La taxe foncière a augmenté de 32,9 % en 10 ans

L’Union nationale des propriétaires immobiliers dénonce une hausse importante de la taxe foncière et appelle les pouvoirs publics à une réforme de la fiscalité locale.

L’Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI) a présenté les résultats de sa 18e édition de l’Observatoire national des taxes foncières. Cette étude nous apprend qu’en l’espace de 10 ans (2013-2023), la taxe foncière a bondi de 32,9 % alors même que les loyers n’ont progressé que de 7,7 %. Autrement dit, la taxe foncière a progressé 4 fois plus rapidement que les loyers.En raison de la suppression de la taxe d’habitation, les propriétaires sont donc devenus, selon l’UNPI, la principale cible des hausses de taux et des taxes additionnelles. Parmi elles, la taxe GEMAPI (gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations), créée en 2015, est désormais prélevée dans trois quarts des communes. D’autres taxes, comme la taxe spéciale d’équipement, se multiplient également. C’est le cas de la taxe « ligne à grande vitesse », imposée depuis 2023 dans 2 340 communes du Sud-Ouest. Une multiplication des taxes qui interroge sur les incohérences de la fiscalité des collectivités locales, désormais hors de contrôle.

Les propositions de l’UNPI

Par ailleurs, l’UNPI a émis une série de propositions visant à réformer cette fiscalité qu’elle juge injuste. Elle propose notamment :
– une réforme globale de la fiscalité locale et le remplacement de la taxe foncière par une « taxe usager ». Cette nouvelle taxe serait payée par l’ensemble des habitants, qu’ils soient propriétaires ou locataires, et serait ajustable en fonction de divers critères, tels que les revenus, la contribution sociale (rénovation énergétique, mise à disposition de logements) ou encore le statut de propriétaire ou non ;
– que les propriétaires bailleurs puissent récupérer une partie de la taxe foncière auprès de leurs locataires, à l’instar de ce qui se pratique déjà dans les baux commerciaux. Les locataires, tout comme les propriétaires occupants, bénéficiant des services publics et équipements collectifs financés par la collectivité, il est donc logique qu’ils participent à ces coûts ;
– de réformer l’indexation des valeurs locatives, qui constituent l’assiette de la taxe foncière. Actuellement indexées sur l’inflation (IPCH), ces valeurs devraient être alignées sur l’indice des loyers d’habitation (ILH) ;
– la mise en place d’un dégrèvement de taxe foncière pour les propriétaires situés dans des zones où les loyers sont encadrés par un arrêté préfectoral ;
– que le dégrèvement de taxe foncière soit automatiquement accordé aux propriétaires réalisant des travaux de rénovation énergétique significatifs.

Article publié le 21 octobre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : © richard drury

La location meublée dans le viseur du Conseil des prélèvements obligatoires

Le Conseil des prélèvements obligatoires souhaite un alignement des régimes fiscaux de la location meublée et de la location nue.

Nouveau coup de semonce pour le régime de la location meublée ! Après avoir été l’une des cibles du projet de loi de finances pour 2025 présenté le 10 octobre dernier, ce régime fiscal est de nouveau sous les feux des projecteurs. En effet, le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), organisme rattaché à la Cour des comptes, a formulé récemment plusieurs recommandations visant à aménager les règles du jeu en la matière. Première recommandation : réintégrer les amortissements admis en déduction en cours d’exploitation dans l’assiette de la plus-value imposable réalisée lors de la cession de biens loués en régime LMNP. Une recommandation déjà à l’étude puisqu’elle fait partie intégrante du texte initial du projet de loi de finances pour 2025. Selon le CPO, cet avantage fiscal génère les plus fortes distorsions en faveur de la location meublée et de courte durée. Il incite donc à supprimer ce dispositif qui ne trouve pas de justifications. La perte de valeur d’un bien immobilier du fait même de la location ne se distingue pas de la location nue. Seconde recommandation du CPO : aligner les plafonds de revenus des régimes micro-BIC et micro-foncier autour d’un seuil de 30 000 € (au-delà, le contribuable « basculerait » automatiquement dans le régime réel) et fixer l’abattement forfaitaire applicable dans ces deux régimes à 30 %. Affaire à suivre, donc…

Conseil des prélèvements obligatoires – Vers un rapprochement des régimes fiscaux de la location meublée et de la location nue, octobre 2024

Article publié le 17 octobre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : Avatar_023

Que pensez-vous du capital-investissement ?

