 2020, n° 19-15893

Article publié le 18 mars 2021 – © Les Echos Publishing 2021

Le cautionnement souscrit par le dirigeant de société

Très souvent, pour ne pas dire systématiquement, le dirigeant d’une société est amené à se porter caution pour elle en contrepartie de l’octroi d’un crédit ou d’un découvert bancaire. Il prend ainsi l’engagement d’honorer personnellement les échéances de prêt de sa société au cas où elle serait défaillante, c’est-à-dire dans l’hypothèse où elle serait placée en redressement ou en liquidation judiciaires. Son patrimoine privé est donc engagé, et parfois aussi celui que le dirigeant détient en commun avec son conjoint. S’il peut sembler anodin, le cautionnement est, au contraire, un acte important, parfois lourd de conséquences…

L’étendue du cautionnement

Avant de signer un cautionnement, le dirigeant doit bien mesurer l’étendue de son obligation, à savoir, au premier chef, le montant des sommes qu’il aura, le cas échéant, à débourser en lieu et place de sa société.

Lorsque le cautionnement est souscrit pour garantir une dette précisément déterminée, par exemple le montant d’un prêt, l’engagement du dirigeant est, par définition, limité. Il sait donc parfaitement ce à quoi il s’expose.En revanche, lorsque le banquier demande au dirigeant de se porter caution pour toutes les sommes qu’il pourrait prêter à sa société, l’obligation de ce dernier est, cette fois, plus incertaine et les risques courus plus grands. Dans cette hypothèse, le dirigeant a intérêt, autant que faire se peut, à négocier un plafond de dettes au-delà duquel il sera libéré de toute obligation. En la matière, l’assistance de son conseil habituel (son expert-comptable) lors de la discussion avec le banquier constitue sans aucun doute un atout pour parvenir à ses fins.Les effets d’un cautionnement sont encore plus graves lorsque le dirigeant est caution « solidaire ». Car dans ce cas, extrêmement fréquent en pratique, le banquier est autorisé à lui réclamer directement et en totalité le paiement de sa créance, sans avoir à agir au préalable contre le débiteur principal, c’est-à-dire la société. En outre, quand bien même y aurait-il une seconde caution (par exemple le conjoint du dirigeant), la solidarité permet au banquier de réclamer au dirigeant caution l’intégralité des sommes dues sans avoir à agir contre l’autre caution à proportion de son engagement !


Précision : lorsque le dirigeant est marié sous le régime de la communauté, il n’engage par son cautionnement que ses biens propres et ses revenus. Les biens qu’il possède en commun avec son conjoint et ceux qui appartiennent en propre à ce dernier sont donc à l’abri des poursuites du banquier. Mais en pratique, très souvent, la banque demande au conjoint du dirigeant de consentir au cautionnement souscrit par ce dernier. Dans ce cas, elle peut également agir sur les biens communs du couple. Les biens propres du conjoint demeurant, quant à eux, préservés.

La durée du cautionnement

Le dirigeant qui souscrit un cautionnement doit également être attentif à la durée, déterminée ou indéterminée, pendant laquelle il sera engagé.

Un cautionnement peut être souscrit pour une durée déterminée ou indéterminée. Dans le premier cas, pas de surprise : à la date prévue, l’engagement du dirigeant en tant que caution cesse. Il n’est alors plus tenu de garantir les dettes de la société nées après cette date. Et attention, puisque la durée est déterminée, le dirigeant peut être engagé même après avoir quitté la société lorsque cette durée n’est pas expirée. La plus élémentaire prudence commande donc de préciser dans l’acte que le cautionnement prendra fin au terme de son mandat social.Lorsque la durée est indéterminée, la situation du dirigeant est plus inconfortable car son obligation porte, cette fois, sur les dettes de la société nées et à naître à l’égard du banquier pendant une période indéfinie. En contrepartie, il dispose ici de la faculté de révoquer son engagement à tout moment. Mais en pratique, il s’agit d’une faculté dont il hésitera peut-être à faire usage de peur que, par représailles, le banquier ne décide d’interrompre son concours financier.En réalité, le dirigeant caution retrouve surtout sa liberté de mettre fin à un cautionnement à durée indéterminée au moment où il abandonne ses fonctions. Sachant qu’il doit le faire expressément savoir au banquier en lui adressant une lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Car sinon — et les tribunaux le rappellent régulièrement —, il continuera d’être tenu des dettes de la société nées après la cessation de ses fonctions ! Là encore, pour éviter toute déconvenue, l’intéressé doit prendre soin de stipuler dans l’acte que le cautionnement est lié à sa qualité de dirigeant et qu’il cessera au terme de son mandat social.

