Divorce : une créance entre époux est-elle prescriptible ?

Lorsqu’une créance entre époux naît du divorce d’un couple marié, celle-ci se prescrit par 5 ans à compter de la date à laquelle le divorce a acquis force de chose jugée.

Un couple marié sous le régime de la séparation de biens avait divorcé le 1er mars 2012. Après le prononcé du divorce, le notaire avait procédé à la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux. Il leur avait proposé, le 29 juin 2018, un projet d’acte de partage faisant apparaître une somme de 850 968,92 € due par l’ex-mari à son ex-femme au titre des créances entre époux.

Précision : une créance entre époux est une sorte « d’indemnité » destinée à compenser et à corriger, après la dissolution du régime matrimonial, les transferts de valeur survenus dans le cours du fonctionnement du régime entre les masses de biens appartenant à chacun des époux (dans le cadre d’un régime de séparation de biens).

Par une ordonnance du juge datant de 4 juillet 2018, l’ex-épouse avait été autorisée à effectuer, par le biais d’un huissier de justice, une saisie conservatoire de 900 000 € sur les comptes bancaires au titre de la créance entre époux. À son tour, l’ex-mari avait demandé au juge d’ordonner la mainlevée de cette saisie au motif que la créance entre époux était prescrite. Saisis du litige, les juges de la Cour de cassation ont répondu qu’une créance entre époux se prescrit selon le délai quinquennal de droit commun. En outre, ils ont souligné que le point de départ de la prescription commence à courir lorsque le divorce a acquis force de chose jugée (jugement qui n’est susceptible d’aucun recours). Ainsi, l’ex-épouse était bien en droit de saisir les comptes bancaires pour que la créance entre époux puisse être honorée.

Cassation civile 1re, 18 mai 2022, n° 20-20725

Article publié le 10 juin 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Logement étudiant : acheter ou louer ?

Sur 78 des 100 plus grandes villes étudiantes françaises, il est plus intéressant d’acheter un logement de 25 m pour son enfant plutôt que de le louer si celui-ci poursuit ses études jusqu’au grade master (5 ans) dans la même ville.

Lorsque les enfants s’apprêtent à quitter le cocon familial pour réaliser leurs études supérieures, certains parents ont pu se poser la question de l’opportunité d’acheter ou de louer un appartement. Un sujet dont s’est emparé Meilleurs agents en publiant une étude. Cette étude souligne que si, de prime abord, il est vrai que la location est plus flexible et est moins compliquée à mettre en œuvre que l’achat d’un bien, il faut toutefois relativiser cet a priori. En effet, la location peut devenir moins rentable que l’achat en fonction de sa durée. Au-delà d’un certain nombre d’années, le montant dépensé en loyers est supérieur aux frais liés à l’achat : durée pour laquelle ces frais seront amortis et pour laquelle l’achat devient plus intéressant que la location. En pratique, les auteurs de l’étude ont passé en revue les 100 plus grandes villes étudiantes françaises. Et pour 78 d’entre elles, il est plus intéressant d’acheter un logement de 25 m² pour son enfant plutôt que de le louer si celui-ci poursuit ses études jusqu’au grade master (5 ans) dans la même ville. Ce chiffre est réduit à 23 villes si l’étudiant s’arrête au grade de la licence (3 ans).Dans le détail, la ville de Mulhouse se hisse sur la première marche du podium avec une durée d’amortissement de seulement 1 an et 5 mois. Pour un studio de 25 m² dans cette ville, il faut compter environ 32 400 € (frais d’agence et de notaire inclus) à l’achat. En location, le même bien oblige à régler un loyer mensuel de 301,30 € (charges, et APL1 comprises). Les 4 autres villes en tête de classement (au sein des villes comptant plus de 50 000 habitants, dont plus de 10 000 étudiants) sont Roubaix (2 ans et 3 mois), Saint-Étienne (2 ans et 4 mois), Évry (2 ans et 7 mois) et Metz (3 ans). Attention toutefois, il est des cas où l’achat n’est pas recommandé, comme à Versailles où il faut 8 ans et 5 mois pour amortir un studio de 25 m² acquis pour 242 423 €. À noter que dans les 11 plus grandes métropoles françaises, seules Montpellier, Marseille et Lille incitent à se pencher sur l’achat d’un logement. Pour les autres (Bordeaux, Lyon, Nantes, Nice, Paris, Rennes, Strasbourg, Toulouse), la location reste le plus intéressant. Par exemple, la durée d’amortissement à Paris est de 6 ans et 10 mois et à Lyon de 6 ans et 7 mois !

