Avocats : le droit de copier un dossier pénal lors de sa consultation annulé par le Conseil d’État

Copier soi-même en le scannant ou en le photographiant un dossier de procédure pénale lors de sa consultation, comme le prévoyait un récent décret, excède le simple droit de consultation prévu par la loi.

Saisi par l’Union syndicale des magistrats et l’Association française des magistrats instructeurs, le Conseil d’État s’est récemment prononcé sur une demande d’annulation pour excès de pouvoir d’un certain nombre d’articles du décret du 13 avril 2022 portant application de diverses dispositions de procédure pénale de la loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire. Parmi les articles visés, se trouvait l’article 10, retranscrit dans l’article D593-2 du Code de procédure pénale, qui prévoit que, dans les cas où un avocat peut demander la consultation d’un dossier de procédure pénale, il peut « réaliser lui-même une reproduction de tout ou partie des éléments du dossier par tout moyen, et notamment par l’utilisation d’un scanner portatif ou la prise de photographies ».

Domaine réservé à la loi

Or pour les juges, « il ne résulte pas des dispositions législatives du Code de procédure pénale prévoyant qu’un avocat peut demander à l’autorité compétente la délivrance d’une copie du dossier de la procédure pénale que le législateur aurait, dans ces cas, également entendu permettre que l’avocat puisse réaliser, par lui-même, une reproduction de tout ou partie de ce dossier à l’occasion de la consultation de celui-ci ». En outre, s’agissant des procédures où les avocats peuvent consulter un dossier, le législateur, selon le Conseil d’État, a entendu limiter leur droit « à une simple consultation du dossier, sans leur permettre d’en obtenir une copie ni a fortiori d’en réaliser par eux-mêmes une reproduction intégrale ou partielle dans le cadre de cette consultation ». Ainsi, l’ensemble des dispositions introduites dans le Code de procédure pénale par l’article 10 du décret du 13 avril 2022 relèvent, pour les juges, du « domaine réservé à la loi par l’article 34 de la Constitution et sont entachées d’incompétence. Il y a lieu, pour ce motif, de les annuler ».

Conseil d’État, 24 juillet 2024, n° 464641

Article publié le 20 août 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : RUNSTUDIO / Getty images

Médecins : vers un déremboursement des prescriptions des praticiens déconventionnés ?

Dans son dernier rapport « Charges et produits », la Caisse nationale d’assurance-maladie (Cnam) envisage de ne plus rembourser les prescriptions des médecins libéraux ayant choisi d’exercer en dehors du système conventionnel.

Alors qu’une nouvelle convention a été signée par cinq des six syndicats, la CNAM souhaite qu’il y ait moins de médecins déconventionnés. Ceux-ci peuvent, en effet, se déconventionner, puis changer d’avis et revenir quand ils le souhaitent sous le système de convention en envoyant un courrier avec accusé de réception qui prend effet un mois plus tard. Dans son dernier rapport « Charges et produits », la CNAM indique qu’« un médecin ne souhaitant pas contractualiser avec l’Assurance-maladie ne sera pas éligible à la prise en charge solidaire ni pour ses actes, ni pour les soins issus de ses prescriptions ».

Un délai de carence plus dissuasif

L’Assurance-maladie souhaite même aller plus loin. Elle voudrait également installer un délai de carence plus dissuasif, en l’occurence de deux ans au lieu d’un mois, entre le déconventionnement et un éventuel reconventionnement. Autrement dit, deux ans sans prise en charge des cotisations sociales, sans paiements forfaitaires en sus des honoraires et sans remboursement aux patients.

À noter : selon la CNAM, 575 généralistes et 215 spécialistes exercent actuellement en dehors de la convention médicale, sur les 112 000 praticiens qui exercent en libéral.

Pour consulter le rapport, rendez-vous sur le site de l’Assurance maladie.

Article publié le 14 août 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : Westend61 / zerocreatives

Médecins : utilisation d’un dossier médical à des fins pédagogiques

Le médecin qui transmet à ses étudiants des photographies permettant de reconnaître une patiente doit obtenir l’accord de cette dernière.