Le formalisme du cautionnement

L’acte de cautionnement souscrit par une personne physique au profit d’un créancier professionnel doit contenir certaines mentions obligatoires.

Lorsqu’un dirigeant, personne physique, s’engage par acte sous seing privé (c’est-à-dire sans l’intervention d’un notaire) en qualité de caution envers un banquier ou tout autre créancier professionnel, sa signature doit être précédée d’une mention manuscrite, prévue par la loi, qui précise le montant de la somme garantie et la durée de l’engagement. Le texte de cette mention est le suivant : « En me portant caution de la société X dans la limite de la somme de … € couvrant le montant du principal, des intérêts et, le cas échéant, des intérêts de retard et pour la durée de …, je m’engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si la société X n’y satisfait pas elle-même. »De même, une mention spécifique doit obligatoirement être inscrite dans l’acte lorsque le cautionnement est solidaire.Et attention, faute de contenir ces mentions écrites de la main de l’intéressé et de les reproduire mot pour mot, l’acte de cautionnement est susceptible d’être annulé ! Bon à savoir pour le dirigeant, qui aura tout intérêt à vérifier l’existence et la validité de ces mentions au moment où il sera appelé à payer.Étant précisé toutefois que les juges invalident un cautionnement pour ce motif seulement lorsque les erreurs ou les inexactitudes figurant dans les mentions exigées par la loi altèrent le sens et la portée de l’engagement de la caution de telle sorte qu’elle a pu mal comprendre l’étendue de son engagement. Ainsi, par exemple, ils ont annulé un cautionnement dans lequel une personne avait écrit qu’elle s’engageait « sur ses revenus OU ses biens » au lieu de « sur ses revenus Et ses biens ». De même, un cautionnement a été annulé au motif que la durée indiquée dans la mention n’était pas suffisamment précise. Ou encore lorsque, dans la mention, le débiteur principal n’était pas désigné par son nom ou par sa dénomination sociale mais par l’indication « le bénéficiaire du crédit ».À l’inverse, les tribunaux refusent d’annuler un cautionnement lorsque l’erreur commise dans la reproduction de la mention est mineure et n’affecte donc ni le sens ni la portée de celle-ci. Ainsi, par exemple, un cautionnement a été déclaré valable même si la ponctuation avait été omise ou encore lorsque le mot « banque » avait été substitué à celui de « prêteur ».Enfin, l’omission de certaines mentions dans la mention manuscrite peut ne pas rendre pas le cautionnement nul mais emporter néanmoins des effets. Ainsi, l’omission du mot « intérêts » dans l’énoncé des sommes que l’intéressé s’était engagé à garantir a eu pour seule conséquence, selon les juges, de limiter l’étendue du cautionnement au capital, mais pas d’affecter la validité de l’acte. De même, si les termes « mes biens » ont été oubliés, la caution n’est engagée que sur ses revenus.


Important : le dirigeant (personne physique) peut également être libéré de son engagement lorsque le cautionnement qu’il a consenti était manifestement disproportionné à ses biens et à ses revenus lors de la signature de l’acte. À condition toutefois que son patrimoine ne lui permette pas de rembourser les sommes dues à la banque au moment où elle les lui demande. Un contentieux très abondant existe en la matière, les dirigeants faisant fréquemment valoir cet argument pour tenter d’échapper au paiement.

L’information de la caution par le banquier

Chaque année, le banquier est tenu d’informer la caution notamment du montant des sommes que le débiteur reste à devoir.

En cours de contrat, le banquier est astreint à une obligation d’information à l’égard du dirigeant caution. Ainsi, il est tenu, chaque année avant le 31 mars :– de lui communiquer le montant de la dette garantie et des intérêts, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l’année précédente ;– de lui rappeler le terme de son engagement de caution ou, s’il est à durée indéterminée, la faculté dont il dispose de le révoquer à tout moment, ainsi que les modalités d’exercice de cette révocation.S’il omet de communiquer ces informations à la caution, le banquier perd le droit de lui réclamer les intérêts échus entre la précédente information et la suivante. Le dirigeant tient là un moyen de limiter les sommes qu’il aura éventuellement à payer un jour.