Selon un sondage réalisé par Bpifrance et France invest, les Français de moins de 40 ans, disposant d’un patrimoine financier de 10 000 €, sont les plus enclins à investir en capital-investissement.

Après avoir annoncé le lancement de son fonds « Bpifrance entreprises 3 », Bpifrance a dévoilé récemment les résultats de son dernier baromètre sur la perception du capital-investissement par les Français détenteurs d’un patrimoine financier de plus de 10 000 €. Selon ce sondage, les particuliers âgés de moins de 40 ans sont ceux qui ont un comportement financier le plus entreprenant et qui sont les plus enclins à faire appel au capital-investissement. En effet, parmi eux, 72 % s’intéressent aux sujets liés à la gestion financière (contre 57 % pour l’ensemble de l’échantillon) et plus de la moitié (56 %) envisage de souscrire à un placement financier cette année, alors qu’ils sont à peine plus d’un tiers toutes générations confondues. Interrogés sur le « non coté », 81 % des personnes de moins de 40 ans en ont une bonne image (contre 69 % pour l’ensemble de l’échantillon), 23 % ont déjà investi (contre 10 %) et près de 50 % se dit prête à souscrire un produit de cette classe d’actifs (contre 30 %). Autre question qui leur a été posée : quelles sont leurs critères pour choisir un placement financier ? La réponse est claire : le risque de perte en capital (93 % jugent ce critère important), le niveau de rendement attendu (93 %) ainsi que les questions liées à la gestion : simplicité (92 %) et frais (91 %). La transparence du produit est également un critère important (92 %) pour les épargnants. À noter également que les résultats du sondage montrent qu’il y a une corrélation entre la connaissance de la classe d’actifs et l’intention d’y investir. En effet, globalement, 30 % des épargnants se disent prêts à investir en capital-investissement. Toutefois, ce pourcentage grimpe à 64 % parmi ceux qui connaissent bien cette classe d’actifs.

Article publié le 16 octobre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : Ilona Shorokhova / Getty images

Du nouveau pour le dispositif Censi-Bouvard

Le bénéfice de la réduction d’impôt sur le revenu « Censi-Bouvard » est désormais subordonné à l’achèvement du logement ou des travaux avant une date limite.

Une réduction d’impôt sur le revenu est accordée aux particuliers qui ont acquis, directement, au plus tard le 31 décembre 2022, au sein de certaines résidences de services pour personnes âgées, dépendantes ou handicapées, ou pour étudiants, afin de le louer meublé :
– un logement neuf ou en l’état futur d’achèvement ;
– un logement ancien, achevé depuis au moins 15 ans, et ayant fait l’objet ou faisant l’objet de travaux de réhabilitation ou de rénovation.

Rappel : cet avantage fiscal est réservé aux contribuables qui avaient la qualité de loueurs en meublé non professionnels (LMNP) lors de l’acquisition du logement.

Baptisé « Censi-Bouvard », ce dispositif a fait l’objet d’un bornage par la loi de finances pour 2024, récemment précisé par l’administration fiscale.Ainsi, désormais, pour bénéficier de la réduction d’impôt, l’achèvement des travaux ou du logement doit intervenir au plus tard le 1er juillet 2025. Et s’il a été acquis après le 1er juillet 2021, le logement doit être achevé dans un délai de 4 ans à compter de cette acquisition.

Important : répartie sur 9 ans par parts égales, la réduction d’impôt est accordée une fois le logement ou les travaux achevés.

BOI-IR-RICI-220-10-10 du 11 juillet 2024Art. 110, loi n° 2023-1322 du 29 décembre 2023, JO du 30

Article publié le 14 octobre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : Westend61 / Getty images

Projet de loi de finances pour 2025 : les mesures visant les particuliers

Le projet de loi de finances pour 2025 prévoit notamment un dispositif de contribution différentielle sur les hauts revenus.