Article publié le 20 mai 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Succession : calcul de l’indemnité de rapport en cas d’occupation gratuite d’un logement

En cas d’occupation gratuite par l’un des nus-propriétaires d’un logement en démembrement de propriété, le montant de l’indemnité de rapport à la succession doit être calculé sur la base des loyers qui auraient dû être payés si le bien avait été loué, minorés des frais d’entretien incombant à l’usufruitier.

Dans une affaire récente, une femme, décédée le 8 février 2015, avait laissé pour lui succéder ses deux fils. Fait important, l’un des deux fils avait occupé gratuitement, de janvier 1971 jusqu’au décès de sa mère, une partie d’un bien immobilier familial. La nue-propriété de ce bien appartenant aux deux fils. Celui qui n’occupait pas le bien immobilier avait assigné son frère en justice afin de tenir compte, à la succession de leur mère, de cet avantage. Saisis du litige, les juges de la cour d’appel avaient estimé, en effet, que l’un des fils avait bénéficié d’un avantage indirect résultant de cette occupation gratuite et l’avait condamné à rapporter à la succession de leur mère la somme de 261 536 €. Mécontent de la décision, le frère avait formé un pourvoi devant la Cour de cassation. Pour sa défense, il avait fait valoir qu’il avait dû réaliser des travaux en 1971 et en 1972 car le bien n’était pas en état d’être mis en location. En outre, il avait souligné que le calcul de l’avantage qu’il était condamné à rapporter à la succession ne pouvait pas excéder l’appauvrissement qu’avait subi son frère. Or la cour d’appel avait calculé le montant de cet avantage en déduisant le montant des travaux payés pour le compte de sa mère usufruitière du bien (c’est-à-dire les réparations d’entretien) des loyers qu’elle aurait pu percevoir. Mais de son côté, il avait estimé qu’il était plus raisonnable de tenir compte de l’ensemble des réparations incombant à celle-ci en sa qualité de bailleresse, ce qui incluait les grosses réparations.

Réponse de la Cour de cassation : le fils n’avait pas démontré que l’immeuble n’était pas, en 1971, en état d’être mis en location. De plus, elle a relevé que la mère avait consenti à son fils, avec une intention libérale, l’usage gratuit de la partie d’une maison dont elle avait conservé l’usufruit et dont celui-ci était nu-propriétaire avec son frère. Ainsi, le fils, qui cumulait les devoirs d’un locataire, auquel sa position d’occupant l’assimilait, et les obligations issues de la nue-propriété de l’immeuble, ne pouvait pas réclamer à l’usufruitière (la mère) le remboursement des travaux qui, tout en constituant des réparations autres que locatives mises à la charge du bailleur, relevaient du domaine des grosses réparations imputées au nu-propriétaire. De ce fait, le fils était bien tenu d’une indemnité de rapport égale aux loyers qui auraient dû être payés si les lieux avaient été loués, après déduction du seul montant des réparations et frais d’entretien incombant normalement à l’usufruitière.

Cassation civile 1re, 2 mars 2022, n° 20-21641

Article publié le 18 mai 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Composition du patrimoine professionnel de l’entrepreneur individuel

Dans le cadre du nouveau statut de l’entrepreneur individuel, un bien appartenant en commun aux époux pourra-t-il intégrer le patrimoine professionnel d’un entrepreneur individuel ?

Le nouveau statut de l’entrepreneur individuel, qui entrera bientôt en vigueur, se caractérise par la séparation de son patrimoine professionnel et de son patrimoine personnel. Le premier sera composé des biens « utiles » à l’activité et le second des autres biens. Sachant que seul le patrimoine professionnel pourra être saisi par les créanciers professionnels de l’entrepreneur individuel, ses autres biens étant à l’abri des poursuites de ces derniers. Dès lors qu’ils seront utiles à l’activité de celui qui est entrepreneur individuel, les biens communs des époux pourront, a priori, faire partie du patrimoine professionnel de celui-ci. Et ce sans que son conjoint doive donner son accord ou même en soit informé. Mais cette affirmation devra toutefois être confirmée, par exemple par le décret à paraître qui fixera les modalités d’application de ce nouveau statut.

Article publié le 16 avril 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Consultation d’un relevé de carrière

À quelques années de la retraite, je souhaite consulter mon relevé de carrière pour pouvoir m’organiser. Comment puis-je y avoir accès ?

