Droits d’enregistrement : quand la date du dépôt de l’acte compte !

Lorsque les droits ont été payés lors de la présentation d’un acte à l’enregistrement, le délai imparti au fisc pour rectifier l’impôt court à compter de la date de ce dépôt, et non à compter de celle de l’enregistrement effectif de l’acte.

L’administration fiscale peut rectifier les erreurs commises dans l’établissement des impôts. Ce « droit de reprise » est toutefois enfermé dans un délai précis. Ainsi, en matière de droits d’enregistrement, l’administration peut agir, en principe, jusqu’au 31 décembre de la 3e année qui suit celle au cours de laquelle « l’exigibilité des droits a été suffisamment révélée par l’enregistrement d’un acte ». Sachant que cet enregistrement ne peut pas être différé par l’administration lorsque les droits ont été payés. À ce titre, la question s’est posée de savoir si ce délai court à compter du dépôt de l’acte ou plutôt à compter de son enregistrement effectif. Dans cette affaire, un acte de donation de la nue-propriété d’un bien immobilier avait été déposé le 31 décembre 2010, accompagné du paiement des droits de mutation correspondants, et avait été effectivement enregistré le 4 janvier 2011. Quelque temps plus tard, le 12 décembre 2014, l’administration avait adressé aux donataires un redressement, fondé sur une réévaluation du bien donné. Un redressement que ces derniers avaient contesté au motif que l’administration avait exercé son droit de reprise au-delà du délai qui lui était imparti.

Précision : selon les donataires, la date de dépôt de l’acte du 31 décembre 2010 constituait le point de départ du délai de reprise de l’administration, qui expirait donc au 31 décembre 2013. Pour eux, le redressement adressé le 12 décembre 2014 était donc hors délai.

Une analyse confirmée par la Cour de cassation. Selon les juges, lorsque les droits ont été payés le jour du dépôt d’un acte soumis à enregistrement et que la formalité de l’enregistrement a été acceptée par le comptable, cet acte est considéré comme enregistré à la date de son dépôt. La date de l’enregistrement de l’acte du 4 janvier 2011 ne pouvait donc pas constituer le point de départ du délai de reprise de l’administration.

À noter : la présentation à l’enregistrement d’un acte notarié fait présumer que les droits correspondants ont été acquittés.

Cassation commerciale, 10 mai 2024, n° 22-18929

Article publié le 03 juillet 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : Aire images / Getty images

Recours pour excès de pouvoir d’une association : intérêt à agir

Une association ayant pour objet d’encourager la commercialisation des chevaux et des poneys sans la pratiquer ne peut pas, faute d’intérêt suffisamment direct et certain, défendre en justice les intérêts des éleveurs d’équidés.

Une association peut demander en justice l’annulation d’une décision administrative seulement si elle a un intérêt à agir au regard de l’objet défini dans ses statuts. Dans une affaire récente, une association avait formé un recours pour excès de pouvoir afin de faire annuler plusieurs paragraphes des commentaires administratifs publiés au Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP) limitant, pour les livraisons d’équidés vivants et les prestations de services liées, le bénéfice du taux réduit de la TVA (5,5 %) aux hypothèses où les équidés sont d’un type normalement destiné à être utilisé dans la production agricole. Une requête que le Conseil d’État a déclaré irrecevable, faute pour l’association d’avoir un intérêt suffisamment direct et certain lui donnant qualité pour demander l’annulation de ces dispositions. En effet, les juges ont constaté que, selon ses statuts, l’association avait pour objet « d’encourager l’élevage, la formation, la valorisation et la commercialisation des jeunes chevaux et poneys, en particulier de sport, en France, et d’en favoriser l’emploi ». Ils en ont déduit que cet objet ne comprenait pas la défense des intérêts des membres de l’association, notamment des associations régionales d’éleveurs d’équidés, et se limitait, concernant la commercialisation de chevaux et poneys, à l’encourager sans la pratiquer.

Article publié le 01 juillet 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : Axel Krien

Une rupture conventionnelle peut être requalifiée en démission !

Lorsque le consentement de l’employeur à la signature d’une rupture conventionnelle est obtenu au moyen de manœuvres dolosives du salarié, cette rupture peut être requalifiée par les juges en démission.