Le projet de loi de finances pour 2025 a enfin été dévoilé par le nouveau gouvernement Barnier. Concocté en une quinzaine de jours, ce projet de budget a pour but principal de redresser les finances publiques. Selon les derniers chiffres avancés par l’exécutif, le déficit devrait atteindre 6,1 % en 2024. Il y a donc urgence à agir ! Afin de freiner ce dérapage des comptes publics, le gouvernement propose une série de mesures pour parvenir à ramener le déficit de 5 % du PIB en 2025 et pour passer sous la barre des 3 % à l’horizon 2029. Pour tenter d’atteindre ces objectifs, le gouvernement table sur une baisse de la dépense publique, qui représentera 40 Md€, et sur une hausse des impôts, notamment par l’instauration d’une contribution fiscale exceptionnelle à hauteur de 20 Md€. Voici un tour d’horizon des principales mesures qui pourraient avoir un impact sur le montant de votre facture fiscale.

Revalorisation du barème de l’impôt sur le revenu

Afin de protéger le pouvoir d’achat des Français, le barème de l’impôt sur le revenu devrait être indexé sur l’inflation. Cette mesure, dont le coût est évalué à 3,7 Md€, permettra d’éviter à près de 530 000 foyers d’entrer dans le champ de l’impôt sur le revenu. Ainsi, les limites des différentes tranches du barème de l’impôt sur le revenu, qui sera liquidé en 2025, devraient, sauf surprise de fin d’année, être revalorisées autour de 2 %. Le barème applicable aux revenus de 2024 pourrait donc être le suivant :

IMPOSITION DES REVENUS 2024
Fraction du revenu imposable (une part) Taux d’imposition
Jusqu’à 11 520 € 0 %
De 11 521 € à 29 373 € 11 %
De 29 374 € à 83 988 € 30 %
De 83 989 € à 180 648 € 41 %
Plus de 180 648 € 45 %

Le texte prévoit également, pour les revenus perçus ou réalisés à compter du 1er janvier 2025, d’ajuster les limites des tranches de revenus des grilles de taux par défaut du prélèvement à la source en fonction de l’évolution du barème de l’impôt sur le revenu. Ces limites seraient donc revalorisées dans la même proportion que le barème.

Instauration d’une contribution différentielle sur les très hauts revenus

Pour contribuer au redressement des comptes publics, le projet de loi de finances pour 2025 instaure une contribution temporaire permettant d’assurer une imposition minimale de 20 % des plus hauts revenus. Ainsi, dès lors que le taux moyen d’imposition au titre de l’impôt sur le revenu et de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR) serait inférieur à 20 % du revenu fiscal de référence (RFR), une contribution différentielle serait appliquée pour atteindre ce niveau d’imposition. Cette contribution s’appliquerait, parmi les foyers assujettis à la CEHR, à savoir ceux dont le RFR dépasserait 250 000 € pour un célibataire et 500 000 € pour un couple, à ceux dont le taux moyen d’imposition est inférieur à 20 %.

Précision : afin d’atténuer l’effet de seuil lié à l’entrée dans le champ de cette nouvelle contribution, un mécanisme de décote est prévu.

Cette contribution, dont le rendement est estimé à 2 Md€, s’appliquerait à compter de l’imposition des revenus de 2024 et jusqu’à l’imposition des revenus de 2026 afin d’accompagner la trajectoire de redressement des comptes publics.

Durcissement de l’imposition de la plus-value de cession d’un logement loué meublé

Dans le cadre de la location meublée non professionnelle (LMNP), les contribuables peuvent, sous certaines conditions, déduire de leurs recettes locatives imposables les amortissements relatifs au logement loué, sans que ces amortissements ne soient pris en compte dans le calcul de la plus-value lors de la cession du logement. Un avantage fiscal qui, selon l’exécutif, conduirait à inciter les bailleurs à favoriser la location meublée de courte durée et à vocation touristique au détriment de la location nue. Afin d’assurer une plus grande égalité de traitement entre les loueurs professionnels et non professionnels, le projet de loi de finances prévoit que les amortissements déduits pendant la période de location d’un bien meublé soient déduits de son prix d’acquisition pour le calcul de la plus-value immobilière de cession. Ces dispositions s’appliqueraient aux plus-values réalisées à raison des cessions intervenant à compter du 1er janvier 2025.