Selon l’article R. 4127-73 du Code de la santé publique, les médecins peuvent utiliser des documents médicaux de leurs patients à des fins d’enseignement. Mais ils doivent alors soit s’assurer que l’identification de ces derniers n’est pas possible, soit obtenir l’accord des intéressés. Ainsi, dans une affaire récente, un chirurgien-dentiste, professeur dans une faculté de chirurgie-dentaire, avait utilisé plusieurs photographies du visage et de la dentition d’une de ses patientes pour illustrer un cas pratique adressé à ses étudiants. Informée de ce fait, la patiente avait engagé une action en responsabilité contre l’université (en tant qu’employeur du médecin) afin d’obtenir réparation du préjudice qu’elle estimait avoir subi du fait de la diffusion non autorisée de ces photographies. Une demande favorablement accueillie par le Tribunal administratif de Strasbourg. En effet, les juges ont constaté que la patiente était reconnaissable sur les photographies transmises aux étudiants et qu’elle avait même été reconnue. Or, celle-ci n’avait pas consenti à cette divulgation.Dans cette affaire, le chirurgien-dentiste, contrairement aux exigences de l’article R. 4127-73 du Code de la santé publique, n’avait donc ni vérifié que la patiente n’était pas identifiable ni obtenu son consentement à la diffusion de ses photographies. Les juges en ont conclu que le médecin avait commis une faute engageant la responsabilité de l’université en tant qu’employeur.

Précision : les juges ont noté que l’absence de caractère dégradant de ces photographies ne remettait pas en cause la faute commise par le médecin.

Tribunal administratif de Strasbourg, 9 juillet 2024, n° 2207563

Article publié le 13 août 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : © www.buero-monaco.de

Avocats : rupture d’un contrat de collaboration libérale pendant un arrêt de travail

La période d’essai d’un contrat de collaboration libérale ne peut pas être rompue pendant un arrêt de travail pour maladie du collaborateur, sauf manquement grave aux règles professionnelles non lié à son état de santé.

Le contrat de collaboration libérale permet à un avocat de travailler pour le compte d’autrui tout en conservant son statut social et fiscal de professionnel libéral. Ce contrat, qui diffère du contrat de travail, n’est pas soumis aux règles du Code du travail mais il apporte néanmoins une certaine protection au collaborateur libéral notamment via les dispositions du Règlement Intérieur National de la profession d’avocat (RIN) élaboré par le Conseil national des barreaux. Des règles qui régissent, entre autres, la rupture de ce contrat. Ainsi, dans une affaire récente, une avocate et une société civile professionnelle d’avocats (SCP) avait conclu un contrat de collaboration libérale comportant une période d’essai de  3 mois. La SCP avait informé sa collaboratrice de la rupture de sa période d’essai alors que celle-ci était en arrêt de travail pour maladie. Une rupture contestée en justice. Selon le RIN, « la notification de la rupture du contrat ne peut intervenir pendant une période d’indisponibilité du collaborateur pour raison de santé médicalement constatée, sauf manquement grave aux règles professionnelles non lié à l’état de santé ». Ces manquements étant définis comme « toute méconnaissance par l’avocat des obligations légales, réglementaires ou contractuelles, qui porte atteinte aux principes essentiels de la profession ». Dans cette affaire, la Cour de cassation a considéré que la rupture du contrat de la collaboratrice n’était pas valable. En effet, elle a estimé d’une part, que la protection contre la rupture de leur contrat bénéficiait aux collaborateurs en arrêt de travail même pendant leur période d’essai et d’autre part, que la SCP n’avait pas établi que sa collaboratrice avait commis un manquement grave aux règles professionnelles non lié à son état de santé.

Dans les faits : la SCP reprochait à la collaboratrice des absences, un défaut de collaboration aux activités du cabinet à temps complet, un manque de travail et un défaut de compte-rendu des dossiers durant une semaine, une carence (non établie) dans la défense des intérêts de cats ayant dû être orientés vers d’autres confrères, ainsi qu’un défaut de respect des délais de procédure affectant l’obligation de diligence qui constituait un incident isolé ayant pu être réparé.

Cassation civile 1ère, 15 mai 2024, n° 22-24739

Article publié le 06 août 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : nicoletaionescu

Notaires : recevabilité d’une action en responsabilité d’un codonataire

Pour être recevable, l’action en responsabilité initiée par un donataire à l’encontre d’un notaire n’est pas subordonnée à la mise en cause des autres donataires.

En 2000, un couple sollicite un notaire pour établir une donation-partage au profit de de leurs 3 enfants, à parts égales. 10 ans plus tard, l’une des donataires, s’estimant lésée, assigne en responsabilité le notaire au motif qu’il aurait manqué à son obligation de conseil et de loyauté en omettant de réintégrer, à l’actif à partager, des donations antérieures dont son frère et sa sœur avaient bénéficié. Saisie du litige, une cour d’appel déclare irrecevable cette demande, considérant, notamment, « qu’eu égard à la portée de ses contestations et de ses demandes indemnitaires qui excèdent le débat sur la seule responsabilité du notaire », il appartenait à la plaignante de mettre en cause les autres donataires.