La rupture conventionnelle homologuée permet à l’employeur et au salarié de mettre un terme, d’un commun accord, à un contrat à durée indéterminée. Pour être valable, le consentement du salarié doit être libre et éclairé. Autrement dit, il ne doit pas être obtenu à la suite d’une erreur, d’un dol ou d’un acte de violence. Sinon, la rupture conventionnelle peut être annulée par les juges, produisant ainsi les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Mais qu’en est-il lorsque c’est le consentement de l’employeur qui est vicié ?Dans une affaire récente, un salarié exerçant les fonctions de responsable commercial avait conclu une rupture conventionnelle avec son employeur. Un an plus tard, ce dernier avait saisi la justice en vue de faire annuler la rupture. Selon lui, son consentement avait été obtenu à la suite de manœuvres dolosives de la part du salarié. Et pour cause, celui-ci avait demandé à bénéficier d’une rupture conventionnelle afin de se reconvertir professionnellement dans le management. Alors qu’en réalité, il projetait de créer une entreprise au sein du même secteur d’activité que son employeur, un projet auquel deux anciens salariés étaient d’ailleurs associés.Saisies du litige, la Cour d’appel de Toulouse ainsi que la Cour de cassation ont relevé que le salarié avait volontairement dissimulé des éléments qu’il savait déterminant pour son employeur. Et ce, afin d’obtenir son consentement à la signature d’une rupture conventionnelle. Elles en ont déduit que le consentement de l’employeur avait été vicié par des manœuvres dolosives du salarié et donc que la rupture conventionnelle devait être annulée. Dès lors, la rupture du contrat de travail, qui était intervenue aux torts du salarié, devait être requalifiée en démission.


À savoir : les juges ont condamné le salarié à verser à l’employeur 20 334 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis due en cas de démission et à lui rembourser l’indemnité de rupture du contrat de travail qu’il avait perçue (18 775 €).

Cassation sociale, 19 juin 2024, n° 23-10817

Article publié le 28 juin 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : Chalirmpoj Pimpisarn / Getty Images

CDD : quel impact sur la période d’essai d’un CDI ?

La durée globale des CDD doit être déduite de la période d’essai du CDI conclu postérieurement avec le même salarié. Et ce, dès lors qu’il a exécuté ces contrats sans discontinuité fonctionnelle.

Lorsqu’il est embauché en contrat à durée indéterminée (CDI), un salarié peut se voir appliquer une période d’essai qui, en principe, ne peut pas dépasser 2, 3 ou 4 mois selon le poste de travail concerné. Sachant que, pour fixer la durée de cette période d’essai, l’employeur doit déduire la durée des contrats à durée déterminée (CDD) qu’il a conclus avec le salarié antérieurement au CDI. À ce titre, la Cour de cassation est venue apporter des précisions quant à la prise en compte de ces CDD dans le calcul de la période d’essai.Dans cette affaire, une salariée avait été engagée en tant qu’infirmière en CDI à la suite de 3 CDD exécutés dans la même société. Ce CDI, conclu à la date du 4 septembre, prévoyait une période d’essai de 2 mois. Quelques jours plus tard, son employeur avait notifié à la salariée la rupture de sa période d’essai avec prise d’effet le 17 septembre. Mais cette dernière avait saisi la justice afin d’obtenir la requalification de la rupture de sa période d’essai en licenciement sans cause réelle et sérieuse.En effet, selon elle, la durée globale des 3 CDD exécutés, à savoir 2 mois et 14 jours, devait être déduite de la durée de la période d’essai prévue dans son CDI (2 mois). Ce qui, en pratique, avait pour effet de réduire cette période à néant.De leur côté, les juges d’appel estimaient que seule la durée du dernier CDD (un mois) devait être prise en compte puisqu’il s’était écoulé un mois entre le début de ce contrat et la fin du CDD précédent. Ce qui portait la fin de la période d’essai de la salariée au 4 octobre. Aussi, pour elle, la rupture de la période d’essai par l’employeur, en date du 17 septembre, était bien régulière.Mais pour la Cour de cassation, c’est bien la durée globale des 3 CDD qui devait être déduite de la période d’essai du CDI. Et pour cause, la salariée avait, au moyen de ces 3 contrats, exercé en qualité d’infirmière dans différents services de soins sans aucune discontinuité fonctionnelle. Peu important le délai d’un mois qui s’était écoulé entre les 2 derniers CDD. Aussi, la période d’essai prévue dans le CDI de la salariée ne pouvait pas s’appliquer et la rupture de cette période par l’employeur devait être analysée comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse. L’affaire est donc renvoyée devant les juges d’appel.Cassation sociale, 19 juin 2024, n° 23-10783