Diminution des crédits affectés à MaPrimeRénov’

Afin d’aider les particuliers à entreprendre des travaux (d’ampleur ou parcours par gestes) visant à réduire la consommation d’énergie de leur logement, les pouvoirs publics octroient, sous conditions, des aides financières dans le cadre du fameux dispositif MaPrimeRénov’. Cette aide s’adresse notamment aux propriétaires occupants leur logement à titre de résidence principale ainsi qu’aux propriétaires bailleurs. Pour 2025, pas de changement notable pour ce dispositif, sauf pour budget qui va subir un coup de rabot d’environ 1 Md€ par rapport à 2024.

Projet de loi de finances pour 2025, n° 324, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 10 octobre 2024

Article publié le 11 octobre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : blackCAT / Getty images

Estimer la valeur d’un bien immobilier

Je projette de vendre un de mes biens immobiliers. Pour m’aider à fixer un prix de vente, comment puis-je consulter l’historique des transactions immobilières dans le secteur où se situe mon bien ?

Grâce au site internet explore.data.gouv.fr, vous pouvez accéder à une base de données (« Demande de valeurs foncières ») qui vous permet de suivre l’évolution des prix de l’immobilier et d’estimer la valeur d’un bien en consultant les informations disponibles pour les cinq dernières années. Les données présentes sur la carte interactive concernent notamment le prix et la date de la vente, le descriptif du bien (type, nombre de pièces et surface) et le prix de vente médian au m² sur un secteur donné. Une base de données qui fait l’objet d’une mise à jour semestrielle, en avril et en octobre.

Article publié le 09 octobre 2024 – © Les Echos Publishing 2024

Une meilleure régulation des crypto-actifs d’ici la fin de l’année

Les mesures prévues par le règlement européen sur les marchés de crypto-actifs entreront en vigueur le 30 décembre 2024.

Connus notamment pour leur valorisation spectaculaire, les crypto-actifs sont « des monnaies » électroniques émises et contrôlées non pas par une banque centrale comme l’euro, le dollar ou le yen, mais par un algorithme présent sur un réseau informatique décentralisé, la blockchain (composé d’une multitude d’ordinateurs reliés les uns aux autres sans serveur).Afin de pouvoir mieux les contrôler, l’Union européenne s’est dotée d’un arsenal juridique. Ainsi, publié au Journal officiel de l’Union européenne en juin 2023, le règlement européen MiCA (Markets in Crypto-Assets) sera applicable à partir du 30 décembre 2024. À compter de cette date, un cadre harmonisé européen viendra remplacer les cadres nationaux mis en place.

Une définition des crypto-actifs

Dans le détail, ce règlement couvre à la fois l’offre et l’admission aux négociations de crypto-actifs, (y compris de stablecoins) et la fourniture de services sur ces crypto-actifs. Il donne notamment une définition plus précise des crypto-actifs. Il s’agit « d’une représentation numérique d’une valeur ou d’un droit pouvant être transférée et stockée de manière électronique, au moyen de la technologie des registres distribués ou d’une technologie similaire ». En se basant sur cette définition, sont exclus :- les crypto-actifs qui répondent à la qualification d’instruments financiers. Ceux-ci sont soumis à la réglementation existante encadrant les instruments financiers. Les critères permettant de qualifier un crypto-actif en tant qu’instrument financier sont précisés par des orientations publiées par l’ESMA ;- d’autres produits tels que les dépôts, dépôts structurés, fonds, positions de titrisation, produits d’assurance, d’assurance-vie et de réassurance, ou certains produits de retraite, entrant dans le champ d’application des règlementations européennes existantes ;- les activités d’emprunt ou de prêt de crypto-actifs pour lesquelles on se réfère à l’application des règles nationales des Etats membres à ce sujet. En outre, le texte contient un dispositif d’encadrement des abus de marché sur crypto-actifs qui sera applicable à toute personne impliquée dans la réalisation de transactions sur ces actifs. À ce titre, le règlement prévoit des règles pour interdire certains comportements, notamment les manquements d’initiés, la divulgation d’informations privilégiées et les manipulations de marchés. Ces dispositions ne s’appliquent pas uniquement aux opérations sur les plates-formes de négociation mais à toutes les transactions sur crypto-actifs que ce soit sur ou en dehors d’une plate-forme de négociation. L’ensemble des acteurs qui organisent ou exécutent à titre professionnel des transactions portant sur des crypto-actifs doivent disposer de dispositifs pour prévenir et détecter les abus de marché.