Une action recevable

Mais pour la Cour de cassation, l’action en responsabilité est bien recevable. Cette dernière rappelle, ainsi, qu’aux termes des articles 31 et 122 du Code de procédure civile, en principe, « l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention » et que « constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée ». En conséquence, l’action en responsabilité et indemnisation formée par un donataire contre le notaire qui a instrumenté la donation-partage n’a pas à être subordonnée à la mise en cause des autres donataires pour être recevable.

Cassation civile 1ère, 15 mais 2024, n° 23-12432

Article publié le 30 juillet 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : Izabela Habur

Chirurgiens esthétiques : quid des opérations exonérées de TVA ?

En matière de médecine ou de chirurgie esthétique, seuls les actes poursuivant une finalité thérapeutique sont exonérés de TVA, a rappelé le Conseil d’État.

Dans le domaine de la santé, certaines activités bénéficient d’une exonération de TVA. Sont notamment concernés les soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées. À ce titre, en matière de médecine ou de chirurgie esthétique, le Conseil d’État a rappelé récemment que seuls les actes qui poursuivent une finalité thérapeutique sont exonérés de TVA, c’est-à-dire ceux qui sont dispensés dans le but de diagnostiquer, de soigner et, dans la mesure du possible, de guérir des personnes qui, à la suite d’une maladie, d’une blessure ou d’un handicap physique congénital, nécessitent de faire l’objet d’une telle intervention.

À noter : dans cette affaire, l’administration fiscale avait remis en cause l’exonération de TVA appliquée par une société d’exercice libéral à responsabilité limitée (Selarl) d’un médecin exerçant l’activité de chirurgie plastique et esthétique en raison du caractère non thérapeutique d’une partie des actes réalisés, à savoir ceux qui n’avaient pas été effectivement remboursés par l’Assurance maladie. Pour établir le caractère thérapeutique des actes en cause, et bénéficier de l’exonération de TVA, la Selarl avait produit un tableau, établi par ses soins, avec la mention « acte remboursable ou non selon les circonstances », estimant que la qualification thérapeutique des actes dépendait de l’appréciation du médecin. Insuffisant, ont estimé les juges, tout comme le rapport d’expertise analysant 10 dossiers choisis au hasard sur la base des données transmises par la Selarl sans examen des patients.

Conseil d’État, 31 mai 2024, n° 476051

Article publié le 23 juillet 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : Gorodenkoff Productions OU

Pharmaciens : un avenant à la Convention nationale

Un avenant à la Convention nationale de 2022 acte de nouvelles missions à l’officine, revalorise certains honoraires et fixe de nouveaux objectifs de transition écologique et de santé publique.

Composé de 18 articles, l’avenant, approuvé par un arrêté du 5 juillet 2024, entend renforcer le rôle et le maillage des officines. Il prévoit, par exemple, une rémunération forfaitaire exceptionnelle (qui sera versée en 2025 pour les actes effectués en 2024) comme la réalisation de TROD angine à l’officine, l’aménagement de locaux nécessaires au dépistage d’une cystite bactérienne ou encore la réalisation d’entretiens auprès de patients atteints de maladies chroniques.

Une aide pour les officines en territoire fragile

La rémunération sur objectifs de santé publique (Rosp) est élargie avec l’ajout du taux de connexion à l’outil anti-fraude ASAFO-PHARMA, de l’atteinte d’un niveau de démarche écoresponsable ou de la pénétration des médicaments génériques, biosimilaires ou hybrides.

Autre nouveauté : une aide pouvant aller jusqu’à 20 000 € par an est créée pour les officines situées dans les territoires fragiles. L’avenant prévoit, en outre, l’augmentation, au 1er trimestre 2025, des indemnités d’astreintes, de gardes et d’urgences.

Arrêté du 5 juillet 2024, JO du 7

Article publié le 19 juillet 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : Thana Prasongsin / Getty Images

Masseurs-kinésithérapeutes : participez à l’amélioration du système de santé français

Le Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes lance une série de questionnaires pour mieux connaître les différents modes d’exercice de la profession et pouvoir proposer des réponses adaptées aux besoins en santé des Français.