Article publié le 28 juin 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : ljubaphoto / Getty Images

Licenciement injustifié : et si le salarié a moins d’un an d’ancienneté ?

Le salarié licencié sans cause réelle et sérieuse peut prétendre à une indemnité de la part de son employeur. Et ce même s’il cumule moins d’un an d’ancienneté dans l’entreprise.

Lorsque le licenciement d’un salarié n’est pas justifié, c’est-à-dire qu’il est considéré par les juges comme étant sans cause réelle et sérieuse, le salarié est en droit d’obtenir une indemnité de la part de son employeur. Fixé par les juges, le montant de cette indemnité est néanmoins encadré par un barème, dit « barème Macron », en fonction de l’ancienneté du salarié et de la taille de l’entreprise.


Exemple : un salarié présent depuis 4 ans dans une entreprise de moins de 11 salariés a droit à une indemnité comprise entre un mois et 5 mois de salaire brut.

S’agissant des salariés qui cumulent moins d’un an d’ancienneté, si le barème fixe bien une indemnité maximale (un mois de salaire brut), il ne prévoit rien quant à l’indemnité minimale à accorder, se contentant d’indiquer la mention « sans objet ».Aussi la question s’est-elle posée de savoir si le salarié licencié sans cause réelle et sérieuse et qui dispose de moins d’un an d’ancienneté peut être privé d’indemnité.Dans une affaire récente, un salarié licencié pour faute grave avait saisi la justice en vue de contester la rupture de son contrat de travail. Les juges, qui avaient considéré que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse, l’avaient toutefois privé d’indemnité sur la base du barème Macron.Mais pour la Cour de cassation, le salarié qui dispose de moins d’un an d’ancienneté peut, quel que soit l’effectif de l’entreprise, prétendre à une indemnité dès lors qu’il est licencié sans cause réelle et sérieuse. Il appartient alors aux juges d’en fixer le montant dans la limite imposée par le barème, à savoir un mois de salaire brut.Cassation sociale, 12 juin 2024, n° 23-11825

Article publié le 27 juin 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : wichayada suwanachun / Getty Images

Taxe sur les salaires : exit les abandons de créances !

Selon le Conseil d’État, les abandons de créance doivent être exclus des chiffres d’affaires retenus pour le calcul du rapport d’assujettissement à la taxe sur les salaires.

La taxe sur les salaires est due par les employeurs dont le chiffre d’affaires de l’année du paiement des rémunérations (N) n’est pas soumis à la TVA ou par ceux dont le chiffre d’affaires de l’année précédente (N-1) a été soumis à la TVA à hauteur de moins de 90 %.

À noter : la taxe sur les salaires est due, en principe, au taux de 4,25 %. Des taux majorés, fixés à 8,50 % et 13,60 %, pouvant s’appliquer à la fraction des rémunérations individuelles excédant certains montants.

Pour les redevables partiels de la TVA, la base de calcul de la taxe sur les salaires est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l’ensemble des rémunérations le rapport existant entre le chiffre d’affaires qui n’a pas ouvert droit à déduction de la TVA et le chiffre d’affaires total. À ce titre, le Conseil d’État vient de préciser que les abandons de créance ne constituent pas des recettes ou autres produits devant être inclus dans les chiffres d’affaires retenus pour le calcul de ce rapport d’assujettissement à la taxe sur les salaires. Dans cette affaire, une société anonyme (SA) avait fait l’objet d’une vérification de comptabilité, à l’issue de laquelle l’administration fiscale lui avait adressé un redressement de taxe sur les salaires, tenant compte, pour le calcul du rapport d’assujettissement à la taxe sur les salaires, d’abandons de créance que lui avait consentis une autre société. À tort, vient donc de trancher le Conseil d’État. Par conséquent, la SA n’avait pas été soumise à la TVA à hauteur d’une fraction inférieure à 90 % de son chiffre d’affaires. Le redressement de taxe sur les salaires a donc été annulé.