Un agrément obligatoire

Autre apport de ce texte, un agrément sera obligatoire pour les prestataires fournissant des services sur crypto-actifs (PSCA). Un agrément dont les exigences sont proches de l’agrément optionnel du régime français. Les prestataires qui seront agréés en application du règlement MiCA pourront bénéficier du passeport européen et fournir leurs services dans tous les pays de l’UE.

À noter : une directive européenne visant à renforcer la coopération entre les autorités fiscales nationales (DAC8) doit entrer en vigueur courant 2026. Cette règlementation obligera notamment les prestataires de services sur actifs numériques à déclarer tous les mouvements sur les « wallets » de leurs cats à l’administration fiscale du pays où ils sont établis.

Règlement (UE) 2023/1114 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les marchés de crypto-actifs, JO du 9 juin 2023

Article publié le 09 octobre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : BlackJack3D / Getty images

La Cour des comptes se penche sur la fiscalité successorale

Dans un rapport récent, la Cour des comptes propose une réduction des avantages fiscaux dérogatoires (par exemple, le Pacte Dutreil et l’assurance-vie) au profit d’une baisse ciblée des taux d’imposition en veillant à maintenir le produit global de l’impôt.

Commandé en septembre 2023 par le président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, la Cour des comptes a rendu récemment son rapport sur les droits de succession. Créés en France en 1791, les droits de succession font partie, avec les droits de donation, des droits de mutation à titre gratuit (DMTG). Ils imposent la part d’héritage nette reçue par chaque héritier, en fonction de son lien de parenté avec le défunt. Souvent méconnus dans leur fonctionnement, les droits de succession sont impopulaires auprès des Français. En 2017, 87 % des Français souhaitaient que cette taxation diminue tandis que 9 % d’entre eux seulement souhaitaient qu’elle augmente. Mal acceptée, l’imposition des héritages est, par ailleurs, mal connue : 60 % des Français estimaient en 2017 que le taux moyen effectif d’imposition des transmissions en ligne directe était supérieur ou égal à 10 %, alors que ce taux était en réalité compris entre 5 et 10 %. Pourtant jugés favorablement par la théorie économique (les recettes des droits de succession ont atteint 16,6 Md€ en 2023), les droits de succession font régulièrement l’objet de propositions de réformes qui cherchent alternativement à les augmenter ou à les diminuer, voire à les supprimer totalement.