Article publié le 12 mars 2021 – © Les Echos Publishing 2021

La vente avec clause de réserve de propriété

En principe, la propriété d’un bien vendu est transférée à l’acheteur dès la conclusion du contrat, que le prix soit payé ou non. Toutefois, le vendeur peut prévoir dans le contrat une clause de réserve de propriété en vertu de laquelle l’acheteur ne deviendra propriétaire du bien vendu qu’après le paiement intégral du prix. Ce qui constitue une garantie intéressante pour lui en cas d’impayé. Explications.

Conditions de validité d’une clause de réserve de propriété

La clause de réserve de propriété doit être convenue par écrit entre le vendeur et l’acheteur au plus tard au moment de la livraison du bien vendu et être insérée de manière apparente dans les documents commerciaux du vendeur.

Pour qu’une clause de réserve de propriété soit valable et puisse donc produire ses effets, elle doit avoir fait l’objet d’une acceptation explicite de la part de l’acquéreur au plus tard au moment de la livraison du bien vendu. Pour cela, ce dernier doit pouvoir en prendre connaissance facilement. Ainsi, la clause de réserve de propriété doit être établie par écrit. Elle peut être insérée dans les divers documents commerciaux émanant du vendeur (bons de commande, bons de livraison, factures, etc.) ou encore dans ses conditions générales de vente.

Attention : mieux vaut éviter d’inscrire la clause de réserve de propriété uniquement sur les factures. En effet, ces dernières étant souvent envoyées à l’acheteur après la livraison, il est trop tard pour une acception de la clause de sa part.

Et attention, quel que soit le support sur lequel elle est insérée, la clause de réserve de propriété doit apparaître de façon claire, bien en évidence, de sorte que l’acheteur ne puisse prétendre l’avoir ignorée. À défaut, elle risquerait d’être inopérante et le vendeur perdrait alors la garantie qu’elle a vocation à lui offrir.

Le droit de revendiquer le bien vendu

Le vendeur peut revendiquer la marchandise vendue avec réserve de propriété lorsqu’il n’a pas été intégralement payé à l’échéance prévue.

En dehors d’une procédure collective

La clause de réserve de propriété constitue une garantie très efficace pour le vendeur. En effet, lorsqu’il n’a pas reçu paiement intégral du prix du bien vendu à l’échéance prévue, le vendeur est en droit de le reprendre. En pratique, il lui suffit de saisir le juge pour faire appliquer la clause, puis de mandater un huissier de justice pour qu’il procède à une saisie du bien entre les mains de l’acheteur.

Précision : si l’acheteur souhaite conserver le bien pour poursuivre son activité, il devra alors payer le prix de vente.

En cas de procédure collective de l’acheteur

Mais surtout, la clause de réserve de propriété présente un intérêt particulier lorsque l’acheteur fait l’objet d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire. Dans ce cas, en effet, le vendeur qui n’a pas reçu paiement de l’intégralité du prix peut obtenir la restitution du bien en exerçant une action dite en revendication. Il dispose ainsi d’un sérieux avantage par rapport aux autres créanciers de l’acheteur qui, pour la plupart, doivent se contenter de déclarer leur créance auprès du mandataire judiciaire, sans grand espoir de se voir un jour payés de leur dû. L’exercice de l’action en revendication dans le cadre de la procédure collective de l’acheteur est toutefois soumis à trois conditions cumulatives. D’abord, on l’a dit, la clause de réserve de propriété doit avoir été convenue par écrit entre le vendeur et l’acheteur, et acceptée par ce dernier, au plus tard au moment de la livraison des biens vendus. Ensuite, pour que l’action en revendication soit possible, il faut que les marchandises impayées existent en nature chez l’acheteur au moment de l’ouverture de la procédure collective, c’est-à-dire qu’elles soient identifiables et individualisées entre les mains de l’acheteur. Ainsi, l’exercice de l’action en revendication est impossible lorsque le bien vendu a été transformé par l’acheteur ou assemblé avec d’autres biens.

Précision : la revendication demeure toutefois possible sur les biens incorporés dans un autre bien lorsque leur récupération peut s’effectuer sans dommage pour les biens eux-mêmes et pour le bien dans lequel ils ont été incorporés. Il en est de même pour les biens fongibles, c’est-à-dire qui sont interchangeables les uns par rapport aux autres (par exemple, du blé).