Précision : cette décision pourrait, le cas échéant, être invoquée dans le cadre de réclamations fiscales.

Conseil d’État, 17 juin 2024, n° 474155

Article publié le 27 juin 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : Athanasios Alatsidis

Entreprise en redressement judiciaire : quel délai pour régler ses loyers impayés ?

À la demande du bailleur, une entreprise en redressement judiciaire peut voir son bail résilié en raison de loyers impayés. Mais elle a jusqu’au jour où le juge-commissaire statue en la matière pour régler sa dette et éviter ainsi la résiliation.

Lorsqu’une entreprise fait l’objet d’un redressement judiciaire et que des loyers demeurent impayés, le bailleur est en droit de faire résilier le bail pour ce motif. Mais attention, il doit laisser s’écouler un délai de 3 mois à compter du jugement d’ouverture du redressement judiciaire avant de formuler sa demande de résiliation. Et les loyers impayés doivent être inhérents à une période postérieure à ce jugement. Sachant que si les loyers sont réglés pendant ce délai de 3 mois, la résiliation du bail n’est pas possible. À ce titre, une décision intéressante sur le délai dont dispose l’entreprise en redressement judiciaire pour régler un arriéré de loyers vient d’être rendue par les juges. Dans cette affaire, une entreprise avait été mise en redressement judiciaire par un jugement daté du 28 avril 2020. Le 10 septembre 2020, soit 4 mois et demi plus tard, elle avait procédé au versement des loyers échus pour la période postérieure au jugement d’ouverture du redressement judiciaire. Le jour même, le bailleur avait saisi la justice en vue de faire prononcer la résiliation du bail commercial. Pour lui, les conditions étaient réunies pour qu’il obtienne gain de cause puisque le règlement des loyers impayés était intervenu au-delà du délai de 3 mois.

Jusqu’au jour où le juge-commissaire statue

Mais la Cour de cassation, devant laquelle le litige avait fini par être porté, n’a pas suivi ce raisonnement. Pour elle, le juge-commissaire, saisi par le bailleur d’une demande en résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et charges inhérents à une occupation postérieure au jugement d’ouverture du redressement judiciaire, doit s’assurer, au jour où il statue, que des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d’ouverture demeurent impayés. Or, dans cette affaire, le locataire avait payé sa dette le jour où le juge avait été saisi. La résiliation du bail ne pouvait donc pas être prononcée.

Cassation commerciale, 12 juin 2024, n° 22-24177

Article publié le 27 juin 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : FG Trade / Getty images

Fusion entre SARL : la responsabilité pénale de l’une est transférée à l’autre

En cas de fusion-absorption d’une SARL par une autre, la société absorbante peut être condamnée pour des infractions commises avant la fusion par la SARL absorbée.

Condamnée par un tribunal correctionnel pour avoir commis des infractions au droit de l’urbanisme (construction d’une résidence mobile et d’aménagements de loisir en dehors des emplacements autorisés par le Code de l’urbanisme), une SARL gérant un camping avait été ensuite absorbée par une autre SARL. Et par la suite, cette dernière avait été condamnée (30 000 € d’amende et remise en état des terrains concernés) par la cour d’appel pour les faits commis par la SARL absorbée avant la fusion. Elle avait alors contesté cette décision devant la Cour de cassation. Mais cette dernière a confirmé l’arrêt de la cour d’appel. En effet, elle a affirmé que la SARL absorbante peut être condamnée pénalement pour des infractions commises par la SARL absorbée avant la fusion. À l’appui de sa décision, elle a rappelé que la fusion-absorption n’entraîne pas la liquidation de la société absorbée et que le patrimoine de celle-ci est transmis intégralement à la société absorbante, les associés de la première devenant associés de la seconde. L’activité économique exercée par la société absorbée avait donc été poursuivie par la société absorbante, cette continuité économique et fonctionnelle conduisant à ne pas considérer la société absorbante comme étant distincte de la société absorbée.