Certains dispositifs pointés du doigt

Impôt mal accepté, les droits de succession font logiquement l’objet de propositions de réformes nombreuses, qui poursuivent des objectifs différents. Certains pointent du doigt les dispositifs dérogatoires. Par exemple, les dispositifs d’exonérations fiscales bénéficiant aux transmissions d’actifs professionnels, tels que le Pacte Dutreil, qui visait, lors de sa création, à éviter que les héritiers d’un chef d’entreprise ne soient contraints, pour acquitter les droits de succession, soit de prélever sur l’entreprise des sommes excessives sous forme de dividendes, soit de céder l’entreprise à un tiers, font aujourd’hui l’objet de plusieurs critiques. Certaines études remettent en cause la pertinence de la transmission familiale en termes de performance des entreprises. D’autres, sans discuter son objectif, estiment que l’allégement des conditions de détention des actifs professionnels et l’élargissement des actifs éligibles sont susceptibles de détourner le dispositif de sa finalité initiale. Autre critique émise, l’absence d’imposition de la transmission de l’usufruit, à l’occasion de la reconstitution de la pleine propriété, ne devrait pas être une conséquence obligatoire du démembrement, d’autant plus que les biens ainsi transmis ont pu gagner en valeur entre la donation en nue-propriété et la reconstitution de la pleine propriété. À l’inverse, d’autres propositions recommandent un allégement des droits de succession, soit de façon globale, compte tenu du poids de la fiscalité du patrimoine en France, soit de façon plus ciblée pour répondre à certaines évolutions sociétales, en permettant, par exemple, une transmission plus précoce des patrimoines ou en allégeant la fiscalité applicable aux successions bénéficiant aux lignes collatérales et aux beaux-enfants. Selon la Cour des comptes, si une réforme des droits de succession avait lieu, il faudrait, avant tout, veiller à l’équilibre des finances publiques. Une baisse du montant de l’impôt devrait nécessairement être compensée par un élargissement de l’assiette fiscale. Cet impératif de préserver le rendement global de l’imposition conduit à poursuivre simultanément deux objectifs : l’élargissement de l’assiette de l’impôt à travers la réduction des avantages fiscaux attachés au « Pacte Dutreil » et à l’assurance-vie, d’une part, et une réduction ciblée des taux d’imposition, d’autre part, en faveur notamment des collatéraux ou des enfants du conjoint, destinée à mieux prendre en compte les évolutions familiales et sociétales.

Des pistes de réforme

La Cour des comptes propose de privilégier la voie d’une réduction des avantages fiscaux dérogatoires au profit d’une baisse ciblée des taux d’imposition en veillant à maintenir le produit global de l’impôt. En outre, elle a formulé plusieurs recommandations :
– rendre obligatoire la télédéclaration des successions ;
– une fois l’obligation de télédéclaration des successions mise en œuvre, désigner des agents référents au sein de chaque direction départementale des finances publiques pour assurer les relations avec les notaires ainsi que le dialogue avec les services de contrôle et l’orientation, le cas échéant, des dossiers vers ces services ;
– expertiser la mise en place d’un dispositif de transmission, par les compagnies d’assurance et les établissements bancaires, des informations relatives au nombre de bénéficiaires de chaque contrat d’assurance-vie et aux primes correspondantes, à la plate-forme e-enregistrement ;
– réaliser une étude statistique relative aux droits de mutation à titre gratuit avant toute évolution législative.

Article publié le 04 octobre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : RICHLEGG.COM

Quasi-usufruit : certaines créances de restitution ne sont plus déductibles

L’administration fiscale a publié des précisions sur les limitations de la déductibilité d’une créance de restitution d’un nu-propriétaire dans le cadre d’une transmission de sommes d’argent avec réserve d’usufruit.

Lorsqu’une somme d’argent est transmise (par exemple, par le biais d’une donation) avec une réversion d’usufruit, on parle alors d’un quasi-usufruit. Cette situation permet à l’usufruitier de se comporter comme un véritable propriétaire, c’est-à-dire de dépenser ou de réinvestir ces sommes, à charge pour lui de les restituer à l’extinction de ses droits, c’est-à-dire à son décès. Lorsque cet évènement se produit, le quasi-usufruit s’éteint et le nu-propriétaire (le plus souvent des héritiers), titulaire d’une créance dite de restitution, deviennent alors pleins propriétaires du capital. Cette créance venant s’exercer sur l’actif de succession de l’usufruitier. Le nu-propriétaire « récupère » ainsi la propriété de la somme d’argent en franchise de droits de mutation puisque cette créance va pouvoir être déduite fiscalement de cette même succession.

Limiter les abus

Pour limiter les abus et les effets d’aubaine, la loi de finances pour 2024 a introduit notamment des dispositions visant à rendre non déductible les créances de restitution portant sur les sommes d’argent (chèque, virement, mandat ou remise d’espèces) dont le défunt s’était réservé l’usufruit. Il en va de même, en principe, lors d’une opération par laquelle le bien sur lequel le défunt s’était réservé l’usufruit est liquidé sous forme d’une somme d’argent (paiement ou remboursement d’une créance, rachat d’un contrat de capitalisation, par exemple), avec report de l’usufruit sur le prix de cession ou sur le produit de la liquidation.