Dans le cadre d’une collaboration avec l’Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (IRDES), l’Ordre des masseurs-kinésithérapeutes sollicite les praticiens pour en savoir plus sur leur pratique. Ainsi, ces derniers vont pouvoir indiquer les difficultés et contraintes qu’ils rencontrent dans l’exercice de la kinésithérapie afin de permettre à l’Ordre d’identifier des axes d’amélioration et de faire des propositions auprès des pouvoirs publics.

Un traitement des données pseudonymisées

Trois questionnaires vont ainsi être proposés, durant les 18 mois à venir, sur des thèmes variés comme le mode d’exercice, les critères d’installation, l’effet des nouvelles politiques conventionnelles et les nouveaux modes d’exercice. Ces questionnaires durent une quinzaine de minutes. Les données seront pseudonymisées avant leur analyse.Le premier questionnaire est d’ores et déjà disponible sur le site. Il est accessible jusqu’au 12 août et porte sur le mode d’exercice.Pour répondre au premier questionnaire : https://commissiondemographie-ordremk.limesurvey.net/356224

Article publié le 18 juillet 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : Wavebreakmedia

Chirurgiens-dentistes : un premier avenant à la Convention dentaire

Signé au début du mois de juillet 2024, le premier avenant à la Convention dentaire avec l’Assurance maladie fixe notamment le tarif horaire de la régulation téléphonique des chirurgiens-dentistes en Centre 15.

Signée en juillet 2023, la convention dentaire 2023-2028 vient de faire l’objet d’un premier avenant. Parmi les nouvelles mesures introduites, il est notamment prévu un tarif horaire de 90 € pour la régulation téléphonique dentaire du Samu-Centre 15 dans le cadre de la permanence des soins dentaires les dimanches et jours fériés. Pour rappel, cette participation repose sur le volontariat et sera mise en place, de façon non systématique, en fonction des besoins dans chaque département.

Élargissement du dispositif « Génération sans carie »

Autres changements prévus par l’avenant : un élargissement du dispositif « Génération sans carie » qui instaure désormais un examen bucco-dentaire pour les 3-24 ans tous les ans (contre tous les 3 ans auparavant), la revalorisation de 30 % de leurs soins conservateurs et la prise en charge de la pose d’un vernis fluoré jusqu’à 24 ans (au lieu de 9 ans précédemment). Ces revalorisations seront étendues en 2025 aux enfants dès un an, puis en 2028 aux adultes jusqu’à 28 ans.L’avenant prévoit également l’envoi à chaque praticien de son profil individuel de prescription des antibiotiques pour pouvoir analyser sa propre pratique et mettre en œuvre les corrections nécessaires. Enfin, il permet de pratiquer la téléexpertise bucco-dentaire pour les personnes éloignées du système de soins ou présentant des suspicions de pathologies dentaires graves ou rares.

Article publié le 17 juillet 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : Iuliia Burmistrova / Getty Images

Médecins : la rémunération forfaitaire pour les vaccinations HPV est fixée

Un récent arrêté fixe le montant de la rémunération forfaitaire des professionnels de santé qui participeront aux campagnes de vaccination contre le Papillomavirus (HPV) dans les collèges.

Depuis la rentrée scolaire de 2023, les élèves de 5e peuvent être vaccinés contre le papillomavirus au sein de leur collège. Des campagnes de vaccination doivent donc être organisées dans les établissements scolaires, ce qui peut mobiliser plusieurs catégories de professionnels de santé. Ces derniers sont alors indemnisés forfaitairement par l’Assurance maladie en fonction du temps alloué. Un arrêté vient de fixer le montant de cette indemnité forfaitaire.

75 € pour les médecins en activité

L’indemnité s’élève à 75 € pour les médecins en activité, à 48 € pour les sages-femmes diplômées d’État et pour les pharmaciens, et à 37 € pour les infirmiers diplômés d’État. Les professionnels de santé retraités, sans activité professionnelle, les agents publics, les salariés et les étudiants peuvent aussi être sollicités. Dans ce cas, l’indemnité forfaitaire est de 50 € pour les médecins et les étudiants en deuxième et troisième cycle de médecine, 32 € pour les sages-femmes diplômées d’État, les pharmaciens et les étudiants en troisième cycle d’étude pharmaceutique, et 24 € pour les infirmiers diplômés d’État.Ces montants ne peuvent pas être majorés.Arrêté du 3 juillet 2024, JO du 7

Article publié le 16 juillet 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : Ariel Skelley / Getty Images