Observations : cette position, adoptée par les juges pour une fusion entre SARL, avait déjà été prise par le passé pour une fusion entre sociétés anonymes. Reste à savoir si elle a vocation aussi à s’appliquer à d’autres formes de société…

Cassation criminelle, 22 mai 2024, n° 23-83180

Article publié le 20 juin 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : mrgao / Getty images

Licenciement d’un salarié en raison d’agissements sexistes

Un salarié qui tient des propos à connotation sexuelle, insultants, humiliants et dégradants à l’encontre de deux collègues féminines, peut être licencié par son employeur, même si ce dernier ne l’avait jusqu’alors jamais sanctionné pour des propos similaires.

Le Code du travail interdit les agissements sexistes dans le monde de l’entreprise. Ces faits étant définis comme « tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant ». Et il impose à l’employeur, au titre de son obligation de sécurité envers ses salariés, de faire cesser ces agissements. Dans une affaire récente, un salarié avait été licencié pour avoir tenu, de manière répétée, des propos à connotation sexuelle, insultants, humiliants et dégradants à l’encontre de deux collègues de sexe féminin. Un licenciement que ce dernier avait contesté en justice. La cour d’appel de Grenoble avait estimé que le licenciement du salarié était sans cause réelle et sérieuse car disproportionné par rapport aux faits reprochés. Pour en arriver à cette conclusion, elle avait constaté que le salarié avait déjà tenu ce genre de propos par le passé et que son employeur, bien qu’informé, ne l’avait jamais sanctionné. Cette solution n’a pas été validée par la Cour de cassation. En effet, les propos tenus par le salarié justifiaient que l’employeur, tenu à une obligation de sécurité en matière de santé et de sécurité des salariés, le licencie, quand bien même il aurait fait preuve de tolérance à son égard par le passé.

Cassation sociale, 12 juin 2024, n° 23-14292

Article publié le 19 juin 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : jasonsalmon.com

Procédure collective : les effets limités de la déclaration d’une créance par le débiteur

Le fait que l’entreprise en procédure collective porte une créance à la connaissance du mandataire judiciaire ne signifie pas qu’elle reconnaît le bien-fondé de cette créance. Elle est donc en droit de la contester.

Lorsqu’une entreprise fait l’objet d’une procédure collective (sauvegarde, redressement, liquidation judiciaire), elle doit porter à la connaissance du mandataire judiciaire (ou du liquidateur judiciaire) les sommes dont elle est redevable à l’égard de ses créanciers.

Précision : par cette déclaration, l’entreprise est présumée avoir agi pour le compte du créancier tant que celui-ci n’a pas lui-même déclaré sa créance.

Mais attention, la déclaration d’une créance par l’entreprise ne veut pas dire qu’elle reconnaît le bien-fondé de cette créance. C’est ce que les juges ont précisé dans l’affaire récente suivante. Une société en difficulté placée en sauvegarde avait mentionné une créance impayée d’un fournisseur dans la liste des créanciers remise au mandataire judiciaire. Par la suite, ce fournisseur avait déclaré cette créance dans le cadre de la procédure de sauvegarde mais pour un montant supérieur à celui indiqué par l’entreprise. Cette dernière avait alors contesté ce montant. De son côté, le fournisseur avait fait valoir que l’entreprise n’était plus en droit de contester une créance qu’elle avait porté à la connaissance du mandataire judiciaire. Mais les juges n’ont pas donné raison au fournisseur. Pour eux, le fait que l’entreprise débitrice ait porté une créance à la connaissance du mandataire judiciaire fait seulement présumer la déclaration de cette créance par son titulaire, dans la limite du contenu de l’information qu’elle donne au mandataire judiciaire. Il ne vaut pas reconnaissance par l’entreprise du bien-fondé de cette créance. Cette dernière est donc en droit de la contester ensuite. Il revient alors au créancier, en l’occurrence au fournisseur, de prouver l’existence et le montant de sa créance.

Cassation commerciale, 23 mai 2024, n° 23-12133 Cassation commerciale, 23 mai 2024, n° 23-12134

Article publié le 17 juin 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : © 2017 Willie B. Thomas