Rien de plus simple ! Vous devez vous connecter sur las-suranceretraite.fr (onglet Mes démarches en ligne). Pour vous identifier, vous pouvez utiliser votre numéro de Sécurité sociale ou France Connect. N’hésitez pas à passer en revue les informations présentes sur votre relevé de carrière pour vous assurer que tous vos droits ont bien été pris en compte. Si tel n’est pas le cas, rapprochez-vous de votre caisse de retraite. Par ailleurs, sachez que ce site internet vous permet d’obtenir d’autres informations : âge de départ à la retraite, nombre de trimestres acquis et surtout une estimation du montant de votre future pension de retraite.

Article publié le 13 avril 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Assurance-vie : la désignation de bénéficiaires par voie testamentaire est valable

Un écrit, s’analysant comme un testament olographe, peut permettre de désigner des bénéficiaires d’un contrat d’assurance-vie. Cette forme de désignation étant valable quand bien même l’assureur n’en a pas eu connaissance avant le décès de l’assuré.

Le souscripteur d’une assurance-vie est libre de désigner le(s) bénéficiaire(s) des capitaux en cas de décès. Cette désignation pouvant être effectuée directement dans la police d’assurance, via un courrier simple adressé à son assureur ou encore par le biais d’un testament. Mais dans ce dernier cas, faut-il que l’assureur en ait connaissance avant le décès de l’assuré ? Une question à laquelle la Cour de cassation a dû répondre. Dans une affaire, le souscripteur d’une assurance-vie avait désigné dans la clause bénéficiaire son fils ou, à défaut, son épouse. Il avait ensuite fait part à l’assureur de la modification de la clause bénéficiaire en faveur de son épouse. Plus tard, en instance de divorce, le souscripteur avait indiqué dans un écrit daté et signé (mais non envoyé à l’assureur) que le capital décès de son assurance-vie devait revenir à son fils. Au décès du souscripteur, le capital décès avait été versé à l’épouse. Face à cette situation, le fils l’avait assigné en justice en restitution du capital perçu. Pour faire valoir ses droits, il avait expliqué que son père avait, au travers de cet écrit, exprimé l’intention de le désigner comme unique bénéficiaire de son contrat d’assurance-vie. Amenés à se prononcer sur ce litige, les juges de la Cour de cassation ont rappelé que la désignation ou la substitution du bénéficiaire du contrat d’assurance-vie peut être effectuée par l’assuré jusqu’à son décès. Et qu’il n’est pas nécessaire, pour sa validité, que cette désignation soit portée à la connaissance de l’assureur lorsqu’elle est réalisée par voie testamentaire. En outre, les juges ont souligné que l’écrit du défunt pouvait s’analyser en un testament olographe. Ainsi, le capital décès de son assurance-vie devait bien revenir à son fils.

Cassation civile 2e, 10 mars 2022, n° 20-19655

Article publié le 13 avril 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Une réforme pour le régime de l’adoption

L’adoption plénière d’un enfant est désormais ouverte à tous les couples, qu’ils soient mariés ou non.

Une loi du 22 février 2022 a réformé le régime de l’adoption. Cette loi vise à rendre plus d’enfants « adoptables », sécurise les parcours pour garantir le respect des droits des enfants et simplifie les démarches pour les parents adoptants. Tour d’horizon des principales mesures introduites. Nouveauté majeure : les couples liés par un pacte civil de solidarité (Pacs) et les concubins peuvent désormais adopter (adoption plénière) un enfant. Ce qui n’était pas le cas auparavant, car seuls les couples mariés et les célibataires pouvaient adopter. En outre, certaines conditions pour pouvoir prétendre à l’adoption ont été assouplies. Ainsi, d’une part, la durée de vie commune exigée du couple candidat à l’adoption passe de 2 ans à 1 an. Et d’autre part, l’âge minimal pour adopter passe de 28 à 26 ans. En revanche, une nouvelle condition pour la délivrance de l’agrément en vue de l’adoption est instaurée : l’écart d’âge entre les adoptants et l’adopté ne peut être supérieur à 50 ans (sauf en cas d’adoption de l’enfant du couple). Toujours dans les conditions liées à l’âge, la loi offre la possibilité pour les enfants de plus de 15 ans d’être adoptés de façon plénière, en particulier par le conjoint de l’un des parents, et pour les pupilles de l’État lorsqu’ils sont reconnus délaissés tardivement. Cette possibilité d’adoption plénière est étendue jusqu’au 21 ans de l’enfant.