Précision : lorsque les droits d’usufruit réservé et de nue-propriété du bien démembré sont, postérieurement à la cession, reportés par subrogation réelle, légale ou conventionnelle, sur un bien autre qu’une somme d’argent (tel qu’un contrat de capitalisation, des valeurs mobilières, des crypto-actifs, un compte courant d’associé, etc.), le report ne crée pas de dette de restitution portant sur une somme d’argent.

Récemment, l’administration fiscale a publié ses commentaires sur ce dispositif. Des commentaires permettant de dissiper certaines interrogations. Premier point, ces dispositions s’appliquent aux successions ouvertes à compter du 29 décembre 2023.Deuxième point, la créance de restitution exigible par le nu-propriétaire donne désormais lieu à la perception de droits de mutation par décès dus par le nu-propriétaire et calculés d’après le degré de parenté existant entre ce dernier et l’usufruitier, au moment de la succession ou de la constitution de l’usufruit, si les droits dus sont inférieurs. Étant précisé que l’imputation des droits déjà payés est applicable même si les droits de donation ont été acquittés par le donateur. Autre précision, si l’actif successoral est insuffisant pour régler la créance de restitution, le nu-propriétaire ne sera pas imposable à concurrence du montant irrécouvrable. À noter que certaines situations ne sont pas concernées par cette non-déductibilité. Tel est le cas des créances de restitution issues :
– d’un quasi-usufruit successoral (quasi-usufruit légal du conjoint survivant) ;
– de l’exercice d’un avantage matrimonial ou d’un préciput ;
– d’un quasi-usufruit mis en place dans les clauses bénéficiaires des contrats d’assurance-vie ;
– d’un quasi-usufruit résultant de la distribution de dividendes prélevés sur les réserves ;
– d’un quasi-usufruit constitué sur le prix de cession d’un bien non contracté dans un objectif principalement fiscal.

Un objectif principalement fiscal

Toutefois, dans ce dernier cas, une source d’inquiétude demeure. Pour prétendre au bénéfice de la déductibilité, le nu-propriétaire doit être en mesure de justifier que la dette n’a pas été contractée dans un objectif principalement fiscal. Des moyens de preuve qui peuvent être difficiles à apporter en pratique. Pour caractériser cette absence de but principalement fiscal, l’administration fiscale se base sur un faisceau d’indices tenant compte notamment :
– du temps écoulé entre le démembrement de propriété et la cession du bien démembré ou de l’opération assimilable. En effet, plus la durée écoulée entre le démembrement et la cession ou la liquidation des biens démembrés est longue, moins la dette de restitution sur la somme d’argent résultant de cette liquidation est susceptible d’être regardée comme poursuivant un but principalement fiscal. Cette durée est également à apprécier à la lumière de la variation à la baisse de la valeur des biens démembrés (exemples : valeurs mobilières non garanties, contrat de capitalisation en unités de comptes) ;
– des motivations patrimoniales de la cession du bien ou de l’opération assimilable. Par exemple, le report de l’usufruit sur la somme d’argent constituant le prix de cession ou le produit de la liquidation du bien démembré peut s’expliquer par la motivation patrimoniale de pallier l’insuffisance de liquidités nécessaires pour s’acquitter de dépenses d’hébergement de l’usufruitier ;
– du degré de latitude de l’usufruitier à décider du report de l’usufruit sur le prix de cession ou sur le produit de l’opération assimilable à la cession. À cet égard, en cas de cession de la nue-propriété d’un bien au prix du marché avec réserve d’usufruit par le cédant, l’exercice par le nu-propriétaire de ses droits pour permettre, tant la cession ultérieure du bien que le report de l’usufruit sur le produit de la cession permet de déduire que la dette de restitution à son profit n’a pas été contractée dans un objectif principalement fiscal. Au final, avant de mettre en œuvre certaines opérations de démembrement de propriété, il conviendra de tenir compte de ces différentes précisions afin d’éviter de tomber sous le coup de cette présomption d’objectif principalement fiscal !

BOI-ENR-DMTG-10-40-20-20 du 26 septembre 2024

Article publié le 03 octobre 2024 – © Les Echos Publishing 2024 – Crédit photo : Thai Noipho / Getty images