Enfin, l’action en revendication du bien doit être exercée auprès de l’administrateur judiciaire (ou du liquidateur judiciaire en cas de liquidation) dans les 3 mois à compter de la publication du jugement ouvrant la procédure collective de l’acheteur. Et attention, passé ce délai, le vendeur ne pourra plus faire valoir son droit de revendication. L’administrateur ou le liquidateur pourra alors vendre le bien au même titre que les autres biens appartenant au débiteur. Par la suite, soit l’administrateur (ou le liquidateur) accepte de restituer les marchandises, soit il refuse parce qu’il conteste le bien-fondé de la créance, soit il s’abstient de répondre dans le mois qui suit. Dans ces deux derniers cas, le vendeur pourra alors, dans le délai d’un mois, saisir le juge-commissaire chargé de la procédure. Si ce dernier lui donne raison, le vendeur prendra soin de faire notifier sa décision, par acte d’huissier de justice, à l’administrateur ou au liquidateur qui aura 10 jours pour former un recours contre l’ordonnance du juge-commissaire. En l’absence de recours dans ce délai, l’administrateur ou le liquidateur devra restituer les marchandises. En cas de recours, c’est le tribunal qui tranchera. Si, à l’inverse, le juge-commissaire donne tort au vendeur, ce dernier pourra, lui aussi, faire appel de son ordonnance dans les 10 jours qui suivront.

Attention : même en présence d’une clause de réserve de propriété, le vendeur a tout intérêt à déclarer sa créance auprès du mandataire judiciaire ou du liquidateur judiciaire dans un délai de 2 mois à compter de la publication du jugement d’ouverture de la procédure collective de l’acheteur. En effet, si l’action en revendication n’aboutit pas, la créance aura le mérite d’être inscrite au passif du débiteur et pourra être éventuellement payée dans le cadre de la procédure collective.

En cas de revente du bien

L’acheteur n’étant pas propriétaire des marchandises vendues avec réserve de propriété jusqu’au complet paiement du prix, il ne peut pas, en principe, revendre les marchandises. Néanmoins, en pratique, il arrive que l’acquéreur revende le bien, lequel est alors détenu par un sous-acquéreur. Dans ce cas, on distingue selon que le sous-acquéreur est de bonne ou de mauvaise foi. Dans le premier cas, c’est-à-dire lorsque le sous-acquéreur ignorait l’existence de la clause de réserve de propriété, le vendeur ne peut plus revendiquer les marchandises auprès du sous-acquéreur. Toutefois, il a la possibilité de lui réclamer la créance sur le prix (ou sur une fraction du prix de revente) que ce dernier n’aurait pas encore réglée à l’acheteur au jour de la procédure collective, à condition toutefois que le bien ait été revendu au sous-acquéreur dans son état initial. Dans le second cas, lorsque le sous-acquéreur n’ignorait pas que les marchandises avaient été vendues avec une clause de réserve de propriété, le vendeur initial peut exercer l’action en revendication pour les reprendre.

Et la clause de transfert des risques ?

La clause de transfert des risques transfère à l’acquéreur le risque de perte et de dégradation du bien vendu avec réserve de propriété.

Les risques de perte ou de dégradation d’une chose pèsent sur son propriétaire, donc, en principe, sur l’acheteur une fois que la vente a été conclue et que la propriété lui a été transférée. Mais dans le cas d’un bien vendu avec réserve de propriété, le vendeur demeure propriétaire du bien tant que le prix de ce bien ne lui a pas été versé. C’est donc sur lui que pèse le risque de perte et de dégradation. L’acheteur chez qui le bien a été livré n’est, quant à lui, tenu que d’une obligation de conservation du bien. Cette obligation étant une obligation de moyens et non de résultat. Toutefois, il en est autrement lorsque le vendeur a pris soin de doubler la clause de réserve de propriété d’une clause dite de « transfert des risques ». Par cette clause, le vendeur transfère à l’acheteur le risque de perte et de dégradation du bien vendu dès le moment de sa livraison, voire de sa remise au transporteur chargé de la livraison. Il s’agit ainsi d’une garantie supplémentaire pour le vendeur.

Article publié le 07 juin 2019 – © Les Echos Publishing 2023 – Crédit photo : Alistair Berg