À noter : la loi introduit la possibilité pour les couples de femmes ayant eu recours à une procréation médicalement assistée (PMA) à l’étranger d’adopter l’enfant, même après une séparation et même pour la mère non biologique.

Loi n° 2022-219 du 21 février 2022, JO du 22

Article publié le 23 mars 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Un nouvel outil pour identifier les successions vacantes

Le site www.impots.gouv.fr s’étoffe et offre un nouveau service de recherche des successions vacantes.

Une succession peut être déclarée vacante dans trois situations : lorsqu’il n’y a pas d’héritiers connus ; lorsque les héritiers ont renoncé à la succession ; lorsque les héritiers n’ont pas opté (accepté ou renoncé) dans le délai de 6 mois après l’ouverture de la succession. Cette déclaration de vacance est prononcée par le tribunal judiciaire du lieu d’ouverture de la succession à la demande d’un créancier, d’un notaire, de toute personne qui y a un intérêt ou du ministère public. Étant précisé que la gestion du patrimoine du défunt est alors confiée au service du Domaine, service rattaché à l’administration fiscale. D’après les derniers chiffres publiés par le fisc, ce sont 13 000 successions vacantes qui sont confiées chaque année au service du Domaine. Des successions qui représentent plus de 200 M€ d’actifs.

Afin de répondre aux principales questions que les créanciers, les héritiers, les tribunaux judiciaires, les notaires ou les avocats peuvent se poser à propos des successions vacantes (intervention du Domaine, service territorialement compétent, informations des héritiers…), le site www.impots.gouv.fr propose, depuis le 15 mars 2022, un nouveau service qui informe sur l’ouverture d’une succession vacante et sur son degré d’avancement. Cette recherche s’effectuant à partir des renseignements disponibles sur l’acte de décès du défunt (prénom et nom du défunt, date de décès, code postal du domicile du défunt). En cas de résultat positif, un héritier peut, par exemple, entamer des démarches pour faire valoir ses droits successoraux.

Selon l’administration fiscale, ce service est amené à évoluer. Ainsi, prochainement, les créanciers pourront produire de manière dématérialisée et sécurisée leurs créances et les héritiers revendiquer une succession.

Service de recherche de successions vacantes

Article publié le 17 mars 2022 – © Les Echos Publishing 2022

Le changement de régime matrimonial en présence d’enfants non communs

Omettre l’existence d’enfants non communs lors d’un changement de régime matrimonial ne constitue pas une fraude justifiant la nullité de la convention matrimoniale.

Un couple marié peut changer de régime matrimonial quand il le souhaite. Pour cela, il doit s’adresser à un notaire qui se chargera d’établir une nouvelle convention matrimoniale. Avant d’être effectif, ce changement de régime doit être porté à la connaissance des créanciers du couple ainsi qu’à leurs enfants majeurs. Ces derniers pouvant s’opposer, le cas échéant, à ce changement. Mais est-ce que ce changement de régime matrimonial peut être entaché de nullité lorsque l’un des époux dissimule l’existence d’enfants nés d’un précédent mariage ? Une question à laquelle ont été récemment confrontés les juges de la Cour de cassation. Dans cette affaire, un couple marié sans contrat de mariage avait décidé d’adopter un régime de séparation de biens par une convention homologuée par le juge. Par la suite, le mari était décédé en laissant pour lui succéder sa femme ainsi que ses deux enfants issus d’un premier mariage. En apprenant ce changement de régime matrimonial, ces deux enfants avaient assigné en justice leur belle-mère en nullité pour fraude de la convention homologuée. Les enfants estimant que cette convention, qui omettait leur existence, visait à les priver de leurs droits successoraux et à enrichir leur belle-mère au détriment de leur père. Saisie du litige, la Cour de cassation a rejeté l’action des enfants. En effet, les juges ont constaté que la dissimulation de l’existence des enfants de l’un des époux lors de l’adoption d’un régime de séparation de biens, qui n’induit aucun avantage pour l’un ou l’autre des époux, n’est pas en elle-même constitutive d’une fraude. Cette omission peut en effet résulter d’une simple négligence sans volonté de tromper ni de nuire. En outre, les juges ont estimé que la mention portée dans la requête en homologation (de la non-présence d’enfants) peut être comprise en ce sens que les époux n’avaient pas d’enfant commun. En vertu de tous ces éléments, les juges ont en déduit que les enfants ne rapportaient pas la preuve d’une fraude à leurs droits.

Cassation civile 1re, 26 janvier 2022, n° 20-18726

Article publié le 11 mars 2022 – © Les Echos Publishing 2022